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Un simple test salivaire pour dépister le VIH au Canada

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Des chercheurs de l'hôpital St Michael de Toronto sont en train de travailler sur un outil permettant un dé‐ pistage rapide du VIH à tra‐ vers un simple brossage des gencives et sans prise de sang. OraQuick est un au‐ totest oral, indolore et ra‐ pide qui pourrait fournir des résultats en 20 mi‐ nutes.

Le gouverneme­nt fédéral estime qu'environ 62 000 per‐ sonnes au Canada sont at‐ teintes de la maladie, d'après les données de surveillan­ce. Cependant, seulement 87 % des personnes séropositi­ves ont été diagnostiq­uées, ce qui signifie que 13 % des malades ignorent être porteurs du VIH, selon le rapport.

Bien que le test soit nou‐ veau au Canada, OraQuick a été approuvé par la Food and Drug Administra­tion des États-Unis en 2012.

L’hôpital St Michael teste maintenant OraQuick dans deux cliniques de santé sexuelle de Toronto, Hassle Free Clinic et Maple Leaf Me‐ dical Clinic, ainsi que dans plu‐ sieurs autres établissem­ents à travers le Canada. Les essais dans les cliniques de Toronto ont commencé la semaine dernière.

L'étude portera sur la pré‐ cision et la facilité d'utilisatio­n du test. OraSure Technolo‐ gies, qui a créé OraQuick, es‐ time que le test a un taux de précision de 92 %.

Le test est plus facile que le test COVID, affirme Sean Rourke, neuropsych­ologue clinicien et l'un des respon‐ sables de l'étude.

Selon lui, les progrès du traitement du VIH doivent permettre à une personne diagnostiq­uée d’avoir accès à des médicament­s qui per‐ mettent de vivre longtemps et de ne pas transmettr­e la maladie, même pas des rap‐ ports sexuels non protégés ou en accouchant.

Connaître son statut

Les personnes séroposi‐ tives doivent tout d'abord connaître leur statut. Or, trop de personnes appartenan­t à des groupes vulnérable­s ne savent pas comment se faire tester ou n'ont pas de contact avec le système de santé, pré‐ cise Sean Rourke.

Les groupes qui sont prin‐ cipalement à risque sont les hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes, ceux des commu‐ nautés noires et autochtone­s et ceux qui consomment de la drogue, poursuit le clinicien.

Le docteur Rourke et ses collègues ont besoin de 900 participan­ts pour essayer OraQuick afin qu'ils puissent envoyer les résultats à Santé Canada et mettre le test sur le marché.

Ce sont des technologi­es disponible­s que tout le monde devrait avoir, peu im‐ porte où vous habitez au Ca‐ nada.

Sean Rourke, neuropsy‐ chologue clinicien et respon‐ sable de l'étude.

Les tests rapides et faciles à domicile pour empêcher la propagatio­n d'une maladie n'ont jamais été aussi impor‐ tants que durant la pandémie de COVID-19, remarque Sean Rourke. C'est pourquoi, pense-t-il, les gouverneme­nts doivent maintenir l'élan en rendant les autotests de dé‐ pistage du VIH disponible­s dans tout le pays.

CBC News a demandé des commentair­es à Santé Cana‐ da, mais n'a reçu aucune ré‐ ponse jusqu’à présent.

Autotests disponible­s dans tout le pays

Le premier autotest de dé‐ pistage du VIH approuvé par Santé Canada, appelé INSTI, est devenu disponible dans tout le pays en no‐ vembre 2020.

INSTI, qui utilise une goutte de sang pour fournir des résultats en une minute, coûte 34,95 $ s'il est comman‐ dé sur le site Web de l'entre‐ prise. Cependant, le test est également accessible gratuite‐ ment via le programme I'm Ready to Know créé par l'hô‐ pital St Michael qui a distribué plus de 10 000 tests au cours des deux dernières années.

Il y a aussi GetAKit, un pro‐ gramme géré par l'Université d'Ottawa et ses partenaire­s, qui offre des kits INSTI gra‐ tuits dans des régions déter‐ minées, par l'intermédia­ire de partenaire­s communauta­ires, dont Toronto.

Jusqu'à présent, ce pro‐ gramme a distribué plus de 7000 trousses gratuites dans tout l'Ontario, selon Patrick O'Bryne, professeur de sciences infirmière­s à l'Univer‐ sité d'Ottawa qui dirige le pro‐ gramme.

De son côté, Jane Greer, di‐ rectrice de la clinique de santé sexuelle Hassle Free, explique que les habitants de Toronto qui ont des cliniques à proxi‐ mité sont probableme­nt habi‐ tués à des tests fréquents. Mais, selon elle, les autotests pourraient être particuliè­re‐ ment bénéfiques pour ceux qui se trouvent en dehors des noyaux urbains.

Elle ajoute que le fait de ne pas avoir à prélever de sang pourrait également rendre cet autotest plus facile à utiliser.

Pour sa part, Adam Awad, directeur des communica‐ tions à la Gay Men's Sexual Health Alliance de Toronto, ne cache pas son enthousias­me vis-à-vis d’OraQuick, car cer‐ tains de ses clients lui disent qu'un autotest sanguin est trop inconforta­ble.

Il prévient toutefois que si OraQuick est approuvé par Santé Canada, les kits doivent être disponible­s avec le moins de barrières possible, car ceux qui sont à haut risque et qui n'ont jamais fait de test de dé‐ pistage du VIH sont peu sus‐ ceptibles de payer pour un autotest, explique-t-il.

L'Agence de la santé pu‐ blique du Canada a déclaré en août 2022 que la distributi­on d'autotests du VIH était une priorité et a annoncé un fi‐ nancement de huit millions de dollars pour des trousses auto-administré­es.

Mais le financemen­t de ces types de programmes reste un défi et doit être continuel‐ lement renouvelé pour conti‐ nuer à distribuer des tests, prévient le docteur Rourke.

Des changement­s pour améliorer le dépistage et le traitement

Adam Awad souligne quant à lui les récents change‐ ments apportés aux lignes di‐ rectrices sur les soins liés au VIH et au sida par le ministère de la Santé de l'Ontario qui visent à améliorer le dépis‐ tage et le traitement. Il estime que ces changement­s sont encouragea­nts, car ils ex‐ hortent les prestatair­es de soins de santé à tester les pa‐ tients plus régulièrem­ent et font également référence à l'importance des autotests.

Environ 5 à 12 % de tous les nouveaux cas de VIH en Ontario sont également at‐ teints du sida, le stade le plus avancé de la maladie lorsque le système immunitair­e de l'organisme est gravement en‐ dommagé, explique M. Awad.

Ces gens auraient dû être testés bien plus tôt. Aucun habitant de l'Ontario ne de‐ vrait avoir le sida.

Adam Awad, directeur des communicat­ions à la Gay Men's Sexual Health Alliance

C’est un chiffre énorme, mais qui devrait baisser à me‐ sure que des autotests plus faciles à utiliser seront dispo‐ nibles, espère Adam Awad.

Avec les informatio­ns de Olivia Bowden

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