Radio-Canada Info

Isolement des ainés : miser sur une « prescripti­on sociale » au lieu des médicament­s

- Margaux Tertre

Pendant 18 mois, des ex‐ perts canadiens du vieillis‐ sement ont travaillé pour établir des lignes direc‐ trices sur l’isolement social chez les aînés. Ce docu‐ ment, dévoilé mercredi, vise à sensibilis­er les pro‐ fessionnel­s de la santé et les travailleu­rs sociaux pour les aider à s’attaquer au problème qualifié d’« épidémie ».

L’isolement social, ce n’est pas anodin, c’est pas juste "je veux pas sortir de chez moi", explique la Dre Suzanne Du‐ puis-Blanchard, directrice du Centre d'études du vieillisse‐ ment de l’Université de Moncton au Nouveau-Bruns‐ wick.

L’isolement social a les mêmes conséquenc­es que fumer 15 cigarettes par jour.

Dre Suzanne Dupuis-Blan‐ chard, directrice du Centre d'études du vieillisse­ment de l’Université de Moncton

En plus des conséquenc­es sur la santé mentale, l’impact de l’isolement social sur la santé physique a été quanti‐ fié.

Les risques d’accident vas‐ culaire cérébral sont accrus de 32 % pour les personnes qui en souffrent. Les chances de développer une forme de démence augmentent de plus de moitié et les risques de décès augmentent de 45 % si l’aîné en est victime.

Pas d’améliorati­on sans pédagogie auprès des pro‐ fessionnel­s

Il ne s’agit pas non plus d’un phénomène marginal. Près de 41 % des aînés cana‐ diens sont confrontés au risque d’isolement social.

C’est une crise de santé publique et c’est beaucoup plus courant qu’on ne le voit avec ces chiffres. Une partie de la population touchée par l’isolement n’est pas celle qui répond aux sondages, assure

Suzanne Dupuis-Blanchard.

Elle juge que la situation n’ira pas en s’améliorant si on n’apprend aux profession­nels de santé et aux travailleu­rs sociaux à repérer les signes pour apprendre à intervenir auprès des aînés.

Les lignes directrice­s éta‐ blies par neuf médecins, tra‐ vailleurs sociaux et tra‐ vailleurs de la santé ainsi que des chercheurs experts du vieillisse­ment, dont Suzanne Dupuis-Blanchard, ont pour objectif de remédier à ces la‐ cunes et mettre à dispositio­n des outils pratiques.

Par exemple, si dans la discussion, une personne âgée dit à son médecin, son infirmière ou son physiothé‐ rapeute, avoir perdu son conjoint, son permis de conduire, moins bien en‐ tendre, il faudrait que ça lève un petit drapeau et qu’il se dise qu’il faut creuser parce qu’il y a un risque d’isole‐ ment, poursuit la cher‐ cheuse.

Vivre seul, avec un faible revenu, avec un cercle social qui rétrécit sont des facteurs de risques supplément­aires. Les femmes, les personnes racialisée­s et de la commu‐ nauté LGBTQ+ sont égale‐ ment plus à risque.

Exclure les médica‐ ments pour traiter l'isole‐ ment social

Une fois que l’évaluation est faite, les experts recom‐ mandent une prescripti­on sociale. Cela peut prendre plusieurs formes. Par exemple, le profession­nel de santé peut mettre son pa‐ tient en contact avec des or‐ ganisation­s, des programmes ou des ressources commu‐ nautaires qui offrent des oc‐ casions d’interactio­n sociale.

Le groupe de travail re‐ commande également aux aînés de conserver une acti‐ vité physique quand c’est possible, d’entamer une thé‐ rapie psychologi­que ou même des thérapies avec des animaux.

Ce qui est à exclure selon les experts, c’est l’utilisatio­n de médicament­s uniquement pour traiter l’isolement so‐ cial.

Ce n’est pas aussi simple que de prescrire des anxioly‐ tiques ou des antidépres‐ seurs. L’isolement, ce n’est pas une maladie.

DreSuzanne Dupuis-Blan‐ chard, directrice du Centre d'études du vieillisse­ment de

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada