Trousses de naloxone obligatoires : les employeurs critiquent l’amendement
Le gouvernement l’avait annoncé en décembre der‐ nier, les trousses de Na‐ loxone sont désormais obli‐ gatoires dans certains bars, restaurants, et chantiers en Ontario.
La bonification de la loi sur la sécurité des travailleurs est entrée en vigueur le 1er juin. Toutefois, très peu d'em‐ ployeurs manifestent de l'in‐ térêt pour l’acquisition des trousses et la participation aux formations offertes gra‐ tuitement.
Selon Ambulance St-Jean de l’Ontario, jusqu’à date, seulement 1300 travailleurs ont suivi la formation dans toute la province.
L'organisme a également distribué 1180 trousses de Naloxone dans toute la pro‐ vince.
Même si les statistiques ne se montrent pas encoura‐ geantes, Jenn Taing, coordon‐ natrice du programme de for‐ mation de Naloxone pour l’Ambulance St-Jean de l’Onta‐ rio estime qu’avec l’officialisa‐ tion de l’amendement, plus de personnes s’inscriront aux formations.
On a déjà atteint près de 1300 milieux de travail avec notre programme … Je suis persuadée qu’avec l’entrée en vigueur de la réforme, il va y avoir une augmentation mas‐ sive d'employeurs qui vou‐ dront profiter des formations que le gouvernement offre, et nous sommes prêts pour ça affirme Mme Taing.
Invasion de la vie pri‐ vée?
Cependant, à Sudbury, les conditions liées à l’amende‐ ment dérangent les em‐ ployeurs.
Bien que des formations soient offertes et des trousses distribuées gratuitement, seules les entreprises jugées à hauts risques peuvent en pro‐ fiter.
Dès lors, les propriétaires de bars, restaurants et direc‐ teurs de chantiers, doivent compter dans leur effectif au moins un employé qui souffre ou a souffert de problèmes de dépendance pour participer au programme.
Les employeurs doivent aussi prouver que le danger provient d’un employé, et non d’un client.
Pour Stéphanie Piché, pro‐ priétaire du restaurant Wan‐ der Food and Wine, cette règle encourage une invasion de la vie privée des employés.
En tant qu’employeur, je dois identifier les employés qui ont des dépendances, je dois les traiter différemment, mais aussi dire au reste du personnel qu’on doit avoir une trousse de Naloxone. C’est un peu envahir leur vie privée et ca dérange.
Stéphanie Piché, proprié‐ taire du restaurant Wander Food and Wine
Madame Piché critique également le fait que ce soit uniquement certaines entre‐ prises qui sont visées par la réforme et non l'ensemble.
J’imagine que si l’amende‐ ment ne vise que certains res‐ taurants, bars et chantiers c’est parce qu’on nous identi‐ fie comme des entreprises qui ont des employés qui souffrent de dépendances alors qu’ils peuvent se trouver partout ajoute Mme Piché.
Un pansement sur un tuyau cassé
De son côté, Dan Cronin, directeur général du bar Alibi Room, considère que le gou‐ vernement devrait faire mieux.
C’est un pansement sur un tuyau cassé… Le gouverne‐ ment devrait investir dans les institutions de santé, les centres de désintoxication, de santé mentale, dans les loge‐ ments et dans des soins pré‐ ventifs … c’est une mesure ré‐ actionnaire. affirme-t-il.
Un propos que soutient également Stéphanie Piché, qui aurait souhaité que le gouvernement agisse plus tôt, en trouvant les sources des dépendances et en of‐ frant aux toxicomanes tout ce dont ils ont besoin pour aller mieux.
Un pas dans la bonne di‐ rection
Caroline Lavoie, infirmière et experte en santé mentale pour Santé Publique Sudbury & districts, est moins sévère avec cette mesure, mais ren‐ chérit sur le besoin d'en faire plus.
C’est un pas dans la bonne direction. Ce n'est certaine‐ ment pas la seule stratégie qu’on doit utiliser pour com‐ battre ces crises de drogues toxiques. C’est utile comme stratégie immédiate mais il y a aussi des stratégies pour le fu‐ tur et pour faire de la préven‐ tion. Il faut attaquer ce pro‐ blème sur tous les angles
Caroline Lavoie, infirmière et experte en santé mentale pour Santé Publique Sudbury & districts
Pour le moment, entre jan‐ vier et mars 2023, Santé Pu‐ blique Sudbury et districts a enregistré la distribution de 5580 doses de Naloxone dans le Grand Sudbury, sans comp‐ ter celles distribuées dans les pharmacies.
La Municipalité recense également 142 incidents liés aux opioïdes pour la même période.
Cependant, un total de 9 morts liées aux opioïdes ont été enregistrées en janvier seulement à Sudbury et dans le district de Manitoulin.
Cela représente 52 morts par 100 000 habitants par an‐ née, contre 12,4 morts par 100 000 habitants dans l'en‐ semble de l’Ontario.