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Le marché de l’emploi ne semble pas ralentir, malgré les hausses de taux d’intérêt

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Le marché du travail cana‐ dien ne montre aucun signe de ralentisse­ment malgré des taux d'intérêt élevés, une tendance qui, si elle se poursuit, pourrait forcer la Banque du Cana‐ da à augmenter davantage son taux directeur.

La dernière enquête sur la population active de Statis‐ tique Canada, publiée vendre‐ di, a montré que l'économie avait créé 150 000 emplois en janvier.

Pendant ce temps, un plus grand nombre de Canadiens travaillai­ent ou cherchaien­t du travail, puisque 153 000 personnes se sont jointes à la population active.

Royce Mendes, chef de la stratégie macroécono­mique chez Desjardins, a estimé que les données vigoureuse­s sur l'emploi suggéraien­t que les taux d'intérêt ne sont pas as‐ sez élevés ou qu'ils n'ont pas eu assez de temps pour affec‐ ter l'économie plus large‐ ment.

À ce stade-ci, on ne sait pas quelle est la réaction ap‐ propriée de la Banque du Ca‐ nada, mais cela augmente cer‐ tainement les chances qu'elle doive se réengager avec des hausses de taux cette année, a souligné M. Mendes.

Le marché du travail reste tendu, le taux de chômage du pays étant resté stable à 5 %, se situant juste au-dessus de son creux record de 4,9 %, at‐ teint au cours de l'été.

L'économie canadienne suit une tendance à la hausse avec l'emploi depuis sep‐ tembre, ayant ajouté un total de 326 000 emplois, et ce, même si les prévisionn­istes anticipent que le coût d'em‐ prunt plus élevé ralentira considérab­lement l'économie cette année et affectera les ni‐ veaux d'emploi.

Dans sa décision du 25 jan‐ vier, la Banque du Canada a indiqué qu'elle prévoyait ces‐ ser d'augmenter les taux d'in‐ térêt pour l'instant, ce qui laisse le temps aux taux d'in‐ térêt plus élevés de se frayer un chemin dans l'économie.

Cependant, la banque cen‐ trale a souligné que cette pause était conditionn­elle et a laissé la porte ouverte à d'autres hausses de taux si l'inflation se révélait plus te‐ nace que prévu.

Des gains dans tous les secteurs

Des gains ont été réalisés dans tous les secteurs en jan‐ vier, mais surtout dans le commerce de gros et de dé‐ tail, au sein duquel 59 000 em‐ plois ont été créés, selon les précisions de Statistiqu­e Ca‐ nada. Dans les soins de santé et l'assistance sociale, 40 000 emplois ont été ajou‐ tés.

La plupart des emplois ajoutés à l'économie étaient à temps plein, tandis que les personnes âgées de 25 à 54 ans étaient à l'origine des gains.

Au chapitre des provinces, les plus fortes hausses de l'emploi sont survenues en Ontario, au Québec et en Al‐ berta, où les gains nets d'em‐ plois se sont chiffrés respecti‐ vement à 63 000, 47 000 et 21 000. Le taux de chômage au Québec a reculé de 0,2 point de pourcentag­e, à 3,9 %.

Dans une note adressée à ses clients, le directeur des études économique­s de la TD, James Orlando, a qualifié le rapport de vendredi d'érup‐ tion.

Le fait que les gains se soient concentrés sur les em‐ plois à temps plein dans le secteur privé, aux côtés d'un plus grand nombre de per‐ sonnes travaillan­t plus d'heures, rend ce rapport en‐ core plus impression­nant.

James Orlando, directeur des études économique­s de la TD

Les gains d'emplois sur‐ viennent également à un mo‐ ment où les mises à pied dans les secteurs de la technologi­e et du commerce de détail font la une des journaux.

Toutefois, Brendon Ber‐ nard, un économiste principal du site web d'embauche In‐ deed, a souligné que les mises à pied se produisaie­nt réguliè‐ rement et n'influençai­ent pas nécessaire­ment le nombre global d'emplois.

Les entreprise­s indivi‐ duelles ne font vraiment pas bouger l'aiguille des chiffres globaux de l'emploi à l'échelle nationale, a observé M. Ber‐ nard.

Par ailleurs, les chiffres de l'emploi au Canada pour jan‐ vier trahissent une certaine ressemblan­ce avec la vigueur de l'économie américaine, qui a ajouté 517 000 emplois le mois dernier.

Le marché du travail étant en pleine effervesce­nce, les salaires ont également aug‐ menté, bien que ce soit à un rythme plus lent que l'infla‐ tion. En janvier, les salaires ont augmenté de 4,5 % d'une année à l'autre, à un rythme légèrement plus lent qu'en décembre.

Le ralentisse­ment de la croissance des salaires reflète en partie des salaires moyens relativeme­nt élevés en jan‐ vier 2022, les restrictio­ns liées à la COVID-19 ayant entraîné des pertes d'emploi dans les secteurs les moins bien rému‐ nérés.

Les révisions des données de l'enquête sur la population active suggèrent que la crois‐ sance des salaires a culminé à 5,8 % en novembre.

Objectif : atterrissa­ge

en douceur

Depuis mars, la Banque du Canada a relevé son taux di‐ recteur huit fois de suite, le portant à 4,5 %, soit son ni‐ veau le plus élevé de‐ puis 2007.

En règle générale, des taux d'intérêt plus élevés incitent les entreprise­s et les particu‐ liers à réduire leurs dépenses. À mesure que les dépenses ralentisse­nt et que les ventes chutent, les entreprise­s peuvent modifier leurs plans d'embauche.

Alors que la banque cen‐ trale reste concentrée sur la réduction de l'inflation au pays – qui s'élevait à 6,3 % en décembre sur une base an‐ nuelle –, elle insiste sur le fait que le marché du travail ten‐ du est le signe d'une écono‐ mie en surchauffe qui ali‐ mente l'inflation.

La banque centrale espère voir un assoupliss­ement du marché du travail, ce qui, se‐ lon elle, est nécessaire pour que l'inflation revienne à son objectif de 2 %.

Même si les économiste­s notent généraleme­nt que l'emploi est le dernier indica‐ teur à tourner pendant un ra‐ lentisseme­nt économique, le marché du travail a dépassé les attentes de la plupart des économiste­s.

La Banque du Canada vise un atterrissa­ge en douceur, où l'inflation chute sans qu'un grave ralentisse­ment économique se produise.

Par ailleurs, bien que l'éco‐ nomie résiste mieux que pré‐ vu, M. Mendes a estimé qu'il était trop tôt pour dire si la Banque du Canada réussira un atterrissa­ge en douceur.

Je pense que des taux d'in‐ térêt plus élevés ont encore besoin de temps pour se frayer un chemin dans l'éco‐ nomie avant de pouvoir dire que nous sommes tirés d'af‐ faire en ce qui a trait au po‐ tentiel de récession, a-t-il dit.

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