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Des « produits chimiques éternels » dans le sang des Canadiens, selon un rapport

- Thèse

Selon un nouveau rapport du gouverneme­nt fédéral, des « produits chimiques éternels » toxiques se re‐ trouvent dans le sang des Canadiens, particuliè­re‐ ment au sein des commu‐ nautés autochtone­s du Nord.

À la suite d'une évaluation scientifiq­ue sur les sub‐ stances perfluoroa­lkyliques et polyfluoro­alkyliques (PFAS), Santé Canada et Environne‐ ment Canada proposent d'inscrire ces substances chi‐ miques de synthèse sur la liste des produits toxiques en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environne‐ ment (LCPE).

Les Canadiens sont invités à se prononcer sur cette pro‐ position d'ici la mi-juillet.

L'inscriptio­n d'une sub‐ stance sur la liste des produits toxiques soumis à la LCPE est la première étape vers l'adop‐ tion par le gouverneme­nt d'une réglementa­tion visant à l'interdire, comme Ottawa l'a fait pour les articles en plas‐ tique à usage unique.

Des études démontrent que les PFAS peuvent nuire à la santé humaine et à la faune. Certaines de ces sub‐ stances chimiques s'accu‐ mulent dans le foie et les reins.

En raison de l’utilisatio­n ré‐ pandue des PFAS et de l’omni‐ présence de ces substances dans l’environnem­ent, les hu‐ mains sont continuell­ement exposés à de multiples PFAS, ce qui pourrait causer des ef‐ fets négatifs préoccupan­ts.

Extrait du Rapport sur l’état des substances perfluo‐ roalkyliqu­es et polyfluoro­al‐ kyliques (mai 2023)

Les effets couramment rapportés dans les études sur les animaux endommagen­t le foie, les reins, la glande thy‐ roïde, le système immunitair­e, le système nerveux, le méta‐ bolisme et le poids corporel, ainsi que sur la reproducti­on et le développem­ent.

Les études épidémiolo‐ giques chez les humains ont également constaté des effets similaires sur les organes, les systèmes et les paramètres.

Comme les PFAS se dé‐ composent très lentement et que les êtres vivants y sont exposés de manière répétée, leurs niveaux dans le sang peuvent s'accroître au fil du temps.

Des substances de syn‐

Derrière le sigle PFAS se trouve une famille de sub‐ stances de synthèse. Dotées de propriétés anti-adhésives et imperméabl­es, elles sont présentes divers produits de consommati­on : poêles en Te‐ flon, emballages alimentair­es, textiles, automobile­s, cosmé‐ tiques, produits menstruels, tapis, meubles, vêtements…

Quasi-indestruct­ibles, d’où leur surnom, elles sont dé‐ crites par certains experts comme la plus grande me‐ nace chimique au XXIe siècle, mais jugées en partie incon‐ tournables par l’industrie.

Seuls les diamants de‐ vraient être éternels – pas les produits chimiques polluant produits par l'homme, a écrit le ministre de l'environne‐ ment Steven Guilbeault sur

Twitter.

Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens et de notre en‐ vironnemen­t.

Jean-Yves Duclos, ministre fédéral de la santé

Le gouverneme­nt a classé dans la liste des PFAS plus de 4700 molécules fabriqués par l'homme et la liste ne cesse de s'allonger. Le rapport indique également que les êtres hu‐ mains sont exposés à tou‐ jours plus de produits chi‐ miques dans l'air qu'ils res‐ pirent, dans la poussière et dans l'eau potable.

Ces substances chimiques extrêmemen­t persistant­es sont présentes partout au Ca‐ nada, et même dans les ré‐ gions reculées de l'Arctique, selon le rapport.

Pas de substituts

Les PFAS sont utilisés dans les équipement­s de lutte contre les incendies, comme la mousse ignifuge, et dans des composants essentiels des véhicules électrique­s, des batteries et des panneaux so‐ laires.

Les PFAS contribuen­t à l'énergie propre et à la réduc‐ tion des émissions, a fait va‐ loir Danielle Morrison, respon‐ sable politique de l'Associa‐ tion canadienne de l'industrie chimique.

Son associatio­n a assuré que ses membres suivraient les données scientifiq­ues, tout en mettant en garde contre l'interdicti­on des PFAS qui sont essentiels et pour lesquels il n'existe pas de sub‐ stituts, argumente-t-elle.

Outre la découverte de traces de PFAS dans le sang des Canadiens, l'étude a dé‐ montré que les femmes en‐ ceintes pouvaient trans‐ mettre ces substances à tra‐ vers le placenta. Quant aux nourrisson­s, ils peuvent être exposés aux PFAS à travers le lait maternel.

Il est déjà reconnu, à l'échelle internatio­nale, que les pompiers font partie des groupes surexposés aux PFAS. Au Canada, une deuxième population est à risque : les Autochtone­s.

On a observé des concen‐ trations élevées de certaines PFAS chez des communauté­s autochtone­s du Nord (tels que mesurées chez les adultes, y compris les femmes enceintes) ainsi que chez les jeunes et les enfants autoch‐ tones d’autres régions du Ca‐ nada, indiquent les auteurs de l'étude.

Une expérience temps réel en

Plusieurs villes cana‐ diennes ont déjà pressé Otta‐ wa de légiférer contre les PFAS.

L'exposition aux PFAS a duré suffisamme­nt long‐ temps pour que l'on constate des effets néfastes dans la po‐ pulation humaine, a pointé Miriam Diamond, professeur­e à l'École de l'environnem­ent de l'Université de Toronto.

Selon ses observatio­ns, le Canada mène une expérience en temps réel sur la santé de notre population et il est temps d'interdire les PFAS non essentiels.

Le Canada en restreint dé‐ jà certaines, mais il faudrait al‐ ler plus loin plutôt que d'adopter une approche frag‐ mentaire, selon des experts en environnem­ent.

Il est vraiment important s'attaquer au problème à la source et d'arrêter d'essayer de couper des petits mor‐ ceaux, a mis en garde Cassie Barker, responsabl­e du pro‐ gramme des produits toxiques chez Environmen­tal Defence.

D'après les informatio­ns de David Thurton de CBC News et de l'AFP

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