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Après les flips de maison, les flips de voitures électrique­s

- Maude Montembeau­lt

Le Sunshine State porte bien son nom en ce di‐ manche de janvier. Sous le ciel bleu de la Floride, le mercure atteint 28 degrés Celsius. Sur Ocean Drive, au volant de sa voiture de rêve, le Drummondvi­llois Bernard Pélissier ne pour‐ rait être plus heureux.

Le toit panoramiqu­e est magnifique, la finition des sièges est en cuir blanc. C'est certaineme­nt la meilleure voiture que j'aie jamais eue, ça, c'est sûr, se réjouit-il.

Sa nouvelle Hyundai Ioniq 5 électrique roule sous les palmiers de Deerfield Beach. La voix de Taylor Swift ré‐ sonne dans les haut-par‐ leurs. L’homme est comblé.

On dit que le bonheur n’a pas de prix. Est-il pour autant raisonnabl­e?

Dans le cas de M. Pélis‐ sier, on a un petit peu abusé de la situation, estime le chroniqueu­r automobile Be‐ noit Charette, qui a consulté le contrat de vente du véhi‐ cule. On a payé cher ce véhi‐ cule-là.

Retour en juin 2023. Bernard Pélissier se rend chez Seray Hyundai, à Cham‐ bly, pour un essai routier en Ioniq 6. Au retour, il tombe cependant sous le charme d’une Ioniq 5 2023 d’occa‐ sion. Je suis rentré à l'inté‐ rieur, chez le concession‐ naire, et j'ai vu la blanche, et j'ai demandé si elle était dis‐ ponible pour la vente. On m'a dit oui.

Le rapport d'historique de véhicule CARFAX stipule que le précédent propriétai­re ne l’a eue que six semaines. Puisqu’elle est usagée, Ber‐ nard Pélissier s’attend à payer le prix d’un neuve, tout au plus. On m'a laissé com‐ prendre que non.

On lui demande 69 500 $, alors que la même voiture, neuve, se détaille 61 000 $. Bref, 8500 $ de plus.

Chouchou des critiques automobile­s, la Ioniq se classe parmi les voitures électrique­s les plus popu‐ laires, notamment en raison de son autonomie de presque 500 km. La de‐ mande est forte, et l’offre, li‐ mitée.

Bernard Pélissier espère à tout le moins pouvoir bénéfi‐ cier des subvention­s gouver‐ nementales, fort alléchante­s, pour qui se tourne vers l’élec‐ trique.

Pour atteindre l’objectif de 2 millions de voitures élec‐ triques sur ses routes du Québec d’ici 2030, Roulez vert offre 7000 $ en subven‐ tions. Pour son pendant fé‐ déral, c’est 5000 $. Les incita‐ tifs totalisent donc 12 000 $.

Pour la fameuse subven‐ tion, évidemment, je l'ai po‐ sée cette question-là et on m'a dit que non, parce que quelqu'un avait acheté la voi‐ ture avant, se rappelle le snowbird.

À qui profite l’aubaine de 12 000 $ obtenue pour une voiture utilisée seulement six semaines?

Bien que le programme stipule qu’il ne finance pas l’achat d’un véhicule si le seul but est la revente, rien n'oblige les bénéficiai­res du rabais à rester propriétai­res de la voiture. Une faille dans le programme, estime Benoit Charette.

Le Drummondvi­llois est du même avis. Son expé‐ rience démontre qu’il est possible d’acheter un véhi‐ cule électrique neuf, d’encais‐ ser la subvention gouverne‐ mentale et de ne rouler que quelques kilomètres avant de le revendre.

Mais l'acquéreur suivant, lui, s'en trouve privé.

M. Pélissier a non seule‐ ment payé sa Ioniq plus chère qu’une neuve, mais il n’a pas eu droit à la subven‐ tion. Selon Benoit Charette, le surcoût payé s’élève à 20 496 $.

Je ne peux pas blâmer les concession­naires d'essayer de faire de l'argent, soupire M. Pélissier.

La facture a retracé le pré‐ cédent propriétai­re. Il nous a indiqué avoir été insatisfai­t de l’autonomie du véhicule et avoir échangé la Ioniq 5 pour une voiture à essence.

Si le programme était plus structuré, mieux réglementé et qu’il avait plus de dents, ces situations-là ne pour‐ raient pas se produire. Il n'y aurait pas d'avantages, ana‐ lyse Bernard Pélissier.

Benoit Charette partage cette analyse. Ce n'est pas illégal. C'est ça le problème.

Il y a des situations un peu loufoques où on revend littéralem­ent un véhicule neuf sans les subvention­s en se posant la question : où est allé le 12 000 $?

Benoit Charette

Québec a prévu d'accor‐ der 663,9 millions de dollars pour la période 2023-2028 en aides financière­s pour le programme Roulez vert.

Seray Hyundai a refusé de répondre à nos questions.

77 kilomètres à l’odo‐ mètre, mais considérée comme usagée

Pour la planète et pour leur portefeuil­le, Chantal Ga‐ gné et Jean-François Matte veulent délaisser la pompe à essence pour le branche‐ ment électrique, et ce, en Hyundai Ioniq. À la recherche de l’effet WAH, le couple se rend d’abord chez un conces‐ sionnaire. On s'est rendu compte qu'il fallait attendre deux ans.

Exaspérés par les délais, ils se mettent à éplucher, avec frénésie, les annonces de véhicules avec peu de ki‐ lométrage.

En janvier, une Ioniq 5 de 77 km est annoncée à 49 500 $ sur le site Internet de Bros‐ sard Hyundai. Affichée comme d’occasion mais avec si peu de kilomètres à l’odo‐ mètre, le Montréalai­s consi‐ dère le cas douteux. Il ques‐ tionne un des vendeurs de Brossard Hyundai et enre‐ gistre ses réponses.

M. Matte : C’est par rap‐ port à la subvention. Est-ce que dans ce contexte on peut l’avoir? Le vendeur : C'est une personne qui a fait une commande pour justement avoir la subvention et il l'a re‐ vendue.

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