Des milliers de rendez-vous médicaux annulés sans prévenir chaque mois au Québec
Chaque mois, plusieurs mil‐ liers de patients ne se pré‐ sentent pas à un rendezvous chez leur médecin de famille, selon des données rendues publiques. Une si‐ tuation particulièrement problématique alors que 1,2 million de Québécois sont toujours sur les listes d’attente pour être pris en charge.
Entre avril 2021 et dé‐ cembre 2022, ces défections, communément appelées « no-shows », ont totalisé 177 593 rendez-vous annulés, selon les données colligées par le quotidien Le Soleil.
Et comme seulement le tiers des quelque 6000 méde‐ cins a comptabilisé ces ab‐ sences, la Fédération des mé‐ decins omnipraticiens du Québec estime qu’il ne s’agit que de la pointe de l'iceberg.
Au total, ce serait plus de 20 000 rendez-vous qui se‐ raient annulés mensuelle‐ ment.
Ce nombre pourrait-il s'ex‐ pliquer par les aléas liés à la
COVID-19? C’est une hypo‐ thèse intéressante, mais on constate que ce nombre aug‐ mente mois après mois, même si on s’éloigne de la pandémie, a souligné le Dr Marc-André Amyot, pré‐ sident de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) en entrevue à l’émission Tout un matin sur les ondes d’ICI Première.
Diagnostiquer causes du fléau les
En septembre 2022, la FMOQ a ainsi enregistré une hausse de 60 % des no-shows par rapport à la moyenne des 18 derniers mois. Le taux d'annulation aurait alors at‐ teint près de 3 %.
Un phénomène que le pré‐ sident de la fédération des médecins de famille qualifie de fléau et de problématique importante dans un contexte où il manque déjà plus de 1000 médecins de famille pour pouvoir satisfaire les 11 % de Québécois qui sont sur les liste d’attente, selon la Fédération.
Ces rendez-vous annulés à la dernière minute ne sont gé‐ néralement pas facturés aux patients fautifs et il serait diffi‐ cile pour un médecin de reti‐ rer un patient multirécidiviste qui ne se présente pas à son rendez-vous, mais le FMOQ ne compte pas rester les bras croisés.
On veut notamment arri‐ ver à savoir quel pourcentage de patients auraient pu aviser de leur absence, mais ne le font pas, et quel pourcentage est lié au système de rendezvous téléphonique qui n’est pas parfait pour les annula‐ tions.
Dr Marc-André Amyot, pré‐ sident de la FMOQ
La FMOQ espère d’ici quelques semaines être en mesure d’interroger un échantillon représentatif des patients ne s’étant pas pré‐ sentés à leur rendez-vous. Dans un contexte de pénurie et où l’accès à un médecin est difficile, c’est important que la population soit sensibilisée [aux no-shows], a conclu le Dr Amyot.
Les médecins spécia‐ listes « fortement préoccu‐ pés »
Du côté des médecins spé‐ cialistes, le problème semble similaire. Selon Charline Onillon conseillère aux af‐ faires publiques de la Fédéra‐ tion des médecins spécialistes du Québec, ces défections re‐ présentent environ 10 % des consultations, sans compter les chirurgies.
Interrogée par Radio-Ca‐ nada, la Fédération s’est dite fortement préoccupée par ce phénomène.
Les « no-shows » ont un impact sur la pratique de nos membres en plus d’allonger inutilement les listes d’at‐ tente. Un patient qui ne se présente pas à son rendezvous empêche un autre pa‐ tient d’être soigné à son tour, a affirmé Mme Onillon.
Selon elle, les médecins spécialistes souhaitent enga‐ ger des discussions avec les instances responsables pour développer un outil permet‐ tant la traçabilité de ces défec‐ tions afin de mieux documen‐ ter le phénomène et y ré‐ pondre efficacement.
Des solutions, notamment technologiques, peuvent être déployées afin d’atténuer ce phénomène, a ajouté Mme Onillon.
Avec les informations de Mathias Marchal
ces décisions, remarque le président de l'organisme, Fa‐ bien Hébert.
Il explique qu’il existait au‐ paravant des entités de plani‐ fication dans lesquelles des représentants francophones étaient inclus.
On veut regagner cette ca‐ pacité d’influencer le système. On a besoin de faire ça en amont, lorsqu’on est en train de préparer les nouveaux programmes, ajoute-t-il.
Établir des cibles pour la désignation
L’AFO insiste sur l’impor‐ tance d’utiliser le système de désignation mis en place dans la Loi sur les services en fran‐ çais.
On doit vraiment se baser sur cette désignation-là, comme pierre d'assise de l’ac‐ cès. Lorsqu’on a des établisse‐ ments qui sont désignés, ça vient avec des obligations. On sait qu’il va y avoir des ser‐ vices en français, étaie le pré‐ sident de l’AFO.
L’Assemblée recommande ainsi de désigner un fournis‐ seur de services de santé fran‐ cophone dans toutes les ré‐ gions désignées pour fournir des services en français.
Elle veut aussi que les four‐ nisseurs de services identifiés par la province se conforment au cahier des charges pour obtenir une désignation offi‐ cielle dans un délai de trois ans.
Collecter plus de don‐ nées linguistiques
L’AFO souhaite par ailleurs que la province collecte da‐ vantage les données relatives à la langue. Elle veut que le ministère oblige les fournis‐ seurs de service à collecter des données linguistiques.
La variable linguistique doit être intégrée à la carte de santé, plaide également l'or‐ ganisme.
Ultimement, les gens veulent se faire reconnaître pour ensuite se faire aiguiller vers les bons services
Fabien Hébert, président de l'Assemblée de la franco‐ phonie de l'Ontario
Clarifier l’organisation des entités administratives
L’AFO veut aussi que Santé Ontario se dote d’un poste de cadre responsable des ser‐ vices de santé en français avec des responsabilités transversales.
Plus généralement, elle souhaite une simplification et une clarification des respon‐ sabilités pour une meilleure imputabilité.
Il faudrait pour cela faire en sorte que les six entités de planification de services de santé en français corres‐ pondent à celles de Santé On‐ tario.
Pour l’heure, les entités francophones sont divisées selon une répartition qui n’existe plus pour les autres services.
Si Fabien Hébert reconnaît que ces questions auraient déjà dû être sur la table de‐ puis 2019, il souligne toutefois que les discussions actuelles avec la province vont dans le bon sens.
Il dit également avoir des arguments pour convaincre le gouvernement.
On sait que le gouverne‐ ment met l’accent sur les éco‐ nomies. On sait que si les soins sont adaptés linguisti‐ quement, ça résulte en une économie substantielle. Les interventions avec les clients deviennent de plus en plus ef‐ ficaces et on réduit les coûts, conclut-il.
Avec des informations de l’émission Sur le vif