Climat toxique à l’OIF selon un sondage interne
Les chiffres sont trou‐ blants : 44 % des répon‐ dants pensent avoir été victimes de harcèlement moral au travail, et 9 % de harcèlement sexuel.
En outre, 46 % affirment n’avoir pas été en mesure d’en parler ou de le signaler, et 75 % de ceux qui l’ont fait pensent que cela n’a pas abouti ou ne savent pas si ce‐ la a abouti à une solution.
Selon le document, la consultation vise à préparer la mise en oeuvre de politiques en matière de fraude, de ca‐ deaux et de harcèlement au travail. L’objectif de cet exer‐ cice est de permettre au comi‐ té du personnel de mieux comprendre votre connais‐ sance, vos perceptions et vos attentes dans ces domaines, en particulier sur le harcèle‐ ment moral et/ou sexuel, peut-on y lire.
Mais il y a du pain sur la planche, parce que 92 % des employés ne connaissent pas la procédure à suivre en cas de harcèlement moral ou sexuel au sein de l’OIF. Plus généralement, 43 % des em‐ ployés admettent ne pas sa‐ voir que l'OIF dispose d’un Code de conduite et d’éthique ou pensent qu’il n’en existe pas. 67 % ne l’ont pas lu.
Plusieurs obstacles appa‐ raissent lorsque vient le mo‐ ment de signaler une situa‐ tion, indiquent les réponses au sondage. D'abord, la peur d’une incidence négative sur sa carrière, à 78 %. Puis, le sentiment que personne ne va faire quoi que ce soit pour aider, à 65 %.
L’enquête est très contem‐ poraine : elle a été réalisée en décembre et janvier derniers. Il s’agit donc d’un portrait du climat qui règne actuellement à l'OIF, quelques mois après le renouvellement du mandat de la secrétaire générale Louise Mushikiwabo, lors du Sommet de la Francophonie à Djerba, en Tunisie.
207 répondants, majoritai‐ rement des femmes, ont rem‐ pli le questionnaire. Sur son site web, l'OIF indique que plus de 300 employés [tra‐ vaillent] à pied d’oeuvre au siège, à Paris, ou dans les re‐ présentations extérieures. C’est dire que plus des deux tiers du personnel ont répon‐ du aux questions. Ces résul‐ tats ont été transmis aux équipes au cours des derniers jours.
Le Canada préoccupé
Hautement
préoccupée par le portrait qui se dégage de cette consultation, la mi‐ nistre des Affaires étrangères Mélanie Joly a écrit à la secré‐ taire générale.
Selon nos informations, la lettre mentionne que le Cana‐ da a une tolérance zéro par rapport à tout cas de harcèle‐ ment, qu’il soit psycholo‐ gique, physique, sexuel ou autre. Il revient aux plus hautes instances de l’OIF de prendre des mesures rapides et concrètes face à ces résul‐ tats préoccupants.
Contacté pour confirmer ces informations, le bureau de la ministre ne nie pas l'exis‐ tence de la correspondance et répète qu’il a une tolérance zéro en matière de harcèle‐ ment, y compris au sein des organisations internationales.
Des propos de la secré‐ taire générale qui dé‐ rangent
Selon nos informations, le Canada avait d’abord évoqué cette consultation lors d’une réunion du Conseil perma‐ nent de la Francophonie (CPF) mardi, où sont représentés les membres de l'OIF, dont le Québec et le Canada, une réunion qui avait lieu à huis clos. Le Canada voulait que soit convoquée une nouvelle réunion durant laquelle la prévention et la lutte contre toute forme de harcèlement seraient à l’ordre du jour.
La réaction de la secrétaire générale n'a pas rassuré l'as‐ semblée, selon nos sources. Non seulement elle s’est dite étonnée qu’un sondage in‐ terne mené récemment soit diffusé auprès d’un membre sans qu’elle en soit informée au préalable, mais elle a indi‐ qué, devant tous les membres, qu’elle présumait que le geste venait de l’admi‐ nistrateur sortant.
Comme le révélait Enquête le mois passé, Geoffroi Mont‐ petit s’est fait remercier pour ses services à titre d’adminis‐ trateur. Il occupait les fonc‐ tions de numéro deux de l’or‐ ganisation, après la secrétaire générale. Après le départ de Catherine Cano avant la fin de son mandat, il est le deuxième administrateur ca‐ nadien à avoir dû quitter l'OIF en un peu plus de deux ans, un départ surprise qui a sou‐ levé des questions à Ottawa et à Québec.
L’OIF a nié qu’une polé‐ mique, une dissension ou un conflit interne soit à l’origine du départ de Geoffroi Mont‐ petit.
Mardi, le CPF a entériné la nomination de Caroline SaintHilaire, ancienne députée blo‐ quiste, ex-mairesse de Lon‐ gueuil et candidate défaite de la Coalition avenir Québec, comme administratrice. Celleci s’est d’ailleurs défendue d’être en poste grâce à une nomination partisane, ce que reprochent au gouvernement caquiste les partis d’opposi‐ tion à l’Assemblée nationale.
À Québec, questionnée mercredi sur le travail qui at‐ tendait Caroline Saint-Hilaire, la ministre des Relations inter‐ nationales et de la Franco‐ phonie, Martine Biron, a re‐ connu que la gestion de l’OIF doit être examinée de près.
Il y a du travail à faire à l’OIF, je concède qu’il y a eu des enjeux de gouvernance et de transparence, a-t-elle dit. Il y a un travail qui a déjà été fait dans les dernières années, et ce travail n’est pas terminé,