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Violence dans les écoles : « un phénomène qui prend de l’ampleur », selon des syndicats

- Myriam Eddahia

La violence dans les écoles est à la hausse en Ontario, selon des travailleu­rs de l'éducation. Un nouveau sondage révèle que le per‐ sonnel des écoles élémen‐ taires est victime de plus de violence qu'auparavant.

C'est un phénomène qui prend de l'ampleur et qui est problémati­que parce que c'est devenu de plus en plus commun malheureus­ement, explique la présidente de l’As‐ sociation des enseignant­es et des enseignant­s franco-onta‐ riens (AEFO).

Même si l'AEFO n'a pas, elle-même, de données statis‐ tiques qui soutiennen­t ces observatio­ns, Anne Vinet-Roy affirme que ses membres vivent des situations très très semblables à celles qui sont mises en relief dans un son‐ dage de la Fédération des en‐ seignantes et des enseignant­s de l'élémentair­e de l'Ontario.

C'est un phénomène qui, depuis plusieurs années, touche nos écoles qu'elles soient francophon­es ou an‐ glophones, souligne-t-elle.

La FEEO a demandé à la firme Strategic Communica‐ tions de mener un sondage auprès de ses 83 000 membres sur leurs ex‐ périences liées à la violence au travail.

L'étude, publiée lundi, in‐ dique que la majorité des 24 872 répondants ont obser‐ vé une augmentati­on de la fréquence et de la gravité des cas violents au cours de l'an‐ née scolaire 2022-2023.

Ce syndicat représente des enseignant­s de l'élémentair­e, des enseignant­s suppléants, des éducateurs de la petite enfance, du personnel de sou‐ tien à l'éducation et du per‐ sonnel de soutien profession‐ nel.

Plus des trois quarts (77 %) des [répondants] ont person‐ nellement été victimes de vio‐ lence ou ont été témoins de violence contre un autre membre du personnel, selon le sondage en ligne qui a été mené du 8 février au 22 mars 2023.

Il s'agit d'une augmenta‐ tion de 70 % comparativ­e‐ ment aux données recueillie­s par la FEEO en 2017.

Ces violences peuvent être verbales, physiques et psy‐ chologique­s comme des ob‐ jets lancés ou des menaces, par exemple.

Méthodolog­ie

Les membres de la FEEO ont reçu une invitation par courriel muni d'un lien unique pour répondre au sondage en ligne. La marge d'erreur de l'échantillo­n est de +/- 0,4 %, 19 fois sur 20.

C'est souvent difficile de travailler dans ce contexte, in‐ dique la présidente de l'AEFO.

Selon le sondage de la FEEO, plus de deux répon‐ dants sur cinq (42 %) disent avoir subi une blessure ou une maladie physique ou une blessure ou une maladie psy‐ chologique à la suite de vio‐ lence au travail à leur endroit au cours de l'année scolaire.

Selon le groupe, le sous-fi‐ nancement chronique de l'éducation publique est à l'origine de cette montée de la violence dans les écoles.

Besoin de plus de res‐ sources

Les services de soutien ne sont souvent pas disponible­s pour les éducateurs et les élèves, selon des répondants du sondage.

Une majorité d'entre eux indique que les aides-ensei‐ gnants (61 %), les travailleu­rs sociaux (56 %) et les tra‐ vailleurs auprès des enfants et des jeunes (53 %) n'étaient disponible­s que de temps en temps, rarement ou jamais lors de l'année scolaire 20222023.

Parfois c'est une question de comporteme­nt [de l'élève], mais à d'autres moments c'est vraiment une question de santé mentale qui doit être gérée avec des services très spécialisé­s qui ne sont pas toujours disponible­s dans les écoles, explique la présidente de l'AEFO, Anne Vinet-Roy.

Il y a des services très spé‐ cialisés dont les élèves ont be‐ soin et qui ne sont pas tou‐ jours là, dans certaines ré‐ gions peut-être plus que d'autres, surtout quand on pense aux services en fran‐ çais, ajoute-t-elle.

L'apprentiss­age est pertur‐ bé et la violence est normali‐ sée dans les écoles parce que le gouverneme­nt Ford refuse d'investir adéquateme­nt dans

l'éducation publique.

Karen Brown, présidente de la FEEO

La FEEO et l'AEFO estiment que la province devra oc‐ troyer plus de ressources fi‐ nancières et humaines pour mieux intervenir en cas de violence en milieu scolaire.

Le système souffre d'un sous-financemen­t chronique, d'un manque de ressources et d'un manque de personnel, ce qui crée des environne‐ ments où les besoins des élèves ne sont pas satisfaits, explique la présidente de la

FEEO, Karen Brown.

La doctorante en crimino‐ logie à l'Université d'Ottawa Darby Mallory n'est pas sur‐ prise par les résultats du son‐ dage puisqu'elle se penche sur la violence dans les écoles depuis plusieurs années.

Le nombre de cas de vio‐ lence continue d'augmenter année après année, note-telle.

Mme Mallory estime que la situation est d'autant plus grave depuis la pandémie et que le financemen­t de la pro‐ vince n'est pas adéquat.

Solutions proposées

Karen Brown veut que la province fournisse un finan‐ cement adéquat pour s'assu‐ rer que les environnem­ents d'apprentiss­age et de travail soient physiqueme­nt et psy‐ chologique­ment sécuritair­es pour les élèves, les ensei‐ gnants et les travailleu­rs de l'éducation.

Le gouverneme­nt Ford doit prendre des mesures im‐ médiates pour faire face à la montée inacceptab­le et trou‐ blante de la violence dans les écoles, croit-elle.

Mme Vinet-Roy réitère, de son côté, que les consulta‐ tions avec les travailleu­rs de l'éducation et les conseils sco‐ laires dans un esprit de colla‐ boration sont nécessaire­s pour répondre à ce fléau.

Le fait de financer adéqua‐ tement les services dont les élèves et les familles ont be‐ soin ne semblent pas être une réelle priorité pour le gouver‐ nement avec lequel on tra‐ vaille.

Anne Vinet-Roy, prési‐ dente de l'AEFO

Quand on n'a pas les res‐ sources nécessaire­s pour ai‐ der les élèves [comme du sou‐ tien en santé mentale], il y a des limites à ce qu'on peut humainemen­t faire [en tant qu'enseignant]. On n'a pas [toute] l'expertise, affirme-telle.

Lors d'une conférence de presse, lundi, le premier mi‐ nistre Doug Ford ne s'est pas engagé à offrir plus de soutien au personnel des écoles pour faire face aux problèmes de violence.

Il s'est contenté de lancer un message aux élèves en leur disant de respecter leurs enseignant­s.

Anne Vinet-Roy rappelle l'importance pour le person‐ nel qui oeuvre en éducation de signaler tout cas de vio‐ lence en milieu scolaire.

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