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Le CISSS-AT misera davantage sur l’autogestio­n des horaires dans les hôpitaux

- Jean-Marc Belzile

La mise en place de l’auto‐ gestion des horaires pour les infirmière­s à l’urgence et aux soins intensifs de l’Hôpital de Rouyn-Noran‐ da a eu des effets très posi‐ tifs. Le recours à la maind’oeuvre indépendan­te a été éliminé tout comme le temps supplément­aire obligatoir­e. Le Centre inté‐ gré de santé et de services sociaux de l’Abitibi-Témis‐ camingue (CISSS-AT) sou‐ haite maintenant le mettre en place dans tous ses établissem­ents.

Le principe de l’autoges‐ tion des horaires est relative‐ ment simple. Ce sont les em‐ ployés eux-mêmes qui déter‐ minent les quarts de travail qu’ils souhaitent combler.

Chaque employé doit faire ses heures et travailler une fin de semaine sur deux, mais pour le reste, ils ont la flexibili‐ té de travailler quand ils le souhaitent.

À l’urgence de Rouyn-No‐ randa et aux soins intensifs, l’initiative est venue de la chef de service

Sylvie Aumond qui est arri‐ vée en poste en juin 2020

C’était vraiment pas beau, beaucoup de main-d’oeuvre indépendan­te, du TSO [temps supplément­aire obligatoir­e], 25 % de temps supplémen‐ taires. Je me rappelle travailler de nuit et faire la chefferie de jour, deux mois après j’ai vou‐ lu lâcher, explique-t-elle.

Sylvie Aumond est finale‐ ment toujours en poste, mais il n’était pas question pour elle et son équipe de conti‐ nuer à travailler avec les mé‐ thodes convention­nelles.

Le principe de l’autoges‐ tion des horaires s’est instau‐ ré entre les infirmière­s qui n’y voyaient que du positif. Au‐ jourd’hui, les horaires sont connus près de 6 mois à l’avance.

Oui c’est un casse-tête, mais c’est un casse-tête qui en vaut la peine.

Sylvie Aumond

Sylvie Aumond admet qu’au départ, il s’agit d’un long travail, mais qu’une fois le processus bien implanté, tout est relativeme­nt simple.

Au final, pour vrai, tout le monde est content. Il n’y a ja‐ mais quelqu’un qui veut la même chose que l’autre, la réalité de chacun est vraiment différente, donc ça fonc‐ tionne, affirme-t-elle.

Un système qui a des bé‐ néfices

Selon le CISSS de l’AbitibiTém­iscamingue, le départe‐ ment est passé de neuf à zéro employé d’agences de maind’oeuvre indépendan­te. Le taux de temps supplémen‐ taire est passé de 25 % à 5 %. Le taux de roulement est pas‐ sé de 9 % à 1,8 % et tous les postes sont maintenant pour‐ vus. Les employés participen­t aussi à davantage de forma‐ tion.

Il nous manquait souvent une infirmière, on n'allait pas manger, on n’avait pas de pause, on était fatigué en arri‐ vant à la maison. Maintenant on a le ratio patient-infirmière parfait, explique Janie Bolduc, infirmière à l’urgence de

Rouyn-Noranda depuis 22 ans.

Les gens font toujours "Wow" en nous voyant! Ils disent : "Votre équipe est bien merveilleu­se". On est heureux d’être là. Moi, j’ai des ados qui vont dans des tournois spor‐ tifs ou s’il y a quoique ce soit, je vais la voir et je lui dis que je dois avoir un congé cette journée-là et il n’y a pas de problème, ajoute-t-elle.

Sentir qu’on a un peu de pouvoir sur la décision de notre horaire, sentir qu’on est écouté dans nos besoins, on dirait que l’esprit d’équipe est encore plus là, affirme l’infir‐ mière Marilie Hudon, qui était inquiète de revenir au travail à la suite de son congé de ma‐ ternité.

L’autogestio­n des horaires lui permet de travailler à temps plein malgré le fait que son conjoint a des horaires atypiques aussi.

Les deux infirmière­s uti‐ lisent le terme horaire de rêve pour décrire leur horaire des

derniers mois. Un sondage réalisé auprès des employés à l’interne arrive aussi à la conclusion que 98 % consi‐ dèrent que l’autogestio­n amé‐ liore leur bien-être au travail et 99 % considèren­t que la qualité des soins en est amé‐ liorée.

Tout le concept des listes de rappel, des horaires et de la façon de communique­r a été rangé aux oubliettes. La chef de service Sylvie Aumond utilise maintenant Facebook et Messenger notamment lorsque du temps supplémen‐ taire doit être offert.

C’est fou! En 5 minutes les trous sont comblés lorsqu’il y a un message sur notre groupe d’employés pour un quart manquant, explique l’in‐ firmière Marilie Hudon.

Exporter le projet à l’en‐ semble du CISSS-AT

Constatant tous les béné‐ fices, le CISSS de l’Abitibi-Té‐ miscamingu­e a commencé à implanter le concept dans plusieurs autres unités dans toutes les villes de la région. Un défi de taille que le CISSSAT souhaite avoir complété pour 2025.

On n’a pas une procédure, on n’a pas une formule. On a des valeurs, on a des prin‐ cipes, une ligne directrice. On a un cadre c’est certain, mais on demande aux équipes de décider ensemble qu’est-ce qui fait du sens pour leur équipe, qu’est-ce qui répond aux besoins de l’équipe? Qu’est-ce que l’équipe a envie de faire pour que ça fonc‐ tionne avec les gestion‐ naires?, explique Marie-Pier Gaulin, directrice adjointe du programme santé physique à Rouyn-Noranda.

Elle estime que le système ne sera pas identique partout, que les employés devront dé‐ cider entre eux.

C’est sûr que ça ne crée pas de nouvelles personnes, mais on espère que ça va en attirer. Et ce qu’on voit c’est que ça évite des départs.

Marie-Pier Gaulin

Je souhaite que ce que mes employés à moi vivent, que tout le monde le vive. On ne peut pas faire autrement en ce moment avec la pénurie de main-d’oeuvre partout. Pour être attirant, il faut trou‐ ver des moyens dans le sys‐ tème de santé pour améliorer les choses. Je pense qu’on a trouvé, conclue pour sa part, Sylvie Aumond.

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