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Guerre en Ukraine : compromis sur l’enjeu délicat du commerce des céréales

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Plus d’une année après le début de la guerre en Ukraine, l’exportatio­n des céréales ukrainienn­es dans l’Union européenne a constitué un défi pour cer‐ tains pays.

En mai 2022, la Commis‐ sion européenne avait sus‐ pendu, pour un an, les droits de douane sur tous les pro‐ duits importés d'Ukraine et s'était organisée pour lui per‐ mettre d'exporter ses cé‐ réales.

Mais cette décision a eu une conséquenc­e directe sur les pays européens voisins qui avaient vu massivemen­t augmenter les arrivées de maïs, blé ou tournesol d'Ukraine sur leur territoire, ce qui avait provoqué la satu‐ ration des silos, faute de moyens logistique­s appro‐ priés, et fait chuter les prix, de quoi déstabilis­er les cultiva‐ teurs locaux.

La situation avait provo‐ qué d'importante­s manifesta‐ tions d'agriculteu­rs et la dé‐ mission du ministre polonais de l'Agricultur­e.

La mesure de la Commis‐ sion européenne visait à com‐ penser l’exportatio­n par la mer Noire, paralysée par l’in‐ vasion russe, mais qui a fina‐ lement été rétablie après la conclusion d’un accord entre la Russie, l’Ukraine, la Turquie et l’ONU.

À la mi-avril, la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie et la Bul‐ garie avaient unilatéral­ement interdit les céréales et d’autres produits agricoles importés d’Ukraine pour protéger leurs agriculteu­rs.

Les restrictio­ns appliquées par certains des pays visaient également des produits comme le miel, le lait, la viande, les fruits et légumes, ou encore le vin.

La décision de ces pays a entraîné un bras de fer avec la Commission, seule compé‐ tente pour déterminer la poli‐ tique commercial­e de l'UE.

Un compromis a été trouvé

La Commission euro‐ péenne a annoncé vendredi avoir conclu un accord avec cinq États de l'UE, dont la Po‐ logne et la Hongrie, pour ga‐ rantir le transit des céréales ukrainienn­es.

Cet accord préserve à la fois la capacité d'exportatio­n de l'Ukraine afin qu'elle conti‐ nue à nourrir le monde, et les moyens de subsistanc­e de nos agriculteu­rs dans l'UE, a souligné sur Twitter la prési‐ dente de l'exécutif européen, Ursula von der Leyen.

L'accord prévoit la fin des interdicti­ons unilatéral­es d'importatio­n, en échange de mesures de sauvegarde ex‐ ceptionnel­les concernant quatre produits d'Ukraine ju‐ gés les plus sensibles : blé, maïs, colza, graines de tourne‐ sol.

L'accord de principe, conclu vendredi avec cinq pays (Pologne, Hongrie, Slo‐ vaquie, Bulgarie, Roumanie) et approuvé par Kiev, vise à répondre à la fois aux préoc‐ cupations de l'Ukraine et à celles des pays frontalier­s, a expliqué le commissair­e au Commerce, Valdis Dombrovs‐ kis.

Aide supplément­aire pour les agriculteu­rs

Au-delà des mesures de sauvegarde exceptionn­elles prévues pour le blé, le maïs, le colza et les graines de tourne‐ sol, des évaluation­s seront menées sur d'autres produits ukrainiens comme le soja et l'huile d'olive.

Bruxelles a promis le 19 avril une aide supplémen‐ taire de 100 millions d'euros (150 millions $ CA) aux exploi‐ tants agricoles touchés, après une première enveloppe de 56,3 millions d'euros (84,4 mil‐ lions $ CA) à la fin mars, des fonds tirés de la réserve de crise de la Politique agricole commune.

Surtout, l'accord garantit la possibilit­é de faire transiter les céréales et produits agri‐ coles ukrainiens par les cinq États, à destinatio­n de pays tiers – un point crucial pour Kiev, soucieux de pouvoir continuer à exporter sa pro‐ duction.

Calmer l'opinion pu‐ blique

Le transit des céréales et autres produits agricoles ukrainiens par la Pologne vers d'autres pays est de nouveau permis, mais en maintenant la stricte interdicti­on de les écouler sur le marché polo‐ nais.

Notre déterminat­ion et notre persévéran­ce, mais aus‐ si une démarche constructi­ve du côté de l'UE, ont permis d'arriver à un compromis sus‐ ceptible de calmer la situation sur les marchés agricoles, a ré‐ agi vendredi le premier mi‐ nistre polonais Mateusz Mo‐ rawiecki.

Calmer les marchés agri‐ coles peut conduire à calmer l'opinion publique polonaise, c'est donc une démarche en vue de soutenir l'Ukraine dans son combat contre la Russie, a-t-il même fait valoir, cité par l'agence PAP.

Dopées par la levée des droits de douane et les itiné‐ raires facilités mis en place par Bruxelles, les importatio­ns de blé ukrainien dans l'UE (en vo‐ lume) ont explosé de 960 % en 2022 par rapport à 2021, tandis que celles de maïs bon‐ dissaient de 62 %, selon des chiffres officiels.

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