«On doit s’adapter» : l’image de l'industrie minière complique le recrutement
Dans un contexte de pénu‐ rie de main-d'oeuvre, l'in‐ dustrie minière éprouve des difficultés à recruter de nouveaux travailleurs. Et malgré la promesse d'une bonne rémunéra‐ tion, bien des recrues po‐ tentielles maintiennent une image désuète de l'in‐ dustrie, selon plusieurs en‐ treprises qui s'affairent à changer la donne.
Les travaux de construc‐ tion de la mine d’or de Greenstone, dans le nordouest ontarien, vont bon train. L’entreprise Greenstone Gold Mines y emploie près de 200 travailleurs et compte bientôt accroître la maind'oeuvre.
Mais recruter s’avère com‐ pliqué, selon la directrice des ressources humaines MarieHélène Gélinas.
On n’est pas une industrie présentement qui attire beau‐ coup de jeunes, indique-t-elle.
Elle travaille pourtant à mettre en valeur les carrières à la minière auprès de tra‐ vailleurs potentiels, mais se bute souvent à l’image que plusieurs candidats s’en font.
Les gens ont une ancienne perception des mines [...] Si vous fermez les yeux, vous vous imaginez un petit pic, donc le côté technologique n’est pas très promu. Donc, c’est là qu’on s’en va dans le domaine minier.
Marie-Hélène Gélinas, di‐ rectrice des ressources hu‐ maines à Greenstone Gold Mines
Patrice Dubreuil, vice-pré‐ sident de l’entreprise Manitou Gold, qui est en phase d’ex‐ ploration, fait le même constat. Bien des recrues po‐ tentielles ignorent les progrès effectué en matière de santé et sécurité au travail dans les mines, estime-t-il.
Il y a beaucoup de techno‐ logie et de plus en plus, on [fait fonctionner] l'équipe‐ ment à distance, alors on peut opérer un camion ou une remorque dans un bu‐ reau.
Patrice Dubreuil, vice-pré‐ sident de l’engagement com‐ munautaire et avec les Pre‐ mières Nations à Manitou Gold
Plus qu’un bon salaire
Les entreprises doivent déployer de nombreux méca‐ nismes pour embaucher. Greenstone Gold Mines parti‐ cipe notamment à plusieurs foires d’emploi et maintient des contacts avec les établis‐ sements d’enseignement postsecondaires.
Mais la promesse d’une bonne rémunération ne suffit plus, à elle seule, à susciter l’attention des travailleurs, observe Marie-Hélène Géli‐ nas.
L’argent aide, mais ne fait pas le bonheur.
Marie-Hélène Gélinas, di‐ rectrice des ressources hu‐ maines à Greenstone Gold Mines
Quand ils négocient un contrat, ce ne sont pas des questions monétaires [qu’ils posent], ce sont plus des questions de conditions de travail.
Selon M. Dubreuil, cer‐ taines des conditions de tra‐ vail qui allaient de soi autre‐ fois sont un peu moins appré‐ ciées aujourd’hui.
Il n’est plus aussi facile, par exemple, de convaincre des gens de vivre dans des camps de travail plusieurs semaines à la fois, loin de leur famille.
La nouvelle génération n’[est] peut-être pas prête à faire ça, alors, c’est important que les mines rendent ces en‐ droits-là le plus plaisant pos‐ sible. [Il faut] valoriser ces gens-là et assurer leur sécuri‐ té et aussi qu’on prenne leur opinion sur comment on peut améliorer le milieu de travail.
Patrice Dubreuil, vice-pré‐ sident de l’engagement com‐ munautaire et avec les Pre‐ mières Nations à Manitou Gold
L’enjeu de la santé men‐ tale
La santé mentale est aussi devenue un aspect du travail dans les mines dont se préoc‐ cupent les étudiants pendant leur formation, note le coor‐ donnateur du programme de génie minier au Collège Bo‐ réal, Jeff Lafortune.
La santé mentale, le bien
être, c’est très, très important aujourd’hui. Ce ne sont pas que les salaires qui sont im‐ portants, c’est l’environne‐ ment où ils vont travailler, in‐ dique-t-il. Il ajoute que plu‐ sieurs entreprises minières tiennent désormais des groupes de discussion afin d’éviter l’isolement des tra‐ vailleurs.
L’enjeu est de taille, affirme M Dubreuil, dans la mesure où il y a beaucoup de choses qui se passent à l’extérieur du travail qui pèsent sur les gens, comme la hausse du coût de la vie.
C’est super important que l’employeur reconnaisse qu’au niveau du rendement, il faut comprendre nos employés et mettre en place des choses qui vont permettre qu’ils puissent aller chercher de l’aide ou même être capable de reconnaître qu’un tel em‐ ployé a peut-être besoin de soutien additionnel.
Ces considérations ont, à la longue, un impact positif sur la compétitivité des entre‐ prises, surtout dans un contexte de pénurie de maind’oeuvre où les diplômés sont souvent sollicités par de nom‐ breux employeurs à la fois.
Même son de cloche pour
Marie-Hélène Gélinas.
On doit s'adapter pour s'assurer qu'on comble tous les postes, parce que sans in‐ dividus, un camion, ça peut rester stationné et c'est défi‐ nitivement pas ce que l'on veut.