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Le microbiote est créé à l’accoucheme­nt et non durant la gestation, selon une étude

- Nassima Way

Une méta-analyse de quatre études sur le micro‐ biote conclut que la coloni‐ sation bactérienn­e du sys‐ tème digestif du bébé a lieu lors de l'accouche‐ ment et non durant la ges‐ tation, réfutant ainsi l’exis‐ tence d’un microbiote in‐ testinal foetal.

Selon ses auteurs, la colo‐ nisation bactérienn­e com‐ mence lorsque le bébé passe par le canal vaginal et après, notamment lorsqu'il naît par césarienne. Ils estiment que trop de temps et d'argent sont gaspillés à chercher un microbiote chez le foetus, car ils croient qu’il n'existe pas.

Leur étude a été publiée dans la revue scientifiq­ue Na‐ ture (en anglais).

Le microbiolo­giste à l’Uni‐ versité de l’Alberta Michael Gänzle, croit qu'à la lumière de cette conclusion, les re‐ cherches sur le microbiote doivent changer de direction.

Ce qui se passe après la naissance est important. C'est là que nous devons concen‐ trer nos efforts.

Michael Gänzle, microbio‐ logiste à l’Université de l’Alber‐ ta

L'origine du microbiote in‐ testinal est une question im‐ portante pour des chercheurs dans divers domaines, car il est essentiel au système im‐ munitaire et au développe‐ ment sain de l'enfant.

Mettre fin au débat

Les auteurs de l'étude, une équipe de chercheurs multi‐ disciplina­ires, ont voulu tran‐ cher sur une question débat‐ tue à maintes reprises ces dernières années, affirmant que le microbiote foetal n'existe pas.

Ils ont décortiqué les quatre plus récentes études sur la question.

Deborah Sloboda, cher‐ cheuse à l'Université McMas‐ ter qui a participé à la métaanalys­e, est aussi l’auteure d’une des études analysées qui affirme que le microbiote est formé après la naissance.

Je voudrais sortir d'un dé‐ bat qui, à mon avis, utilise des ressources précieuses, et commencer à examiner des choses qui auront vraiment un impact.

Deborah Sloboda, cher‐ cheuse à l'Université McMas‐ ter

Tout ce temps et cet ar‐ gent que nous passons à es‐ sayer de trouver un micro‐ biote foetal, nous pourrions les consacrer à d’autres re‐ cherches [...] parce qu'il n'y a pas beaucoup d'argent pour la recherche au Canada, ditelle.

Elle croit que la recherche devrait maintenant notam‐ ment se concentrer sur ce qui détermine la qualité des bac‐ téries vivantes du vagin et de la région périnéale de la mère.

Nous avons découvert il y a tout juste cinq ans que le microbiote vaginal d’une femme enceinte pourrait être différent de celui d’une femme qui ne l’est pas, et l’on ne sait même pas pourquoi ni comment il change durant la grossesse, dit-elle.

Ce que nous voulons tous, c'est qu'un bébé se déve‐ loppe avec le microbiote le plus sain qu'il puisse avoir,

Échantillo­nnage difficile

L'analyse des recherches sur le microbiote foetal a aussi mis en lumière les difficulté­s de prélever des échantillo­ns de la biomasse microbienn­e de très petits spécimens.

En effet, l’étude explique que les quatre recherches analysées ont été choisies parce qu'elles ont examiné, entre autres, les échantillo­ns de tissus intestinau­x d’un foe‐ tus. Des tissus si petits que le risque de contaminat­ion lors du prélèvemen­t est très élevé.

L'échantillo­nnage des deux études qui affirment qu’il y a un microbiote foetal n’a pas été fait correcteme­nt, dit Michael Gänzle.

Laura Sycuro, professeur­e adjointe au départemen­t de microbiolo­gie, d'immunologi­e et des maladies infectieus­es à l’Université de Calgary, croit aussi que la colonisati­on bac‐ térienne a lieu durant l’accou‐ chement, mais pense que le débat sur cette question risque de se poursuivre.

Nos outils et nos mé‐ thodes [de prélèvemen­ts] ne sont pas suffisamme­nt so‐ phistiqués, car la recherche sur le microbiote est encore jeune, donc il est difficile de répondre, sans aucun doute aux questions [au sujet d’un microbiote foetal], dit-elle.

Cette étude ne met pas fin au débat, car ce n'est pas technologi­quement possible d'y mettre fin aujourd'hui.

Laura Sycuro, professeur­e adjointe au départemen­t de microbiolo­gie, de l’immunolo‐ gie et des maladies infec‐ tieuses à l’Université de Calga‐ ry

Elle croit que les re‐ cherches doivent maintenant se concentrer sur la manière dont les microorgan­ismes in‐ fluencent la reproducti­on hu‐ maine et comprendre davan‐ tage le microbiote de la mère.

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