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Daddy Cool: le pari réussi de conjuguer maladie et bonheur

- Helen Faradji

Une famille dysfonctio­n‐ nelle, en proie à de sé‐ rieuses difficulté­s finan‐ cières, mais surtout beau‐ coup d'amour

« Mon père a été déclaré maniaco-dépressif en 1967. »

C’est sur cette révélation, dite en narration hors-champ par une fillette, que s’ouvre Daddy Cool, premier long mé‐ trage réalisé par Maya Forbes. C’est le genre d’entrée en ma‐ tière qui, chez d’autres, aurait promis drame terrible et pa‐ thos exagéré, mais qui, chez elle, va plutôt mettre la table pour un film étonnant, qui n’est ni un drame ni une co‐ médie, mais tout simplement un film humain.

Car dès cette déclaratio­n, livrée sur un fond d’images d’archives amusantes et une musique pimpante (qui colo‐ rera tout le récit), le ton du film est donné.

Ne pas s’appesantir sur le drame. Ne pas tirer les ficelles de l’émotion facile. Grâce lui soit rendue.

Car Dieu sait que vouloir aborder l’effet de la dépres‐ sion sur un patient, et surtout sur ceux qui l’entourent(en l’occurrence, la femme de cet homme et leurs deux filles) peut faire craindre le pire.

La bonne idée de Daddy Cool est efficace : tenter de re‐ trouver l’innocence jamais dupe d’un regard d’enfant et miser sur une approche d’une redoutable simplicité pour tout bêtement mieux com‐ prendre et montrer ce qui peut se jouer au coeur d’une famille fondamenta­lement ai‐ mante et dysfonctio­nnelle, en proie à de sérieuses difficulté­s financière­s au courant des an‐ nées 70.

Une situation qui forcera d’ailleurs la mère à partir étu‐ dier à New York et le père à accepter de s’occuper seul de ses filles durant ce temps, malgré la maladie.

Et si la bipolarité se re‐ trouve, bien sûr, au coeur de Daddy Cool, ce dernier a aussi la générosité d’enrichir son portrait de famille de di‐ mensions aussi communes que variées : pauvreté, diffi‐ culté des femmes à trouver des emplois, féminisme, pa‐ rentalité réinventée, couple mixte… Autant de sujets non pas traités sociologiq­uement, mais avec grande intelligen­ce et sans manichéism­e, et aussi avec un mélange magnifique‐ ment équilibré de fantaisie et de gravité, de réalisme et de poésie.

Comme dans la vie, le rire et les larmes cohabitent, par‐ fois dans la même séquence.

Direction photo lumi‐ neuse, tempo trouvé entre les phases maniaques hyperac‐ tives et les désillusio­ns plus tristes, voire désespérée­s, sin‐ cérité absolue du ton et des dialogues (la cinéaste ne s’en est jamais caché, c’est bien sa propre histoire qu’elle évoque dans ce film et c’est d’ailleurs sa propre fille qui interprète l’aînée), Mark Ruffalo (en papa en proie à mille et un tour‐ ments) et Zoe Saldana (en maman décidée à parler à ses filles comme à des adultes) tendres et charismati­ques, humour léger posé avec déli‐ catesse sur situations graves : les ingrédient­s choisis ne sont peut-être pas sophistiqu­és ni incroyable­ment recherchés.

Mais c’est exactement ce qui fait l’intérêt de Daddy Co‐ ol : son magnifique naturel, son optimisme jamais forcé et son honnêteté touchante, qui nous font bel et bien croire que oui, la maladie et le bon‐ heur ne sont pas nécessaire‐ ment incompatib­les.

Daddy Cool, sur ICI Tou.tv Extra

Attention, le film ne sera plus disponible après le 22 mai

La bande-annonce (source : YouTube):

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