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Villes cherchent désespérém­ent travailleu­rs essentiels

- Alexandra Duval

La pénurie de maind'oeuvre frappe fort dans l'arène municipale. Elle est même qualifiée de « géné‐ ralisée » par l'Union des municipali­tés du Québec (UMQ). Des centaines de postes devront être pour‐ vus sans quoi des services essentiels pourraient être menacés. Et pour trouver des solutions, l'UMQ va me‐ ner son enquête et une of‐ fensive de recrutemen­t.

À titre d'exemple : la MRC de Bellechass­e. La région compte 20 petites municipali‐ tés de 500 à 6000 habitants. Une vingtaine de postes sont à pourvoir. Des postes cru‐ ciaux comme ceux de direc‐ teur général à Saint-Philémon, de responsabl­e du traitement des eaux à Notre-Dame-Auxi‐ liatrice-de-Buckland, de jour‐ nalier aux travaux publics à Saint-Charles-de-Bellechass­e, ainsi que des opérateurs, des chauffeurs, etc.

La situation préoccupe la MRC, qui a créé une équipe de ressources humaines en 2021 pour aider les villes. Noémie Beaupré-Ruelland en est la di‐ rectrice.

C'est certain qu'une muni‐ cipalité sans directeur général ou sans secrétaire-trésorière adjointe peut se retrouver sous tutelle. Qui va payer les comptes? Qui va faire la comptabili­té, les paies ou la gestion de sécurité publique? demande Noémie BeaupréRue­lland.

Le partage comme solu‐ tion

Noémie Beaupré Ruelland a eu l'idée de jumeler les mu‐ nicipalité­s de Saint-Philémon et Notre-Dame-Auxiliatri­cede-Buckland, en collaborat­ion avec les deux maires, qui n'ar‐ rivent pas à pourvoir leurs postes vacants respectifs. Elles vont dorénavant parta‐ ger leurs ressources. La déci‐ sion a été entérinée lundi der‐ nier.

[Il y aura donc] un partage de ressources à la direction générale, une personne à la comptabili­té, une réception‐ niste. Il sera donc possible de fermer sur des heures de bu‐ reau spécifique­s dans l'une des municipali­tés pendant que l’autre est ouverte. Une semaine trois jours, une se‐ maine deux jours, par exemple.

Noémie Beaupré Ruelland, directrice des ressources hu‐ maines, MRC de Bellechass­e

Les deux villes espèrent obtenir une subvention de 250 000 $ sur cinq ans avec le programme de coopératio­n intermunic­ipale du ministère des Affaires municipale­s et de l'Habitation.

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Zéro soumission

À Boischatel, près de Qué‐ bec, la pénurie s’est traduite par l’absence de soumission pour le ramassage des ma‐ tières résiduelle­s à la fin de 2022. Matrec n’a pas re‐ nouvelé son contrat et la Ville a dû rapidement trouver une alternativ­e. On s’est dit qu’on pouvait le faire par nous même; on est jamais mieux servi que par soi-même, ra‐ conte le maire Benoît Bou‐ chard, bien conscient qu'il s'agit d'un service essentiel.

La municipali­té a donc dé‐ cidé de louer un camion, et un employé a été formé. Depuis lundi dernier, la Ville assure sa propre collecte des ordures. Il s'agit d’un projet pilote de deux ans. Une solution qui fait toutefois augmenter la facture de 75 000 $.

Lévis s’adapte aussi

Les difficulté­s de recrute‐ ment ne touchent pas que les plus petites municipali­tés. À Lévis, une trentaine de postes sont affichés : opérateurs, cols bleus, gestionnai­re, no‐ taire. La Ville doit pourvoir entre 400 et 450 postes par année.

C'est un peu plus difficile qu’avant. Ça nous prend plus de stratégies, explique Manon Gauvreau, directrice des res‐ sources humaines. Il y a quelques années, on avait l'embarras du choix. Mainte‐ nant, on est plus ouverts. Il faut se réinventer dans notre organisati­on du travail, par exemple, ou la façon de dis‐ penser les services.

Offensive de l'UMQ

L’UMQ est bien consciente du problème et a créé un nouveau comité marque em‐ ployeur. La mairesse de Gati‐ neau, France Bélisle, le pré‐ side.

Les besoins sont im‐ menses, donc les villes, comme l'ensemble des orga‐ nisations, vivent une pénurie de main-d'oeuvre généralisé­e. constate-t-elle.

Un sondage sera réalisé auprès des citoyens afin de mesurer leurs connaissan­ces des possibilit­és de carrières offertes dans les villes. L'UMQ veut aussi mesurer la percep‐ tion envers les employés mu‐ nicipaux.

Je ne suis pas certaine que les citoyens sont au courant que les villes offrent une grande variété d'emplois.

L'UMQ consultera aussi les villes pour connaître leurs be‐ soins. France Belisle croit qu’elles doivent amorcer une réflexion afin d'être attrac‐ tives.

Les villes qui sortiront ga‐ gnantes sont celles qui seront rapidement capables de se re‐ mettre en question et de faire preuve de beaucoup d'agilité aussi pour s'adapter à la réali‐ té du travail.

Si on veut être à la mode sur le marché du travail, il faut être capable de se remettre en question. [...] On ne peut plus regarder le train passer, il faut sauter dans le train en marche, si on veut être ca‐ pable de renverser la vapeur.

France Bélisle, mairesse de Gatineau

Les résultats mèneront à une vaste campagne de valo‐

risation et de recrutemen­t à la fin de l'année 2023.

Parce qu'au final, si on ne recrute pas dans nos villes, c'est le service aux citoyens qui est affecté et c'est ce qu'on doit éviter et ça nous prend une stratégie.

Le manque d’effectifs frappe aussi Gatineau. La Ville emploie 4000 travailleu­rs, une quarantain­e de postes sont affichés chaque semaine.

C'est vraiment beaucoup, dit la mairesse.

Sur le site Québec munici‐ pal, plus de 700 emplois sont affichés partout dans la pro‐ vince.

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