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Foyers pour ainés : augmenter les heures de soins est « irréaliste » au N.B.

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Les nouvelles normes na‐ tionales pour les foyers de soins de longue durée sont condamnées à rester au stade des bonnes inten‐ tions, tant que les condi‐ tions de travail ne seront pas améliorées, croit des exports au NouveauBru­nswick.

Ottawa a publié cette se‐ maine ses normes nationales pour les foyers de longue du‐ rée. L'Organisati­on des normes de santé recom‐ mande que les résidents des centres de soins reçoivent en moyenne 4,1 heures de soins par jour.

Au Nouveau-Brunswick, les normes provincial­es de‐ mandent que chaque ré‐ sident reçoive en moyenne 3,3 heures de soins par jour, mais on ne les atteint même pas.

Disant se baser sur les ana‐ lyses que l’organisme qu’il pré‐ side effectue auprès des tra‐ vailleurs des foyers de soins spéciaux et des familles des résidents, Marcel Larocque, de l’Associatio­n francophon­e des aînés du Nouveau-Bruns‐ wick (AFANB), dit qu’on serait plus près des 2 heures de soins par jour.

Dans la pratique, même le 3,3 [heures de soins par ré‐ sident] du Nouveau-Bruns‐ wick, ce qu'on me dit, [c’est que] ce n'est pas atteint, a-t-il déclaré en entrevue, mercre‐

Ceci est corroboré par le représenta­nt syndical Jason St-Onge. Le premier vice-pré‐ sident du Conseil des syndi‐ cats des foyers de soins du Nouveau-Brunswick (CSFSNB) dit qu’on constate en moyenne 2,5 ou 2,6 heures de soins quotidiens par per‐ sonne.

Les deux hommes arrivent au même constat : rehausser les normes ne signifie rien, concrèteme­nt, si l’on n’a pas assez de personnel pour ef‐ fectuer le travail.

Si le fédéral considère qu'augmenter la norme c'est un plus, bravo. Maintenant il reste à mettre des stratégies pour du recrutemen­t et la ré‐ tention du personnel.

Marcel Larocque, pré‐ sident, Associatio­n franco‐ phone des aînés du NouveauBru­nswick

Pour atteindre le 4,1 [d’heures de soins par ré‐ sident], ce qui serait mer‐ veilleux, premièreme­nt, le gouverneme­nt devrait plutôt se pencher sur le problème de rétention et de recrutemen­t , a déclaré Jason St-Onge dans une entrevue séparée, mer‐ credi.

On se fera pas des ca‐ chettes, dans la province du Nouveau-Brunswick, présen‐ tement il y a un manque ex‐ trême de personnel dans les foyers de soins, poursuit le porte-parole du syndicat qui représente plus de 4600 tra‐ vailleurs dans la province.

On a besoin de plusieurs centaines d’employés supplé‐ mentaires, précise-t-il, et pas seulement ceux qui soignent directemen­t les résidents. Tous les départemen­ts sont en manque, que ce soit le ser‐ vice alimentair­e, ou la buan‐ derie, le service de ménage, ainsi de suite.

De meilleurs salaires et de meilleures conditions de tra‐ vail sont essentiels, ajoute M. St-Onge, car leur absence aggrave le problème.

Le manque de personnel empêche l’atteinte des objec‐ tifs, et cet échec constant pèse lourd sur les travailleu­rs, qui dans certains cas n’en peuvent plus.

À chaque fois, on réalise que même les normes du Nouveau-Brunswick ne sont pas atteintes. Ça explique pourquoi le personnel est épuisé, ça explique pourquoi le personnel ne peut pas faire ce qu'il voudrait faire. Comme une aide-soignante nous a dit : on arrive chez nous le soir, on pleure parce qu'on a tra‐ vaillé comme des fous, mais on n'a pas pu faire ce qu'on aurait voulu faire pour les ré‐ sidents, déclare Marcel La‐ rocque.

On voit beaucoup de dé‐ parts dans les foyers de soins puisque les surcharges de tra‐ vail sont rendues trop grandes. On voit beaucoup de maladies, on voit beaucoup de blessures au travail , ren‐ chérit Jason St-Onge.

Au moment où on se parle, je suis sûr qu'il y a des qui résidents qui sont dans des vêtements souillés, des résidents qui ont faim, qui ont reçu une nourriture trop tard ou trop froide ou pas adaptée à eux. Je suis sûr que la médi‐ cation n'a pas été donnée se‐ lon les prescripti­ons au dé‐ part, déplore Marcel La‐ rocque. Est-ce que c'est par‐ tout? Non. Mais est-ce qu'il y a des cas? Je peux l'affirmer sans aller faire une étude.

Les moyens d'agir

Le président de l’associa‐ tion des aînés francophon­es répète que le gouverneme­nt du Nouveau-Brunswick, avec les surplus records engendrés ces dernières années, a le budget pour agir.

La province, dit M. La‐ rocque, est dans une situa‐ tion où elle pourrait enfin in‐ vestir dans sa population, les aînés, la petite enfance, les garderies [...] versus couper des taxes à des grandes en‐ treprises. Payer la dette, c'est important, oui. Mais pourquoi tout payer la dette et que les gens souffrent? Je pense que la province a un sérieux exer‐ cice de responsabi­lité à faire pour placer les argents où ça compte.

Le manque de personnel et la difficulté à retenir les tra‐ vailleurs ne sont pas des dé‐ veloppemen­ts nouveaux, dit le représenta­nt du syndicat. Jason St-Onge s’interroge sur la volonté des instances gou‐ vernementa­les. Ils semblent être au courant de la problé‐ matique qu'on a dans les foyers de soins. Sont-ils prêts à avoir une meilleure ouver‐ ture pour essayer de régler la problémati­que? C'est [la ques‐ tion] qu'on se pose, parce que la problémati­que n'est pas de‐ puis les derniers mois. Ça per‐ dure depuis plusieurs années, mais on ne voit aucune amé‐ lioration du côté du gouver‐ nement.

Le 4,1 [d’heures de soins par résident], ce serait su‐ perbe, ce serait l'idéal. Réa‐ liste? Je ne pense pas. Tant et aussi longtemps que les pro‐ blèmes de rétention et de re‐ crutement ne sont pas réglés, même si le gouverneme­nt donnait 10 heures de soins par résident par jour, on ne peut même pas faire la base qui est là présenteme­nt , mar‐ tèle Jason St-Onge.

On peut mettre une norme à trois, quatre, cinq, vingt-huit, faut d'abord aller chercher des gens sur le ter‐ rain, illustre Marcel Larocque.

D’après le reportage de Sarah Déry

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