Ingérence étrangère : David Johnston a fait appel à une firme de communication
David Johnston, le rappor‐ teur spécial chargé de faire la lumière sur l'ingérence étrangère au Canada, a re‐ tenu les services d'une firme de relations pu‐ bliques connue pour ses ca‐ pacités de gestion de crise et la facture a été refilée à l'État, a appris CBC News.
Valérie Gervais, une porteparole de M. Johnston, a confirmé que l'ancien gouver‐ neur général, qui a été nom‐ mé par le premier ministre Justin Trudeau pour enquêter sur l'ingérence étrangère dans la politique canadienne, a em‐ bauché la firme Navigator au début de son mandat pour obtenir des conseils en ma‐ tière de communication et du soutien.
Navigator se décrit comme la première entreprise cana‐ dienne de gestion d'enjeux et de communication straté‐ gique. Son slogan est perdre n'est pas une option.
Hockey Canada a égale‐ ment fait appel à cette entre‐ prise pour l'aider à surmonter les conséquences de sa ges‐ tion d'allégations d'abus sexuels et de l'utilisation des frais d'inscription des joueurs pour discrètement payer des plaignantes. Un responsable d'Hockey Canada a confirmé que l'organisation avait payé plus de 1,6 million de dollars à Navigator pour traverser ce cauchemar de relations pu‐ bliques.
Avant de démissionner de son poste, le chef de police d'Ottawa Peter Sloly a lui aus‐ si embauché Navigator pour l'aider dans ses démarches en matière de communication, dans le cadre de l'occupation illégale du centre-ville d'Otta‐ wa, un événement qui a duré plus de trois semaines.
Un rôle de soutien
Dans le cadre de l'accom‐ pagnement de M. Johnston, Navigator a préparé des com‐ muniqués de presse, lui a fourni des conseils avant des entrevues, a analysé des re‐ vues de presse et des publica‐ tions sur les médias sociaux et a offert un soutien logis‐ tique en vue de la publication de son premier rapport sur l'ingérence étrangère, a men‐ tionné Mme Gervais dans une déclaration écrite transmise à CBC News.
Navigator n'a rien eu à voir dans l'enquête [de M. Johns‐ ton] ou dans le développe‐ ment de ses conclusions, et
n'a pas eu accès à des infor‐ mations confidentielles, a-telle ajouté.
CBC News a réclamé une estimation des coûts des ser‐ vices de Navigator. Le bureau de M. Johnston a répondu que les travaux sont toujours en cours et que les coûts fi‐ naux ne sont pas encore dis‐ ponibles.
En accord avec les normes en vigueur et les politiques du Conseil du Trésor, le rappor‐ teur spécial indépendant est autorisé à entraîner toutes les dépenses nécessaires pour mener un examen indépen‐ dant, a poursuivi Mme Ger‐ vais, qui ajoute que les ser‐ vices retenus sont soumis aux pratiques en vigueur en ce qui concerne la divulgation pu‐ blique.
En plus de Navigator, M. Johnston a aussi fait appel à la firme de communication ottavienne RKESTRA pour fournir de l'aide en matière de relations médias en lien avec la publication de son premier rapport.
Le site web de cette com‐ pagnie indique que Mme Ger‐ vais en est la fondatrice et la présidente-directrice géné‐ rale.
Enfin, M. Johnston a em‐ bauché le bureau d'avocats Torys pour fournir des ser‐ vices juridiques, d'enquête et de rédaction, a fait savoir Mme Gervais.
Ne pas aller au fond des choses
Dans une déclaration transmise par voie de com‐ muniqué, le chef du Nouveau
Parti démocratique, Jagmeet Singh, a affirmé que les libé‐ raux ont raté la cible et ont constamment échoué à ras‐ surer les Canadiens et à leur assurer que leurs élections sont libres de toute ingé‐ rence.
Embaucher une firme de gestion de crise laisse en‐ tendre que la principale in‐ quiétude des libéraux porte sur l'apparence de cette af‐ faire, et non pas l'idée d'aller au fond des choses dans ce dossier important, a-t-il ajou‐ té.
Selon M. Singh, si les libé‐ raux avaient déclenché une enquête publique, les contri‐ buables n'auraient pas à payer pour un autre service de gestion de crise.
De son côté, la députée conservatrice Michelle Rem‐ pel Garner a écrit sur Twitter qu'elle ne comprenait pas pourquoi Navigator avait été embauchée et que l'entre‐ prise s'exposait possiblement à plusieurs semaines de ques‐ tions de la part de tous les partis d'opposition.
Un porte-parole du Parti conservateur, Sebastian Skamski, a soutenu que le fait de se tourner vers Navigator a donné aux Canadiens une nouvelle raison de réclamer une enquête ouverte et indé‐ pendante. Selon lui, M. Johns‐ ton gaspille les dollars dure‐ ment gagnés par les Cana‐ diens.
Contactée par CBC News, Navigator a expliqué que sa politique consiste à ne pas commenter ses liens avec ses clients.
Aux Communes, l'opposi‐ tion a critiqué la nomination de M. Johnston en raison de ses liens avec la Fondation Pierre Elliot Trudeau et la fa‐ mille du premier ministre. Le principal intéressé a répliqué que les liens familiaux étaient surévalués, tandis que les conservateurs l'ont plutôt qualifié d'ami qui skie avec M. Trudeau et d'ami person‐ nel du premier ministre.
Vendredi, ce dernier s'est engagé à maintenir M. Johns‐ ton dans ses fonctions et a dit avoir hâte aux audiences pu‐ bliques que l'ex-gouverneur général devrait tenir au cours des prochains mois, avant de publier son rapport final, cet automne.