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L’Ontario approuve assez de logements, mais la constructi­on traîne, selon un rapport

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L’Ontario a déjà plus de 1,25 million de logements prêts à construire, sur le papier. Pour plusieurs experts en planificat­ion urbaine, le problème réside davantage dans la manière où la pro‐ vince pourrait pousser les promoteurs à démarrer plus rapidement les tra‐ vaux.

Selon un nouveau rapport des Commissair­es de la plani‐ fication régionale de l’Ontario (RPCO) sur l’état de disponibi‐ lité des logements, la province a déjà en route de quoi amé‐ liorer la pénurie.

Une fois que les projets de constructi­on ont été approu‐ vés par les municipali­tés, il n’existe pas d’obligation d'échéancier pour construire lesdits logements.

Le RPCO indique que ses calculs se basent sur des chiffres de l’an dernier, avant que le premier ministre Doug Ford ne passe le projet de loi controvers­ée 23, visant à ac‐ célérer la constructi­on de plus de logements.

Ce projet vise à créer 1,5 million de nouveaux loge‐ ments dans la prochaine dé‐ cennie. Ce chiffre ne prend pas en compte les logements déjà approuvés.

Selon les planificat­eurs, si la province arrivait à pousser les promoteurs à démarrer les travaux déjà approuvés, elle remplirait déjà 85 % de son objectif.

Je pense que [le rapport] montre que le défi du loge‐ ment n’est pas vraiment une question de terrains dispo‐ nibles ou un problème d'ap‐ probation des permis de construire, explique le pré‐ sident de RPCO, Thom Hunt.

Une extension dans la Ceinture de verdure peut-être pas nécessaire

Parmi les points de contro‐ verse dans le projet de loi 23, il y a le projet de récupérer des terrains dans la Ceinture de verdure pour créer 50 000 logements.

Pourtant, selon les chiffres du RPCO, Thom Hunt estime que le gouverneme­nt n’a pas besoin dans les faits de recou‐ rir à une telle mesure pour ré‐ pondre aux besoins.

Il n’est pas nécessaire de faire une expansion des li‐ mites des frontières urbaines dans la plupart des cas, et il n’est certaineme­nt pas néces‐ saire d’aller dans la Ceinture de verdure, explique-t-il.

Il ajoute que les chiffres suggèrent que le gouverne‐ ment devra faire des efforts pour s’assurer que des loge‐ ments abordables soient bâ‐ tis parmi ces projets déjà en cours. Il estime que des parte‐ nariats seront nécessaire­s en ce sens entre les gouverne‐ ments provincial et fédéral, les acteurs à but non lucratif et le secteur privé.

Les autorisati­ons ne font pas tout

Le conseiller municipal de Toronto Brad Bradford nuance quant à lui la situa‐ tion. Il estime que les chiffres du rapport ne sauraient conclure que le problème est réglé.

Il explique que faire construire les logements n’est pas chose aisée.

Je pense que le circuit de développem­ent est souvent mis à mal par des gens qui ne veulent pas voir plus de constructi­ons. On fait face à un important vent contraire dans notre effort de fournir davantage de logements, ditil.

Cela inclut la hausse des taux d’intérêt, qui rend la constructi­on plus chère pour les promoteurs, l’inflation qui augmente la pression sur les matériaux et la manque conti‐ nue de main-d’oeuvre, indique Brad Bradford.

On ne peut pas rester sur nos lauriers avec les permis. Cela va demander tout un gouverneme­nt et une colla‐ boration avec l’industrie, pré‐ cise celui qui est aussi pré‐ sident du Comité de planifica‐ tion et de logement de la To‐ ronto et ancien planificat­eur urbain.

Le chef de la planificat­ion de la Ville Reine, Gregg Lin‐ tern, a déjà indiqué qu’une moyenne de plus de 29 700 logements résidentie­ls a été approuvée par an de 2017 à 2021. Durant la même période, seulement près de 16 000 ont été construits chaque année.

Bien que la Ville approuve deux fois plus de logements que ceux qui sont construits, il est important de permettre un large éventail de loge‐ ments pour remplir différents besoins, et de travailler à améliorer la durée des consul‐ tations et de réduire le temps pour les autorisati­ons, affirme Brad Bradford.

Une incompréhe­nsion autour du processus d’ap‐ probation des permis

Matti Siemiatyck­i est le di‐ recteur de l’Institu d’infra‐ structure à l’Université de To‐ ronto. Il explique que les chiffres du RPCO montrent qu’il existe des idées fausses autour du processus d’appro‐ bation de permis.

Si les permis peuvent par‐ fois prendre du temps à être acceptés, il estime également qu’il existe certaines forces sur le marché qui tend à retar‐ der les constructi­ons.

On sait aussi que certains logements approuvés ne sont pas construits. Je pense qu’on a besoin de plus d’enquêtes sur pourquoi cela se produit.

Matti Siemiatyck­i, direc‐ teur de l’Institu d’infrastruc‐ ture à l’Université de Toronto

Parmi les pistes d’explica‐ tion, il évoque le fait que les promoteurs sont sensibles aux forces sur le marché et aussi inquiets quant au rejet communauta­ire sur certains projets. Parfois, les promo‐ teurs font aussi face à des changement­s de direction en interne qui peuvent faire dé‐ railler des projets pourtant approuvés.

Il reconnaît dans le même temps que les municipali­tés n’ont pas d’autre choix que de répondre à la pression pour accélérer le processus de pla‐ nification.

Au bout du compte, on a besoin de plus d’espaces où les gens peuvent vivre. Si le système est bloqué avec des projets qui ne sont pas construits et qu’il existe de fa‐ çons de réduire ce problème, c’est important de le faire, es‐ time Matti Siemiatyck­i.

Une porte-parole pour le ministère des Affaires munici‐ pales explique de son côté que le gouverneme­nt ne peut pas rester les bras croisés alors que le coût du logement ne cesse de grimper. Même si tous les logements recensés dans le rapport sont construits, la province a tout de même besoin de centaines de millions d’autres pour rem‐ plir son objectif, explique le communiqué.

Selon cette porte-parole, la loi 23 a déjà permis d'accélé‐ rer le processus d’attributio­n des permis et de construc‐ tion.

D’après les informatio­ns de Shawn Jeffords

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