Formation en soins infirmiers : un accent sur le recrutement, mais moins sur la rétention
En payant les droits de sco‐ larité et rémunérant de fu‐ tures infirmières, le gou‐ vernement du NouveauBrunswick affirme poser un geste concret pour « produire un plus grand nombre d’infirmières et d’infirmiers auxiliaires au‐ torisés et d’infirmières et d’infirmiers immatricu‐ lés ».
Autour d'un système de santé déstabilisé, l’annonce de cette nouvelle initiative travail-études, vendredi, est accueillie avec prudence.
Ça a fait partie de la solu‐ tion, a dit samedi Claire John‐ son, professeure adjointe en gestion des services de la san‐ té à l’Université de Moncton. Elle prévient toutefois que le manque d’emphase sur la ré‐ tention des travailleurs de la santé risque de perpétuer un cercle vicieux ceux-ci.
Dans le cadre du nouveau programme de formation Mission soins infirmiers, des travailleurs de la santé seront payés pour travailler à temps partiel, tout en suivant une
ressenti par formation aux frais de la pro‐ vince. On propose aux prépo‐ sés de devenir infirmier ou in‐ firmier auxiliaire autorisé. Pour ceux qui le sont déjà, on offre la transition vers le rôle d’infirmier immatriculé.
Tout soutien de ce genre est une bonne chose à la base, note la professeure Johnson. Elle espère cepen‐ dant que ce ne sera pas qu’un programme de perfectionne‐ ment professionnel amélioré.
On pourrait faire l’argu‐ ment que, dans le fond, tout ce qu'on est train de faire, c'est d'augmenter le roule‐ ment en quelque sorte, ditelle. Nos préposées vont de‐ venir auxiliaires, nos auxi‐ liaires vont devenir infir‐ mières, puis nos infirmières vont potentiellement accéder à d'autres postes.
Je trouve qu'on met beau‐ coup d'emphase sur la partie recrutement de l'équation, alors que, selon moi, on de‐ vrait mettre plus d'énergie, plus de ressources, plus d'em‐ phase sur la partie rétention, déclare Claire Johnson.
La rétention, ajoute-t-elle, est là où on va pouvoir stabili‐ ser le marché du travail.
Il y a un effet circulaire dont la province a du mal à s’extirper, explique-t-elle. Les travailleurs de la santé qui abandonnent cette carrière laissent un vide qui est mal comblé, ce qui dégrade les conditions de celles et ceux qui restent.
La charge de travail aug‐ mente, puis ça fait que les gens quittent encore plus, dit Claire Johnson. Si on tente de recruter des gens dans un en‐ droit qui est un peu malsain ou qui est déjà tendu, où la charge de travail est très éle‐ vée, on n’a pas le temps d’orienter le nouveau person‐ nel comme on aimerait, alors les gens n'ont pas tendance à vouloir rester.
Cela ne présente pas de très bons arguments aux tra‐ vailleurs que l’on tente de re‐ cruter, et encourage peu à rester ceux qui s’engagent.
La rétention est vraiment très importante pour créer un climat de travail ou un envi‐ ronnement de travail stable et favorable à la rétention, et aussi au recrutement, conclut-elle.
Les effets du projet pilote Mission soins infirmiers se‐ ront évalués dans deux ans. Les participants recevront un salaire et des avantages so‐ ciaux. Les salaires seront maintenus pendant les pé‐ riodes d’apprentissage, y compris les placements cli‐ niques en milieu de travail, et les frais de scolarité seront couverts.
Selon le gouvernement, le programme qui combinera la formation en personne et en ligne comptera 104 premiers participants cet automne à Bathurst et à Saint-Jean.
Le Nouveau-Brunswick y consacre 13,3 millions sur deux ans.
D’après le reportage de Frédéric Cammarano