Rencontre du G7 des ministres du climat au Japon, Guilbeault « veut voir de l’ambition »
Du 15 au 16 avril, les mi‐ nistres du Climat et de l'Énergie se réuniront à Sapporo, au Japon. Ce sera la première rencontre in‐ ternationale post-COP15. Énergie, lutte contre les changements climatiques et protection de la nature seront au coeur des discus‐ sions de ce sommet. Cette rencontre devrait égale‐ ment donner le ton pour le reste des grands rendezvous de l'année, entre autres le G20 et la COP28.
C’est une chose d’avoir des objectifs, mais il faut être ca‐ pable de les mettre en oeuvre. Et je pense que cette ren‐ contre-là va être l’occasion de pouvoir échanger sur nos meilleures pratiques, d’ap‐ prendre et d'avancer.
Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement climatique du Canada
Le ministre canadien part en Asie convaincu de s’en‐ tendre sur un communiqué fi‐ nal avec les six autres mi‐ nistres du G7 et d’envoyer un message clair au reste du monde. Moi, je veux voir de l’ambition! lance le ministre Steven Guilbeault à la veille de son départ pour le Japon.
Selon lui, il sera surtout question d’investissements substantiels dans les techno‐ logies propres, les énergies re‐ nouvelables et le transport collectif.
Mais déjà, le bruit court que les discussions pour‐ raient être ardues. D’un côté, les États-Unis tenteraient d’af‐ faiblir l’engagement du G7 de l’an dernier concernant la sup‐ pression progressive des sub‐ ventions aux énergies fossiles d’ici 2025. Alors que l’Alle‐ magne et le Canada poussent dans l’autre sens.
Le Canada s’est d’ailleurs engagé à éliminer toutes sub‐ ventions inefficaces au sec‐ teur des énergies fossiles d’ici la fin de 2023. Le ministre Guilbeault affirme que le Ca‐ nada fait mieux que ses ho‐ mologues du G7 sur cette question.
Cinquante nuances de vert
L’autre défi : trouver un terrain d’entente avec le Japon qui assure la présidence du G7 et qui tente de mettre de l’avant son plan vert, le plan GX. Un plan assorti d’une en‐ veloppe de plus de 1000 mil‐ liards de dollars américains de fonds publics et privés dédiés, entre autres, à assurer sa sé‐ curité énergétique intérieure.
Un plan aux cinquante nuances de vert qui fait l’objet de critiques acerbes de la part de plusieurs environnementa‐ listes et experts. On lui re‐ proche notamment de faire la promotion de solutions qui utilisent des combustibles fossiles, comme le gaz naturel liquéfié, la production d’hy‐ drogène et la combustion d'ammoniac dans les cen‐ trales électriques au charbon.
Le Japon ne se soucie pas de l’urgence climatique. Sa priorité pour le G7 est moti‐ vée par ses propres intérêts. Le Japon veut inclure dans le texte le plan GX pour pouvoir en faire la promotion à l’exté‐ rieur du Japon. Il est impor‐ tant que les autres pays du G7 s’unissent et repoussent cette tentative.
Kimiko Hirata, directrice exécutive et fondatrice de Cli‐ mate Integrate
De leur côté, les pays de l’Union européenne, dont les coeurs battent maintenant à l'unisson concernant le sou‐ hait du retrait des énergies fossiles, pourraient mettre de la pression pour que les pays du G7 l'inscrivent dans un texte final. Selon nos informa‐ tions, le Canada ne devrait pas s’y opposer.
Rappelons qu’après plu‐ sieurs jours de tergiversations sur la question lors de la der‐ nière COP sur le climat à Charm el-Cheikh, en Égypte, le Canada a finalement confir‐ mé, à la toute fin de la confé‐ rence, qu’il ne se serait pas opposé à un texte final qui mentionne le retrait graduel des énergies fossiles.
Cette rencontre du G7 est particulièrement importante, selon Kimiko Hirata, directrice exécutive et fondatrice de Cli‐ mate Integrate. C’est la pre‐ mière rencontre depuis la pu‐ blication du rapport de syn‐ thèse du GIEC qui est très alarmant, et les pays membres du G7 doivent se positionner sur le retrait des énergies fossiles pour donner le ton et montrer l'exemple, affirme-t-elle.
Capture et stockage du carbone
À ce sommet, les pays ten‐ teront aussi de s’entendre sur le rôle de la capture et du sto‐ ckage du carbone comme ou‐ til de décarbonation. Certains souhaitent que l’on recon‐ naisse avant tout que la prio‐ rité doit être la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Selon des experts, le Ca‐ nada serait opposé à un lan‐ gage qui parlerait des risques liés à ces technologies.
D’ailleurs, dans le dernier budget fédéral, d’importantes sommes ont été allouées au déploiement de ces technolo‐ gies. Marc-André Viau d’Équi‐ terre rappelle que le GIEC parle de la capture et du sto‐ ckage de carbone comme so‐ lution de dernier recours pour atteindre la carboneutralité et non pas comme une solution miracle au même titre que celles qui ont fait leurs preuves.
Et il croit qu’il est temps de mettre nos ressources sur les secteurs d'avenir et de plani‐ fier une transition juste hors des énergies fossiles qui n'en font certes pas partie.
Le Canada a l'occasion de tirer le G7 vers le haut plutôt que vers le bas en matière de transition énergétique. Il est impératif d'accélérer la transi‐ tion vers les énergies renou‐ velables de façon à être moins dépendant de la géopolitique du pétrole et des consé‐ quences économiques qui s'y rattachent.
Marc-André Viau, Équiterre Malgré ces divergences d’opinions, le ministre Steven Guilbeault reste convaincu que ses partenaires et lui trouveront un terrain d’en‐ tente pour faire front com‐ mun en vue de la prochaine COP sur le climat qui se dé‐ roulera en décembre aux Émi‐ rats arabes unis.
Le leadership du G7 est es‐ sentiel, selon Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie chez Green‐ peace. Selon lui, le G7 doit dé‐ finir une voie permettant d’éliminer progressivement tous les combustibles fossiles et de maintenir l’objectif de 1,5 degré Celsius à portée de main lors de la COP28 qui se tiendra à Dubaï décembre.
Nous avons besoin d'un engagement pour une élimi‐ nation progressive, sans ré‐ serve, équitable et accélérée de tous les combustibles fos‐ siles – charbon, pétrole et gaz – et pas de nouveaux dé‐ veloppements.
Patrick Bonin, responsable