Transport aérien : Régionair souhaite reprendre son envol
Après avoir mis le projet sur la glace en 2021, la Ré‐ gie intermunicipale de l’aé‐ roport de Mont-Joli sou‐ haite relancer Régionair. « On veut reconstruire un écosystème viable pour le transport aérien en région », lance son président, Bruno Paradis.
Il souhaite présenter une version 2.0 du projet au gou‐ vernement du Québec dès l’automne prochain.
Le projet de Régionair consiste à créer un orga‐ nisme parapublic qui regrou‐ perait les MRC et les aéro‐ ports de l’Est-du-Québec. Ré‐ gionair procéderait par appel d’offres pour embaucher un transporteur qui offrirait des vols quotidiens entre les aé‐ roports de l’Est vers Québec et Montréal.
Le projet a été proposé pour la première fois en juillet 2020 afin de pallier la suspension de liaisons aé‐ riennes par Air Canada. Ré‐ gionair a ensuite été mis de côté après le lancement par le gouvernement du Québec de son Programme d’accès aérien aux régions (PARR), of‐ frant des billets d’avion à 500 $.
Cette stratégie a connu un succès mitigé depuis, selon Bruno Paradis. Et l’annonce du transporteur Pascan Avia‐ tion de ne plus offrir de vols directs depuis décembre 2023 de Mont-Joli vers Qué‐ bec et Montréal a créé un vide important, selon lui.
Actuellement, il y a des transporteurs aériens qui s’essayent pour créer une liaison, des fois avec l’aide de subsides du gouvernement, mais il reste que ça fait en sorte souvent que ce n’est pas pérenne. Les gens, ils sont frileux, parce que sou‐ vent, ils se font annuler leur vol ou à long terme, les acti‐ vités cessent, explique-t-il.
Ce dont on s’aperçoit, c’est qu’il y a une crise de confiance envers le transport aérien.
Bruno Paradis, président de la Régie intermunicipale de l’aéroport de Mont-Joli
Depuis un peu moins d’un an, la directrice générale de l’aéroport de Mont-Joli, Julie Laviolette, fait la tournée des différents partenaires poten‐ tiels dans l’Est afin de bien comprendre leurs enjeux et leurs besoins.
Elle a pris son bâton de pèlerin et elle a commencé à rencontrer les chambres de commerce, les associations touristiques, les autres aéro‐ ports, les fournisseurs de services, les transporteurs, énumère M. Paradis.
L’objectif sera ensuite d’obtenir du financement de la part du gouvernement du Québec afin de lancer un ap‐ pel d’offres un peu comme on le fait en transport par au‐ tobus, précise M. Paradis.
C’est de s’assurer de dire qu’on a une entente de deux, trois ou quatre ans avec un transporteur qui lui, n’aurait pas à s’occuper de la vente de billets, n’aurait pas à se préoccuper si son avion se‐ rait plein ou pas. Il aurait à offrir le moindre coût pos‐ sible pour desservir le terri‐ toire pour un nombre déter‐ miné [de vols] allers-retours vers les grands centres, ex‐ plique M. Paradis.
Le président du comité sur le transport aérien de l'Union des municipalités du Québec et maire de Gaspé, Daniel Côté, croit aussi que l'idée de créer Régionair est la bonne. On doit contrôler ce qui se passe au niveau du transport aérien régional qui est toujours laissé entre les mains du privé qui agit comme bon lui semble dans l'optique principale de faire du profit, dit-il.
La vision de Régionair, on l'appuie depuis le début. Pourquoi? Parce qu'on vient contrôler ce qui se passe dans nos aéroports. Je pense que c'est une des avenues les plus porteuses qu'on a de ré‐ gir le transport aérien et d'of‐ frir une desserte bonifiée, renchérit M. Côté.
M. Paradis précise que si ce nouveau service est mis en place, les aéroports de l’Est devront se coordonner pour offrir un service adé‐ quat.
On ne peut pas partir à la fois des Îles-de-la-Madeleine, de Gaspé, de Bonaventure, de Mont-Joli et de Baie-Co‐ meau à 8 h le matin. Il va fal‐ loir un certain horaire, une certaine logistique. Il y a tout cela aussi qui est à réfléchir et à mettre en place, note M. Paradis.
Dans son projet initial, la Régie intermunicipale de l’aé‐ roport de Mont-Joli estimait avoir besoin d’une subven‐ tion de 20 millions de dollars pour les premières années
d’opération. M. Paradis ex‐ plique que puisque le projet repart à neuf, les coûts d’opé‐ rations seront aussi à rééva‐ luer au cours des prochains mois.
Et il espère que le gouver‐ nement sera à l’écoute, cette fois-ci. J’ose espérer que la solution qu'on apportera, qui a comme objectif de trouver des solutions pérennes à la problématique du transport aérien en région, va être écoutée. Sinon, on se ques‐ tionnera sur la volonté de ré‐ gler le problème à long terme, affirme M. Paradis.
Un entrepreneur en mal d’un service aérien fiable
Si la Régie intermunicipale de l’aéroport de Mont-Joli souhaite relancer Régionair, c’est aussi pour desservir la communauté d’affaires de la région.
Le Groupe SEMA Struc‐ tures Ferroviaires, basé à Sainte-Flavie, doit envoyer ré‐ gulièrement des travailleurs en Ontario. Avant la pandé‐ mie, les employés pouvaient prendre un vol de Mont-Joli vers Montréal avec Air Ca‐ nada. Ils pouvaient ensuite prendre une correspondance vers Toronto, Ottawa ou dans le Nord de l’Ontario.
Le président-directeur gé‐ néral de l’entreprise, Rock Morel, estime qu’avant la pandémie, la compagnie pouvait investir en moyenne un demi-million de dollars en billets d’avion annuellement. L’absence de vols de MontJoli vers Montréal force main‐ tenant les employés de l’en‐ treprise à se déplacer en voi‐ ture, une opération plus coû‐ teuse, selon lui.
Vous prenez des em‐ ployés et vous les mettez dans un véhicule pendant 16, 17 et 18 heures de temps. On les nourrit, on les loge et ils sont payés. Les dépenses sont extrêmement élevées, beaucoup plus chères que d’utiliser le transport aérien, illustre-t-il.
M. Morel avance que cette situation lui a même fait perdre des contrats. À l’occa‐ sion, je ne vous mentirai pas qu’on ne soumissionne pas sur des projets. Soit qu’on n’est pas compétitif ou soit qu’on n’a pas la main-d’oeuvre pour y aller, explique-t-il.
L’homme d’affaires verrait donc d’un bon oeil l’arrivée d’un service comme Régio‐ nair. Il dit même être prêt à s’engager financièrement dans l’initiative. Avec des pro‐ jets qu’on a en main ou des projets futurs, je suis même prêt à m’engager pour une banque d’heures pour être capable de donner une chance à une petite compa‐ gnie qui ferait cela, assure-til.