Virage vers l’intelligence artificielle pour les services gouvernementaux au Québec
Flavie Sauvageau, Magalie Masson
conversationnel (ou chatbot, en anglais), sera mis sur pied pour guider les usagers sur le site web de Données Qué‐ bec. Il permettra de les aider à repérer les données qu’ils recherchent.
L’IA sera aussi mise à l’es‐ sai pour valider la facturation de certains fournisseurs de l’État. Un troisième projet vise à faciliter l'inscription des nouveaux fonctionnaires provinciaux à leur régime d’assurance collective.
Ce dernier projet pourrait permettre de faire passer de 14 à 1 minute le temps de traitement de certaines de‐ mandes, et ainsi permettre d’économiser 130 jours de
travail aux fonctionnaires.
Appel de projets
Un appel de projets sera également lancé dans tous les ministères et organismes du gouvernement québécois qui souhaiteraient intégrer l’automatisation ou l’intelli‐ gence artificielle dans leurs opérations.
Ce qu'on cherche ici, c'est d'identifier des processus ad‐ ministratifs pour la plupart répétitifs, à faible valeur ajoutée, qu'on peut automa‐ tiser, accélérer, pour réduire l'intervention humaine, ex‐ plique la directrice du Centre d’expertise en intelligence ar‐ tificielle, analytique et en au‐ tomatisation au ministère de la Cybersécurité et du Numé‐ rique, Sarah Gagnon-Tur‐ cotte.
On va commencer par des projets plus petits, qui ne touchent pas les services es‐ sentiels et qui sont à faible risque jusqu'à ce qu'on ait un encadrement plus formel et une expertise.
Éric Caire, ministre de la Cybersécurité et du Numé‐ rique
Ces annonces surviennent trois semaines après le dépôt du rapport Prêts pour l’IA par le Conseil de l'innovation.
Ce rapport recommandait notamment de mettre sur pied un registre public des systèmes d’IA déployés au sein de l’administration pu‐ blique. C’est maintenant chose faite, tous les minis‐ tères doivent déclarer leurs différentes utilisations de l’IA, précise le ministre.
Nous pensons que le gou‐ vernement devrait être exemplaire en la matière, donc il faut commencer par soi-même, au sein même du gouvernement, croit le mi‐ nistre Caire.
Enthousiasme nuancé
Le professeur d’informa‐ tique à l’Université du Qué‐ bec à Montréal et expert en éthique de l’intelligence artifi‐ cielle, Sébastien Gambs, croit que la création d’un registre sur l’utilisation de l’IA par Québec est plutôt positive.
En termes de transpa‐ rence pour les citoyens, c’est très bien de pouvoir avoir un registre qui dit dans tel mi‐ nistère, on a tel service d’IA, qui utilise telles données pour tel objectifs, ça aide à contribuer à la transparence pour la démocratie, croit-il.
En ce qui concerne les trois projets pilotes qui se‐ ront menés ce printemps, si c'est une bonne initiative, la prudence sera de mise, selon le professeur.
Sur le site de Données Québec, je dirais que la façon de limiter l’enjeu, c'est que ce sont des données qui sont déjà publiquement dispo‐ nibles, donc le risque est faible en cas de problème de fuite de données avec l’agent conversationnel, explique-t-il.
Quant aux projets pilotes qui visent à faciliter le traite‐ ment de la facturation et des demandes d’assurances, il est plus prudent.
Si c'est utilisé à l'interne, je pense que c'est important en tant que projet pilote que ce soit développé en coopé‐ ration avec des humains res‐ ponsables pour valider les décisions ou les inférences qui vont être faites par ces systèmes-là, estime-t-il, puisque l’algorithme devra dans ces deux cas manipuler des données plus sensibles.
Vers une diminution de la taille de l’État
Éric Caire reconnaît que l'arrivée de l'intelligence arti‐ ficielle au gouvernement risque de bouleverser l'orga‐ nisation du travail et de faire diminuer la taille de la fonc‐ tion publique.
En 2018, la CAQ promet‐ tait en campagne électorale d’éliminer 5 000 postes au sein de la fonction publique. Éric Caire compte cependant sur les départs à la retraite pour réduire la taille de l'État.