Ingérence étrangère : le comité parlementaire réclame une enquête publique et indépendante
Le comité parlementaire sur les allégations d'ingé‐ rence étrangère dans les élections fédérales deman‐ dera aux élus de lancer une enquête publique na‐ tionale et que la personne à la tête de celle-ci soit nommée par tous les par‐ tis.
L'ensemble des partis d'opposition se sont unis jeu‐ di pour faire adopter une mo‐ tion en ce sens. Les députés li‐ béraux ont voté contre.
Le comité n'a toutefois pas le pouvoir de commander une commission d'enquête ni de contraindre le gouverne‐ ment de Justin Trudeau à le faire. Le sort de celle-ci repose désormais entre les mains des députés.
Jusqu’à présent, le premier ministre n'a pas fermé la porte à déclencher une telle enquête, mais il a souligné que les mécanismes en place sont déjà publics.
Néanmoins, il a affirmé mercredi être toujours ouvert à en faire plus pour rassurer les Canadiens et que les insti‐ tutions sont robustes et ou‐ tillées pour contrer l'ingé‐ rence étrangère.
La Gendarmerie royale du Canada (GRC), la commissaire aux élections fédérales et le Service canadien du rensei‐ gnement de sécurité (SCRS), entre autres, se sont succédé devant le comité jeudi pour y témoigner.
La GRC dit ne pas avoir les preuves nécessaires pour lan‐ cer une enquête criminelle, selon son sous-commissaire, Michael Duheme.
Pour sa part, le ministre fé‐ déral de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a expliqué que l’ingérence étrangère vise à saper la confiance des ci‐ toyens dans leurs institutions, c’est pourquoi le Service cana‐ dien du renseignement de sé‐ curité témoigne devant un co‐ mité parlementaire.
Nous cherchons aussi à bonifier notre boîte à outils, par exemple, en créant un re‐ gistre des agents étrangers.
Marco Mendicino, ministre de la Sécurité publique
Le comité parlementaire étudie les allégations d'ingé‐ rence étrangère dans les élec‐ tions de 2019 et 2021, à la suite d'une série de repor‐ tages du réseau Global et du quotidien The Globe and Mail, citant des sources ano‐ nymes, qui ont détaillé des tentatives d'ingérence orches‐ trées par la Chine au cours des deux dernières cam‐ pagnes électorales fédérales.
À cet égard, le sous-mi‐ nistre délégué des Affaires étrangères, Davis Morrison a mis en doute ces allégations. Je dirais que ces reportages reposent sur des rumeurs, se‐ lon M. Morrison.
Une enquête ment nécessaire absolu‐
Le leader parlementaire néo-démocrate Peter Julian a défendu jeudi l'idée d'une en‐ quête publique pendant qu'il débattait de sa motion récla‐ mant une telle commission.
Les allégations pourraient possiblement impliquer une violation de la Loi électorale du Canada. Ce sont des allé‐ gations très sérieuses, a-t-il fait valoir.
Le député conservateur Luc Berthold a cité des ques‐ tions qui pourraient, selon lui, être éclaircies par une en‐ quête.
Qu'est-ce que le premier ministre Justin Trudeau sa‐ vait? Quand le premier [mi‐ nistre] a-t-il appris [qu'il y avait eu ingérence étrangère]? Qu'est-ce que le premier mi‐ nistre Justin Trudeau a fait? Ou plutôt qu'est-ce qu'il n'a pas fait quand il a eu connais‐ sance des nombreuses alléga‐ tions d'ingérence du régime de Pékin dans le processus démocratique au Canada?, at-il énuméré.
La bloquiste Christine Nor‐ mandin a pour sa part obtenu que le commissaire qui prési‐ derait une éventuelle enquête soit nommé au terme d'une entente entre les partis.
Si on veut rétablir la confiance des électeurs dans leurs institutions démocra‐ tiques, s'assurer dès le départ que la personne qui mènera l'enquête ait une forme de crédibilité, c'est absolument nécessaire, a-t-elle soutenu.
Une portée élargie
Tandis que le Parti conser‐ vateur du Canada demandait une enquête ciblée et focali‐ sée sur l'ingérence alléguée de Pékin, par souci d'efficacité et afin de fournir des réponses avant les prochaines élec‐ tions, le Bloc québécois et le
Nouveau Parti démocratique (NPD) ont insisté pour que l'enquête ait un mandat élar‐ gi.
Avec une plus grande lati‐ tude, le commissaire désigné pourrait se pencher non seulement sur les allégations visant Pékin, mais aussi sur des préoccupations concer‐ nant des interventions de la Russie et de l’Iran, ont fait va‐ loir le Bloc et le NPD.
J’aimerais rappeler aux membres du comité les té‐ moignages qu’on a entendus : "les opérations russes sont persistantes et continues", a souligné le député néo-démo‐ crate Peter Julian.
La commissaire élections fédérales quête sur des plaintes aux en‐
Jeudi matin, le bureau de la Commissaire aux élections fé‐ dérales a affirmé être en train d'étudier trois plaintes reçues au cours des dernières se‐ maines au sujet d'allégations d'ingérence étrangère.
Cette analyse est en cours au moment où je vous parle, a indiqué jeudi la commissaire Caroline Simard, invitée à té‐ moigner à nouveau devant le Comité permanent de la pro‐ cédure et des affaires de la Chambre des communes.
La commissaire a répété que l'exercice mené par son bureau était impartial et indé‐ pendant du gouvernement au pouvoir.
Je suis consciente du be‐ soin de rassurer les Canadiens dans les circonstances excep‐ tionnelles actuelles.
Caroline Simard, commis‐ saire aux élections fédérales
Questionnée sur la portée de ses pouvoirs en tant que commissaire, Mme Simard a évoqué des améliorations qui pourraient être apportées à ce chapitre. Ce qui manque [...] ce sont les pouvoirs de préservation de la preuve, de communication, de contraindre des témoins à té‐ moigner, de contrainte à pro‐ duire des documents, a-t-elle énuméré.
La commissaire a égale‐ ment mentionné que les sanctions pécuniaires prévues étaient plafonnées à des montants nettement insuffi‐ sants.
Pas de pouvoir sur les derniers résultats électo‐ raux
Elle a par ailleurs précisé que le but de l'analyse des plaintes reçues à son bureau était de déterminer si les allé‐ gations sont fondées en vertu de la Loi électorale du Cana‐ da. Elle a signalé que cela ne lui permettait toutefois pas de trancher sur la validité de résultats électoraux.
Témoignant aux côtés de Mme Simard, le directeur gé‐ néral d’Élections Canada, Sté‐ phane Perrault, a mentionné que les questions soulevées dans un récent reportage du Globe and Mail étaient extrê‐ mement préoccupantes pour notre démocratie et notre souveraineté.
Il a toutefois affirmé qu'il n'était pas en mesure de s'avancer sur l'exactitude de l'article, puisque les informa‐ tions rapportées ne lui avaient pas été communi‐ quées. Il a néanmoins invité les députés à considérer le re‐ portage avec une certaine prudence.
Le chef du SCRS, David Vi‐ gneault, a aussi répondu aux questions des élus, bien qu'il ait dû souligner à plusieurs re‐ prises qu'il ne pouvait révéler des informations sensibles même si celles-ci peuvent avoir été ébruitées dans les médias.
Ce dernier a souligné que