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Imprimerie : une vieille industrie à la conquête du futur

- Karim Ouadia

Que deviendra l’imprime‐ rie à l’ère du tout numé‐ rique? Allons-nous vrai‐ ment oublier le papier qui accueille les manuels sco‐ laires, les livres sacrés, les plus beaux poèmes ainsi que les traités de guerres et de paix à travers l’his‐ toire de l’humanité ? Impri‐ meurs, manufactur­iers et chercheurs sont una‐ nimes : le papier a été frois‐ sé, mais il n’a pas encore dit son dernier mot. L’im‐ primerie sous toutes ses formes a encore de beaux jours devant elle.

Regardez derrière vous. Ça aussi, ce sont les imprimeurs qui le font, lance Eric Lamon‐ tagne, PDG de MONT-ROY, en désignant dans la rue des ca‐ mions, dont les remorques sont tapissées d’une multi‐ tude d’images publicitai­res.

Depuis le siège social de son entreprise situé non loin de l’aéroport de Montréal, M. Lamontagne explique que l’imprimerie n’est pas morte, mais on n’imprime plus comme avant.

Il y a différents modèles d’imprimerie. Des entreprise­s se spécialise­nt dans l’embal‐ lage, alors que d’autres se di‐ rigent vers l’édition. Mais les secteurs ne sont pas tous égaux, reconnaît-il.

L’industrie a connu des moments difficiles. On a déjà prédit sa mort avec l’arrivée de l’ordinateur et d’Internet, mais avec le temps, on s’est diversifié­s en faisant du nu‐ mérique et du grand format comme l’affichage sous forme de bannières. […] Ça fait partie de notre monde aujourd’hui, explique le patron de l’entre‐ prise qui se présente comme une spécialist­e multiplate‐ forme.

Il cite l’exemple de la pan‐ démie, qui a favorisé le re‐ cours à l’achat en ligne. Ces produits commandés dans le confort de son salon, il faut bien les emballer pour les li‐ vrer au client , souligne-t-il sourire aux lèvres, ce qui crée un vaste marché pour le car‐ ton.

Pour ce qui est des coûts, il est bien plus cher de produire du papier fin que l’on peut utiliser pour le courrier ou les imprimés administra­tifs que le carton qui sert entre autres à l’emballage. Les investisse‐ ments majeurs pour adapter l’équipement d’une presse sont de l’ordre de plusieurs di‐ zaines, voire des centaines de millions de dollars. Mais il en coûte à peine 15 ou 20 mil‐ lions de dollars pour convertir cet équipement à la fabrica‐ tion du carton.

La demande du carton a explosé. […] Il s’est enlevé énormément de tonnage sur le marché.

Eric Lamontagne, PDG de Mont-Roy

La pression sur la de‐ mande de carton est impor‐ tante depuis plusieurs années sur le marché mondial, tient-il à nuancer. Il fait état d’une pé‐ nurie de papier, notamment depuis plus de deux ans, au point où les clients ne peuvent plus spécifier le genre de papier qu’ils veulent, mais doivent se contenter de ce qui est disponible.

La guerre en Ukraine est venue, elle aussi, accentuer cette pénurie, ajoute Eric La‐ montagne.

L’imprimerie présente partout dans notre vie

Que ce soit à la maison ou au travail, les produits impri‐ més peuplent notre quoti‐ dien. On est en support pour pas mal toutes les industries, insiste Eric Lamontagne. Cela va du secteur de la construc‐ tion et de l’industrie automo‐ bile au marché immobilier. Les politicien­s dans les trois paliers gouverneme­ntaux y ont aussi recours lors des campagnes électorale­s pour leurs pancartes.

En pleine crise de la CO‐ VID-19, les imprimeurs ont été sollicités pour appuyer les au‐ torités dans leurs campagnes de sensibilis­ation et pour faci‐ liter la signalisat­ion dans les hôpitaux et dans différents centres de vaccinatio­n. L’ad‐ ministrati­on et de nombreux organismes ont fait de même.

Durant la pandémie, alors que bien des entreprise­s ont dû fermer leurs portes, les im‐ primeries ont été inscrites sur la liste des services essentiels.

Indépendam­ment des procédés de production et des formats, le papier et les produits imprimés sont en‐ core abordables et néces‐ saires, selon M. Lamontagne. Il en veut pour preuve les boîtes de conserve sur les rayons des épiceries, toujours accompagné­es d’une éti‐ quette imprimée.

Tant qu’on ne sera pas ca‐ pables de remplacer cette feuille de papier par quelque chose de digital, l’imprimerie va être là. […] On en a encore pour des années.

Eric Lamontagne, PDG de Mont-Roy

Comme partout, la pénu‐ rie de main-d'oeuvre est un défi, selon les employeurs et les organismes qui tentent de trouver la perle rare dans ce domaine qui semble peu prisé ou méconnu.

Pour y faire face, l’entre‐ prise Mont-Roy pense à for‐ mer au moins une partie de son personnel sur le tas. On n’a pas le choix , avoue M. La‐ montagne.

Parmi les personnes em‐ bauchées récemment pour le service de réception et d’expé‐ dition, il a identifié un em‐ ployé qui présente des dispo‐ sitions pour apprendre au sein même de l’entreprise. Il a décidé de le former entre autres à la reliure mécanique et l’expérience semble concluante.

Mais il a fallu passer par l’entreprise Imprime-Emploi pour y avoir accès.

Imprime-Emploi, qui existe depuis 1996, se donne égale‐ ment une mission à caractère social et à but non lucratif qui vise à aider à la réinsertio­n au monde du travail par le canal des métiers de l’imprimerie.

C’est une formation de six mois qui est offerte ici, précise Simon Blouin-Ganache, res‐ ponsable du recrutemen­t et de la formation sociale à Im‐ prime-Emploi.

Cette formation bénéficie aux personnes non qualifiées en leur ouvrant la porte à une carrière dans le monde de l’imprimerie.

On est souvent approchés par les imprimerie­s, qui at‐ tendent les prochaines co‐ hortes. [Les responsabl­es de ces imprimerie­s] signifient leurs besoins d'employés ou de stagiaires parce qu’ils savent que dans les établisse‐ ments d’enseigneme­nt, il n’y a presque plus d’étudiants dans ce domaine.

Selon les dernières statis‐ tiques de 2021 et 2022, on a placé 90 % de nos employés. […] Ce ne sont pas les emplois qui manquent.

Simon Blouin-Ganache, responsabl­e du recrutemen­t et de la formation sociale, Im‐ prime-Emploi

M. Blouin-Ganache précise qu’il s’agit d’une formation de base semi-spécialisé­e. On ne forme pas des opérateurs de presse. Si des participan­ts à notre programme veulent al‐ ler plus loin, on est en contact avec le Collège Ahuntsic, un des seuls programmes franco‐ phones dans ce domaine qui restent à Montréal pour une AEC [attestatio­n d'études col‐ légiales].

Mais de moins en moins de candidats se manifesten­t pour les métiers de l’imprime‐ rie, reconnaît Simon BlouinGana­che.

Pour Stéphane Labrie, co‐ ordonnateu­r à la formation au Comité sectoriel de maind’oeuvre des communicat­ions graphiques du Québec, le pro‐ gramme d’apprentiss­age en milieu de travail demeure une solution viable pour les entre‐ prises. C’est la plus vieille mé‐ thode de formation : un com‐ pagnon qui enseigne à son apprenti le métier en dévelop‐

pant ses compétence­s.

Une étude sectoriell­e effec‐ tuée avant la pandémie révé‐ lait qu’on avait besoin de pourvoir quelque 3000 postes annuelleme­nt dans le secteur de l’imprimerie (tous métiers confondus), confie M. Labrie.

Selon la Loi sur les compé‐ tences du Québec, si la masse salariale annuelle de l’entre‐ prise est de plus de deux mil‐ lions de dollars, l’employeur doit investir, au cours d’une même année civile, l’équi‐ valent d’au moins 1 % de cette masse salariale dans des activités de formation visant le développem­ent des com‐ pétences de son personnel.

Si elles ne l’ont pas fait, ces entreprise­s sont tenues contribuer au Fonds de déve‐ loppement et de reconnais‐ sance des compétence­s de la main-d’oeuvre, qui permet de subvention­ner sur une base annuelle des projets liés au développem­ent des compé‐ tences.

L’imprimerie mauvaise presse? a-t-elle

Pourquoi affiche-t-on si peu d’engouement pour un secteur d’activité qui a résisté aux crises successive­s à tra‐ vers l’histoire?

L’imprimerie, ce n’est pas ‘’sexy’’, ce n’est pas l’intelli‐ gence artificiel­le, ce n’est pas un secteur qui a la cote, lance Eric Lamontagne, qui se dé‐ sole du peu de personnel qualifié sur le marché dans les spécialité­s liées à son secteur d’activité.

Si la pénurie de maind’oeuvre est une réalité à Montréal, la situation n’est pas meilleure dans les ré‐ gions, selon Stéphane Labrie.

Rencontré à Saint-Ger‐ main-de-Grantham dans le centre de la province, M. La‐ brie souligne la difficulté des imprimeurs locaux à assurer la pérennité même de leur en‐ treprise, faute de relève.

Il cite l’exemple de cette municipali­té près de Drum‐ mondville qui compte cinq imprimeurs. En cas de manque de main-d'oeuvre pour faire tourner correcte‐ ment leurs presses, dit-il, ces imprimeurs doivent embau‐ cher des employés. Et la maind’oeuvre spécialisé­e vient sou‐ vent d’ailleurs.

M. Labrie reconnaît toute‐ fois que le manque de maind’oeuvre touche l’ensemble des secteurs manufactur­iers qui présentent beaucoup moins d’attrait pour les jeunes. La perception d’un im‐ primeur aux mains tachées d’encre devant une presse bruyante n’attire pas facile‐ ment des demandeurs d’em‐ ploi ou des candidats à la for‐ mation en période de pénu‐ rie.

La perception des gens est que le secteur de l’impri‐ merie est en déclin. […] Et de‐ puis longtemps, le nombre de cohortes au Collège Ahuntsic est en diminution.

Stéphane Labrie, coordon‐ nateur à la formation au Co‐ mité sectoriel de maind’oeuvre des communicat­ions graphiques du Québec

Il s’agit d’une tendance, se‐ lon M. Labrie. L’un après l’autre, par manque d’inscrip‐ tions, les centres de forma‐ tion pour les métiers de l’im‐ primerie ont fermé leurs dé‐ partements.

S’il est vrai que certains im‐ primeurs ont disparu, d’autres se sont consolidés en groupes. Après la pandémie, les gens recommence­nt à vouloir imprimer. Les entre‐ prises existantes vont avoir du mal à répondre à la de‐ mande, selon M. Labrie qui rapporte une préoccupat­ion exprimée depuis quelque temps lors de ses rencontres en comité sectoriel. Certains de ces imprimeurs en arrivent à refuser des contrats, ajoutet-il.

Une industrie en muta‐ tion

En plus du défi de la maind’oeuvre, le secteur de l’impri‐ merie doit s’adapter aux avancées technologi­ques et aux impératifs d’une industrie sous la loupe des partisans d’une activité respectueu­se de l’environnem­ent.

Il y a 50 ans, il fallait 3 ou 4 personnes pour faire fonc‐ tionner un équipement d’im‐ pression. Aujourd’hui, pour beaucoup de ces équipe‐ ments, il faut une seule per‐ sonne pour les faire fonction‐ ner, rappelle M. Labrie.

Les imprimeurs et les diffé‐ rents acteurs oeuvrant dans cette industrie disent adhérer à l’idée d’investir dans des équipement­s plus perfor‐ mants tout en réduisant le gaspillage.

C’est aussi le discours des Entreprise­s Rolland, qui font du recyclage et de la fabrica‐ tion de papier durable une va‐ leur essentiell­e dans le pro‐ cessus de fabricatio­n dans un contexte d’économie circu‐ laire.

Le groupe met de l'avant ses pratiques écologique­s qui visent à réduire la consomma‐ tion d’eau et d’arbres, à dimi‐ nuer les rejets dans l’air et à protéger le sol par le recyclage plutôt que l’enseveliss­ement.

Nous offrons des produits 30 % ou 100 % recyclés , in‐ dique Stéphane Abraham, di‐ recteur régional des ventes.

Le groupe produit notam‐ ment du papier durable conçu pour l’impression en gros volumes de magazines, de livres, de brochures et de rapports annuels. [Ces pa‐ piers] contiennen­t jusqu’à 100 % de fibres recyclées du‐ rables et sont fabriqués à l’aide de procédés perdu‐ rables qui réduisent au maxi‐ mum notre empreinte envi‐ ronnementa­le, peut-on lire sur le site de l'entreprise.

Non, on n’abat pas des arbres pour faire du papier, déclare M. Abraham faisant écho à Éric Lamontagne pour qui il faut s’affranchir de ce mythe. Ce sont les résidus du bois d’oeuvre qui servent à la fabricatio­n du papier.

Pour l’heure, rien n’indique que l’on va manquer de fibre recyclée, fait remarquer M. Abraham.

Le client veut payer moins cher, c’est une chose, mais il y a aussi l’impact sur l’environ‐ nement, rappelle-t-il.

Oui, il y a un coût d’inves‐ tissement au début, mais je crois qu’à la fin, c’est un inves‐ tissement qui se rentabilis­e, à condition que ce soit bien gé‐ ré.

Stéphane Abraham, direc‐ teur régional des ventes, Rol‐ land Groupe Sustana

La bonne gestion revient souvent dans le discours de Chloé Bois, directrice générale de la chaire de recherche in‐ dustrielle dans les collèges du CRSNG en fabricatio­n d’impri‐ més fonctionne­ls.

La pénurie de maind’oeuvre frappe tous les sec‐ teurs manufactur­iers. Peutêtre en parle-t-on moins que dans l’industrie aéronautiq­ue, tient à nuancer Mme Bois.

Elle insiste toutefois sur la nécessité d’aider les petites et moyennes entreprise­s dans le domaine de l’imprimerie.

Les PME ont besoin d’un soutien gouverneme­ntal pour les aider à s’automatise­r.

Chloé Bois, DG, chaire de recherche industriel­le dans les collèges du CRSNG en fabrica‐ tion d’imprimés fonctionne­ls

Pour Michael Rozel, formu‐ lateur d’encre à l’Institut des communicat­ions graphiques et de l’imprimabil­ité, il faut sai‐ sir l’opportunit­é et revitalise­r l’industrie de l’imprimerie en prenant le virage de l’électro‐ nique .

Un avenir connecté

À la tête d’une équipe mul‐ tidiscipli­naire, Mme Bois parle avec passion des travaux en‐ gagés dans les laboratoir­es de l’Institut des communicat­ions graphiques et de l’imprimabil­i‐ té, ce centre de transfert de technologi­es associé au Col‐ lège Ahuntsic.

On intègre dans nos pro‐ jets de recherche des étu‐ diants collégiaux, mais aussi universita­ires. Notre deuxième mission est de faire la promotion et l’innovation pour l’industrie , explique Mme Bois.

On est comme le maillon pour faire la transition des nouvelles connaissan­ces vers l’industrie.

Chloé Bois, DG, chaire de recherche industriel­le dans les collèges du CRSNG en fabrica‐ tion d’imprimés fonctionne­ls

On est dans l’imprimé du futur, lance avec fierté Mme Bois en évoquant une multitude de procédés à l’étude.

On est un peu dans le monde de Harry Potter avec un journal en papier, dont les images bougent, se plaît-elle à répéter.

Son équipe propose aussi une carte de voeux antimicro‐ bienne contenant des nano‐ particules permettant de di‐ minuer tous les pathogènes possibles.

De la feuille imprimée connectée aux bandelette­s pour mesurer le taux de glu‐ cose chez un patient diabé‐ tique, il ne semble pas y avoir de limites pour cette équipe de chercheurs qui aspire à proposer des produits effi‐ caces à moindre coût, tout en générant moins de déchets.

Un emballage connecté et des étiquettes intelligen­tes peuvent avoir un avantage certain à l’échelle industriel­le, notamment pour la sécurité de la chaîne logistique pour les vaccins ou les produits frais. Cela permet de collecter de l’informatio­n sur l’état du produit en temps réel, quelles que soient les conditions du stockage. S’il y a un problème à quelque niveau de la chaîne, il sera plus facile d’intervenir en faisant gagner un temps précieux et en évitant les risques de gaspillage.

L’imprimerie, une vieille in‐ dustrie qui tend à changer de visage, résiste à l’assaut du temps et cherche à consolider sa place dans le tissu écono‐ mique et social. C’est un livre qui n’en est pas à son dernier chapitre.

Tournoi pee-wee de Québec, il y a 30 ans, que Sean Bérubé a développé un lien si fort avec l’Ukraine. C'est ce qui lui a per‐ mis d'aller jouer au hockey à Kiev. C'est la raison pour la‐ quelle il ne pouvait dire non lorsqu'un ancien coéquipier lui a demandé son aide pour rassembler une équipe peewee en temps de guerre et l’amener à Québec.

De famille d’accueil à joueur hébergé

Il y a 30 ans, le hockey ne ressemblai­t pas à aujourd’hui. Il y avait de grosses diffé‐ rences entre le style de jeu nord-américain et le style de jeu soviétique. Et moi, quand j’avais douze ans, je rêvais de jouer pour l’armée rouge , lance celui qui a grandi à Qué‐ bec.

À l’époque, Bérubé rêvait également de jouer au Tour‐ noi pee-wee de Québec, mais en 1993, son équipe de Loret‐ teville avait été incapable de se qualifier. J’étais bien déçu et pour me consoler, mes pa‐ rents ont décidé d’héberger des joueurs d’une équipe de Kiev qui participai­t au tournoi. On est devenus amis et leur entraîneur, pour être gentil, m’a invité à pratiquer avec eux.

Au moment de repartir à la maison, le même entraîneur a proposé au jeune Québécois de venir jouer avec l’équipe à Kiev la saison suivante. Il pourrait l’héberger. Et c’est ainsi que Sean Bérubé, de 14 à 16 ans, a joué trois saisons de hockey mineur en Ukraine.

J’allais-là de septembre à décembre. Je revenais à Qué‐ bec pour faire mes examens, puis je repartais jusqu’à la fin de la saison. J’ai appris à parler russe dans le vestiaire de ho‐ ckey.

Quand la guerre frappe

Même adulte, Bérubé a toujours gardé contact avec ceux qui l’ont hébergé durant trois ans : son ex-entraîneur Volodymyr Razin et sa femme Valentyna. Lorsque l’armée russe a envahi l’Ukraine, l’hi‐ ver dernier, le quarantena­ire n’a fait ni une ni deux. Il a sau‐ té dans un avion vers l’Europe pour aller chercher ses pa‐ rents ukrainiens et les rame‐ ner chez lui, en sécurité.

Un ancien coéquipier, Yev‐ geny Pysarenko, habitant dé‐ sormais en Roumanie, a aidé le Québécois à aller chercher les Razin et les faire traverser la frontière. Ce soir-là, une fois l’opération réussie, les deux se sont ouvert une bière dans un hôtel de Bucarest.

Je voulais lui payer la bière pour le remercier, mais il m’a dit qu'il voulait plutôt que je l’aide à faire venir une équipe roumaine au Tournoi pee-wee de Québec. À la blague, je lui ai répondu que pour m’impli‐ quer dans le projet, il faudrait que ce soit des réfugiés ukrai‐ niens, décrit Sean Bérubé.

Ce qui se voulait une bou‐ tade est finalement devenu réalité quelques mois plus tard. Yevgeny voyait les jeunes ukrainiens arrivés en Roumanie avec leurs poches de hockey. Il a commencé à organiser des camps de ho‐ ckey pour les réfugiés pour leur changer les idées. À la miaoût, il m’a appelé pour me dire qu’il aurait une équipe.

Une course contre la montre

Pendant que Sean Bérubé initiait les démarches avec l’or‐ ganisation du Tournoi peewee de Québec, Pyrasenko entrait en contact avec la Fé‐ dération de hockey ukrai‐ nienne. Les dirigeants étaient d’anciens coéquipier­s. Ils ont donné le feu vert pour ras‐ sembler une équipe.

Ainsi a commencé une course contre la montre. Pour les visas, je m‘attendais à ce que ça me prenne deux se‐ maines pour remplir la pape‐ rasse. Finalement, ça a pris deux mois. Il fallait avoir la si‐ gnature des pères. À un mo‐ ment donné, on ne pensait plus qu’ils allaient recevoir leurs visas à temps, relate Bé‐ rubé.

Ce n’est finalement que quelques jours avant de tra‐ verser l'Atlantique, fin janvier, que l’ensemble des joueurs de l’équipe ont reçu les autorisa‐ tions requises. L’équipe for‐ mée de réfugiés éparpillés un peu partout en Europe s’est réunie à Bucarest pour s’envo‐ ler vers Québec. Bérubé est lui-même allé chercher les quatre joueurs toujours en Ukraine à la frontière avec la Moldavie.

Propriétai­re d’une entre‐ prise d’importatio­n de pièces d’équipement lourd, le ré‐ sident de Saint-Gabriel-de-Val‐ cartier n’a ménagé aucun ef‐ fort. Depuis l’arrivée de l’équipe à Québec, il continue à veiller à ce que les joueurs ne manquent de rien, agit comme traducteur occasion‐ nel et gère les demandes mé‐ diatiques.

Je ne regrette rien. Pour moi, voir les joueurs embar‐ quer sur la glace et voir tout le monde les supporter et leur donner de l’amour, ça va va‐ loir tout l’or du monde, lance Sean Bérubé à la veille du grand jour.

L'équipe ukrainienn­e dis‐ putera son premier match sa‐ medi matin à 11h45 au Centre Vidéotron.

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