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Le triomphe de François Girard et de Yannick NézetSégui­n à New York

- Louis-Philippe Ouimet

Sur la scène du prestigieu­x Metropolit­an Opera de New York, une immense lune éclaire la scène réunissant 275 artistes, tandis que s'élève une mu‐ sique céleste. Au coeur de ce Lohengrin de Richard Wagner (1813-1883) revisité, il y a deux amis : le met‐ teur en scène François Gi‐ rard et le directeur musical Yannick Nézet-Séguin.

Lors de la dernière grande répétition devant un public de l’opéra Lohengrin, François Girard était visiblemen­t dans son élément. Des camarades de longue date et des collabo‐ rateurs et collaborat­rices ve‐ naient le saluer entre deux actes, parfois en français.

Le metteur en scène tra‐ vaille depuis cinq ans sur cet opéra de près de quatre heures trente présenté en grande première dimanche soir au Metropolit­an Opera (Met) à New York, puis jus‐ qu’au 1er avril.

Moi je me lasse pas. Le gé‐ nie de Wagner continue de me fasciner. Encore au‐ jourd'hui j'entends des choses pour la première fois, dit-il.

Un opéra présenté à Moscou, le jour de l’inva‐ sion russe de l’Ukraine

François Girard connaît bien l’oeuvre de Wagner. Tou‐ jours au Metropolit­an Opera, il avait mis en scène en 2013 Parsifal, puis en 2020 Le vais‐ seau fantôme.

Son complice artistique Yannick Nézet-Séguin, direc‐ teur musical du Met depuis 2018, abonde dans le même sens. On est un peu fatigués parce que Wagner, c’est un voyage, c’est un marathon , confie le maestro.

Ce Lohengrin nouveau avait déjà été présenté une première fois à Moscou, dans un autre endroit mythique, le théâtre Bolchoï. Le jour de l'invasion russe en Ukraine, on était au Bolchoï avec la première de cet opéra. Russes et Ukrainiens ont vécu ça en jouant Lohengrin main dans la main, il y avait ça en toile de fond, raconte François Girard.

Ce sont des souvenirs qui marquent, encore aujourd'hui je repense à ce qui s'est passé il y a un an, raconte François Girard.

Mais cette fois-ci, c'est dif‐ férent. Le metteur en scène est accompagné par le maes‐ tro Yannick Nézet-Séguin, qui signe la direction musicale de cet opéra grandiose.

C'est peut-être parce qu'on est Québécois, mais j'ai l'im‐ pression qu'on a la même idée par rapport à la vision de Wagner, la même façon de travailler avec les gens du choeur, de la distributi­on, de l'orchestre, explique le chef d’orchestre.

Tout sourire, François Gi‐ rard ajoute : On se retient pour ne pas se faire des high five devant l'orchestre, c'est sûr que c'est une relation ami‐ cale. On parle la même langue, on est des Québécois, on se retrouve dans la loge et on a de la facilité, parce qu'on vient de la même place.

Une oeuvre magistrale créée il y a plus de 150 ans

Lohengrin est un chefd'oeuvre de Richard Wagner créé en 1850. Dans cet opéra romantique et fantastiqu­e, un chevalier mystique veut à tout prix garder l'anonymat après avoir sauvé la duchesse Elsa.

Pour présenter cet univers de mensonges, de trahison et d’amour dans la salle de 3800 places du Metropolit­an Opera, tout a été fait dans la démesure. Les décors sont ti‐ rés d’un autre monde et l’or‐ chestratio­n est majestueus­e.

Dans Lohengrin, il y a douze trompettes hors scène. Un orchestre complet derrière la scène à un moment. Un orgue. On dirait que pour moi, plus il y a de monde, meilleur je suis, affirme Yan‐ nick Nézet-Séguin.

Habité par la même idée de grandeur que son collègue, François Girard concède que le Met lui donne les moyens de ses ambitions : Le Met, c'est une énorme machine. C'est la machine de théâtre la plus grosse que j'ai vue, une machine qui répond si tu pèses sur les bons pitons.

Mordre à pleines dents dans la Grosse Pomme

Installé à New York pour un total de cinq mois, Fran‐ çois Girard reprendra aussi au Met l’opéra Le vaisseau fan‐ tôme, dès le 30 mai.

Mais avant, il présentera dès le 15 mars une nouvelle version de la pièce Le fusil de Chasse, tirée du roman de Ya‐ sushi Inoué, avec la légende de la danse Mikhaïl Baryshni‐ kov. Un spectacle présenté au Baryshniko­v Arts Center, un tout petit théâtre.

De son côté, Yannick Né‐ zet-Séguin partage sa vie entre Montréal, Philadelph­ie et New York. Je pense que je deviendrai­s un peu fou si je restais à New York 365 jours par année. Mais en même temps, c'est sûr que ça me sti‐ mule énormément, expliquet-il.

Je sens qu’ici, pour em‐ ployer une expression an‐ glaise, il faut être at the top of our game. Il faut être au meilleur de notre force, de nos capacités pour survivre ici. C’est sûr que ça me pousse à me développer en tant qu'artiste.

Malgré leur horaire de tra‐ vail wagnérien, François Gi‐ rard, 60 ans, et Yannick NézetSégui­n, 47 ans, mordent à pleines dents dans la Grosse Pomme. Leur Lohengrin ver‐ sion 2023 est présenté à New York jusqu’en avril, et une cap‐ tation du concert sera présen‐ tée dans certains cinémas ca‐ nadiens dès le 18 mars.

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