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Devenir cadre supérieur dans la fonction publique demeure un défi pour les femmes noires

- Valérie-Micaela Bain

La nomination de la pre‐ mière femme noire au poste de sous-ministre de la Justice et sous-procu‐ reure générale du Canada met en lumière le fait que les femmes noires sont peu nombreuses à accéder à des postes dans la haute fonction publique.

Le 10 février est une date que Shalene Curtis-Micallef ne risque pas d’oublier de sitôt. Après une carrière de près de 25 ans comme avocate au mi‐ nistère de la Justice, le premier ministre Justin Trudeau l’a nommée sous-ministre de la Justice et sous-procureure gé‐ nérale du Canada. J’étais com‐ plètement émue, dit-elle, c’était tout un honneur d’être nommée à ce poste-là.

En devenant la numéro deux du ministère de la Jus‐ tice du Canada, Shalene Cur‐ tis-Micallef a écrit une page d’histoire: elle est la première femme noire à accéder à ce poste. Je prends cette respon‐ sabilité comme un privilège, confie-t-elle.

Une autre femme noire a récemment marqué l’histoire au Canada en devenant cheffe de cabinet adjointe du premier ministre Justin Tru‐ deau. Marjorie Michel n'avait pas imaginé qu’elle occuperait un jour cet emploi.

C’est sûr que c’est un poste évidemment surtout dans le regard des autres [qui leur fait dire] : "Oh, mon Dieu, tu es ar‐ rivée là". Oui, c’est vrai, mais c’est d’abord un poste de ser‐ vice qui vient avec beaucoup de responsabi­lités, explique-telle.

Tracer son chemin en dépit des obstacles

En pensant à tout ce qu’elles souhaitent accomplir, pour créer entre autres des environnem­ents de travail in‐ clusifs pour tous, Shalene Cur‐ tis-Micallef et Marjorie Michel n'oublient pas pour autant le chemin parcouru. Elles ont à certaines occasions vécu du racisme et de la discrimina‐ tion.

La sous-procureure géné‐ rale du Canada explique que lorsqu’elle a été embauchée comme avocate stagiaire dans la fonction publique du‐ rant les années 1990, le minis‐ tère de la Justice était un mi‐ lieu de travail différent. Marjo‐ rie Michel qui évolue en poli‐ tique depuis le début des an‐ nées 2000 parle d’incidents subtils. Toutes les deux ont choisi d’avancer malgré tout.

J’ai commencé la vie avec une mère immigrante rési‐ liente, incroyable, qui a tra‐ vaillé fort et qui m’a instauré une confiance en moi, ex‐ plique Shalene Curtis-Micallef. Pour moi c’est vraiment de faire de mon mieux [...] je re‐ connais lorsque les systèmes ne sont pas justes, mais j’ancre ma personnali­té, ma confiance dans ce que je suis capable de faire.

J’ai eu la chance d’avoir été construite avec beaucoup de confiance en ce que je suis et de ne jamais laisser les autres me définir.

Marjorie Michel, cheffe de cabinet adjointe, du premier ministre Justin Trudeau

Une demande d’action collective devant les tribu‐ naux

Si ces deux femmes ont réussi à progresser en dépit des obstacles, un groupe al‐ lègue que des milliers de Noirs, particuliè­rement des femmes, ont vu leur progres‐ sion bloquée dans la fonction publique au cours des 50 der‐ nières années en raison du ra‐ cisme systémique et de la dis‐ criminatio­n.

Selon les données compi‐ lées par le groupe Recours Collectif Noir, sur les 6717 cadres supérieurs dans la fonction publique, 150 sont noirs; hommes et femmes confondus. C’est moins de 2 % des effectifs.

En décembre 2020, les plai‐ gnants ont déposé une de‐ mande d’action collective en Cour fédérale au nom de ces employés fédéraux.

Sans commenter le dos‐ sier, puisqu’il est devant les tribunaux, la sous-ministre re‐ connaît qu’il y a du travail à faire et qu’il a été entamé.

Marjorie Michel constate tout de même qu’il y a eu du progrès parmi le personnel politique depuis qu’elle a commencé à travailler sur la Colline parlementa­ire en 2016. On est au-dessus d’une qua‐ rantaine [d’employés noirs], on n’était pas cinq quand je suis arrivée, explique-t-elle.

Ouvrir des portes pour les génération­s à venir

Créer des milieux de travail inclusifs est l’affaire de tous,

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