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Avec le départ attendu de Patrick Roy, la LHJMQ perd sa plus grande vedette

- Martin Leclerc

En défaisant les Thunder‐ birds de Seattle au compte de 5-0, les Remparts de Québec ont remporté la troisième Coupe Memorial de leur histoire, dimanche soir, à Kamloops. Tout porte à croire que c’est sur cet impression­nant point d’exclamatio­n que prend fin la carrière d’entraîneur de Patrick Roy dans les rangs juniors. Et du coup, la LHJMQ perd sa plus grande vedette.

En décembre 1996, Patrick Roy s’était porté acquéreur des Harfangs de Beauport avec ses associés Jacques Tan‐ guay et Michel Cadrin. Cette franchise éprouvait alors des difficulté­s qui semblaient in‐ surmontabl­es aux guichets. Ils attiraient une moyenne de 899 spectateur­s par match, ce qui les situait au 14e et der‐ nier rang de la LHJMQ au cha‐ pitre des assistance­s.

Le plan des trois investis‐ seurs consistait à déménager l’équipe au vieux Colisée de Québec et à faire revivre les Remparts. Les mythiques Diables rouges avaient excellé et aligné plusieurs futures ve‐ dettes de la LNH (dont Guy Lafleur) lors des premières années d’existence de la LH‐ JMQ.

Quelques heures à peine après avoir conclu la transac‐ tion, Roy se donnait pour ob‐ jectif de remporter la Coupe Memorial et de redonner confiance au public en pré‐ sentant un spectacle intéres‐ sant .

À cette époque, Roy défen‐ dait encore le filet de l’Ava‐ lanche du Colorado. Les gens croyaient que les trois inves‐ tisseurs venaient de poser un geste civique afin de mainte‐ nir une équipe junior majeur dans la région de Québec. Personne ne pouvait imaginer que Roy allait un jour devenir la véritable vedette de cette organisati­on et que les Rem‐ parts allaient finir par se mé‐ tamorphose­r en franchise ju‐ nior la plus populaire au Ca‐ nada.

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Patrick Roy a disputé six autres saisons dans la LNH après être devenu actionnair­e des Remparts. Malgré cela, il démontrait une véritable pas‐ sion pour son équipe junior. Il insistait pour qu’on lui fasse parvenir les films de tous les matchs ainsi que les articles de journaux qui en décou‐ laient.

Dès leur première saison aux commandes, les nou‐ veaux propriétai­res ont vu les assistance­s doubler, ce qui a fait grimper les Remparts au 10e rang de la ligue.

Et d’année en année, leur popularité s’est accrue de fa‐ çon fulgurante. En 2004-2005, quand la saison de la LNH a été annulée en raison d’un lock-out, les Remparts ont at‐ tiré plus de 240 000 specta‐ teurs, soit une moyenne de 6920 par rencontre. Ils étaient désormais la deuxième orga‐ nisation la plus populaire de la LHJMQ derrière les Moose‐ heads d’Halifax. Aux guichets, les Mooseheads semblaient toutefois indélogeab­les.

Après avoir annoncé sa re‐ traite à titre de gardien en 2003, Patrick Roy a occupé le poste de directeur général des Remparts pendant deux saisons. Puis, à la fin de sep‐ tembre 2005, il a décidé de re‐ mercier son entraîneur en chef Éric Lavigne et de des‐ cendre lui-même derrière le banc.

Le printemps suivant, l’équipe s’est inclinée face aux Wildcats de Moncton en fi‐ nale de la Coupe du Pré‐ sident. Les Remparts ont tou‐ tefois remporté la Coupe Me‐ morial que Patrick Roy avait invoquée neuf ans plus tôt. Le tournoi de la Coupe Memorial était disputé à Moncton et les Remparts avaient obtenu le droit d’y participer à titre d’équipe finaliste de la LHJMQ. ***

Tout cela pour dire que de‐ puis ce jour de 2005 où Pa‐ trick Roy a posé le pied der‐ rière le banc des Remparts, cette équipe junior est la plus populaire au Canada. Depuis ce fameux jour où Roy a déci‐ dé de prendre les com‐ mandes, les Remparts ont at‐ tiré, tenez-vous bien, 1 859 564 spectateur­s DE PLUS que les Mooseheads d’Halifax en saison.

Cette incroyable statis‐ tique donne non seulement une idée de l’immense popu‐ larité de Roy, mais aussi de la crédibilit­é que les amateurs de hockey de Québec accor‐ daient à sa présence derrière le banc de leur équipe.

Il est courant de voir d'an‐ ciens joueurs de la LNH entre‐ prendre une deuxième car‐ rière dans le monde du ho‐ ckey. De façon générale, les anciennes supervedet­tes se tiennent toutefois loin du poste d’entraîneur en raison de la précarité inhérente à cet emploi. Les membres du pan‐ théon du hockey préfèrent les postes de direction.

Cette réalité rend le par‐ cours de Patrick Roy encore plus singulier. Non seulement a-t-il opté pour le métier d’en‐ traîneur, mais il l’a en plus pra‐ tiqué en se tapant, pendant 13 saisons, les interminab­les randonnées d’autobus d’une équipe junior. L’immense re‐ nommée des Remparts, j’en suis convaincu, est directe‐ ment liée à la sincérité et à la passion que Roy a démon‐ trées pour ce projet.

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En 2013, Roy a accepté les postes d’entraîneur et de viceprésid­ent des opérations ho‐ ckey de l’Avalanche du Colora‐ do. Dès la saison suivante, les assistance­s aux matchs des Remparts ont commencé à fléchir.

Puis à l’automne 2014, les propriétai­res des Remparts ont décidé de vendre leur équipe à Québecor qui avait obtenu le contrat de gestion du nouvel amphithéât­re de Québec.

Un club de hockey junior vit de la billetteri­e et des com‐ mandites. C’était impossible d’opérer l’équipe dans un am‐ phithéâtre géré par une autre entreprise , avait commenté Jacques Tanguay lors de l’an‐ nonce de la vente.

Roy a dirigé l’Avalanche du‐ rant trois saisons et il a remis sa démission à l’aube de la sai‐ son 2016-2017 en raison d’un différend philosophi­que avec le président des opérations hockey, Joe Sakic.

En 2018, les assistance­s aux matchs des Remparts étaient à leur plus bas niveau en 12 ans quand l’organisa‐ tion a sollicité Patrick Roy afin qu’il reprenne du service à titre d’entraîneur.

La cote de popularité des Remparts est aussitôt repar‐ tie vers le haut. Les affaires ont ensuite été difficiles pen‐ dant quelques saisons en rai‐ son de la pandémie. Mais lors des dernières séries, les Rem‐ parts ont battu des records en accueillan­t plus de 18 000 spectateur­s à certains de leurs matchs.

Les équipes junior majeur font des affaires d’or lors‐ qu’elles ont la chance d’ac‐ cueillir une future superve‐ dette dans leurs rangs. Les joueurs comme Sidney Cros‐ by ou Nathan MacKinnon font automatiqu­ement bon‐ dir la demande de billets.

Avec Patrick Roy, dans une perspectiv­e d’affaires, c’était comme si les Remparts mi‐ saient sur un Sidney Crosby chaque année.

On ne sait pas encore quels sont les projets d’avenir de Patrick Roy. Mais chose certaine, les Remparts auront beaucoup de difficulté à le remplacer.

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