Protection du caribou : l’industrie récréotouristique tape du pied
L’industrie récréotouris‐ tique de la Haute-Gaspésie demande à Québec de dé‐ poser sa stratégie de pro‐ tection du caribou, pour avoir plus de prévisibilité.
L’hiver 2024 passera à l’histoire avec des tempéra‐ tures bien au-dessus des normales saisonnières et peu de précipitations de neige sur tout le territoire gaspé‐ sien.
Les entreprises qui offrent des expéditions guidées de ski hors-piste dans les ChicChocs se désolent que les seuls sommets enneigés où ils pourraient encore skier leur soient interdits d’accès, car ce territoire fait partie de l’aire de protection du cari‐ bou montagnard.
On se doit d’aller plus haut, plus loin, pour être ca‐ pable d’opérer, sans quoi on n’est pas capable d’avoir une rentabilité qui permet de vivre puis d’assurer des em‐ plois à long terme, affirme Antoine Blier, directeur géné‐ ral de la coopérative de plein air RAC.
Les acteurs de l’industrie récréotouristique attendent donc impatiemment les dé‐ tails de la stratégie de protec‐ tion du caribou que Québec promet depuis 2019.
Antoine Blier exige une meilleure prévisibilité. On de‐ mande justement le dépôt de la stratégie pour savoir : estce qu’on va pouvoir dévelop‐ per, oui ou non, dans l’aire du caribou? Ça va être quoi les directives?, déclare-t-il. On veut être entendu pour faire valoir le point qu’il y a des so‐ lutions qui existent pour al‐ lier protection du caribou et développement récréotouris‐ tique.
Les limitations actuelles nuisent aux petites entre‐ prises récréotouristiques. Plusieurs seront déficitaires cette année à cause de l’hiver difficile.
En ce moment, il y a plu‐ sieurs entreprises qui ont des difficultés à vendre leur produit entre autres à cause du réchauffement climatique, mais aussi parce que la qua‐ lité de la neige à basse alti‐ tude n’est plus là, affirme François Roy, skieur horspiste.
Le ski est précaire, mais la vitalité économique de la ré‐ gion aussi.
J’ai l’impression que toutes les décisions de ges‐ tion de territoire se prennent par des gens qui gravitent autour des biologistes, et que le milieu social, social, économique de la région n’est pas entendu, ajoute M. Roy.
Selon lui, les entreprises de services récréotouris‐ tiques qui ont bourgeonné en Haute-Gaspésie au cours des cinq dernières années se retrouvent dans une situa‐ tion précaire, parce qu’elles ne peuvent pas faire d’inves‐ tissements, ne sachant pas ce que contient la fameuse stratégie.
On est tout le temps dans l’expectative de se faire tout couper d’un coup, que le plan de redressement du caribou vienne fermer la porte à notre croissance, notre déve‐ loppement, témoigne Fran‐ çois Roy.
Des solutions
Selon François Roy, un système de gestion dyna‐ mique, d’ouverture et de fer‐ meture efficace de portions du territoire avec une vo‐ lonté réelle de le mettre en place serait déjà un bon pas en avant pour protéger la harde de caribous monta‐ gnards qui se chiffre à près d’une trentaine.
Puis une planification des terrains skiables qui ne se fait pas juste par les gestion‐ naires actuels de territoire, mais aussi en concertation avec l’industrie récréotouris‐ tique hivernale, ajoute-t-il.
Le préfet de la MRC de la Haute-Gaspésie, Guy Bernat‐ chez, appuie l'industrie ré‐ créotouristique et il s’impa‐ tiente. Là, le supplice de la goutte, ça suffit. Il faut que le gouvernement dépose sa stratégie de protection du ca‐ ribou au plus sacrant!, s’ex‐ clame-t-il.
Vous savez, en Haute-Gas‐ pésie, on a développé une expertise hors du commun par rapport au récréotou‐ risme non motorisé sur notre territoire, souligne le préfet. La "non-sortie" de la stratégie de caribou fait que ces entre‐ prises-là sont dans le néant.
Il y a des familles qui sont venues pour le plein air en Gaspésie, il y a des jeunes qui déménagent, il y a un élan, il y a un mouvement qui se crée, témoigne Antoine Blier qui s’est lui-même ins‐ tallé en Haute-Gaspésie il y a six ans notamment pour le ski hors-piste. On est en train de faire quelque chose de su‐ per beau, puis c’est super fra‐ gile en ce moment, avec les conditions qu’on nous im‐ pose.
En attendant, François Roy, lui, espère des bordées de neige au mois de mars.
Normalement, il neige plus en mars qu’en février. Si ça peut revenir un peu plus près des normales de saison, on va pouvoir skier pour finir [la saison] en beauté.