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Heather O’Neill défend une oeuvre québécoise au combat des livres Canada Reads

- Élise Jetté

Depuis quatre jours, la ro‐ mancière montréalai­se Heather O’Neill défend le roman québécois L’avenir de Catherine Leroux, qui est toujours dans la course pour remporter la compéti‐ tion télévisée Canada Reads, diffusée sur CBC.

Un livre a été éliminé chaque jour dans le cadre de ce combat des livres en di‐ rect, et c’est jeudi que nous saurons si The Future (la ver‐ sion traduite en anglais du livre de Catherine Leroux) remporte les honneurs.

Depuis lundi, autour d’une table ronde, l’animateur Ali Hassan accueille ses cinq pa‐ nélistes. Le public sait depuis plusieurs mois quels sont les cinq livres à lire pour pouvoir entrer dans le combat des livres canadien-anglais.

Depuis lundi s'affrontent dans le ring l’actrice Kudak‐ washe Rutendo, qui présente le livre Shut Up You're Pretty de Téa Mutonji (le deuxième livre qui est toujours dans la course), la créatrice et in‐ fluenceuse de mode Mirian Njoh, qui vante les mérites de Meet Me at the Lake de Carley Fortune, l’ancien maire de Calgary Naheed Nenshi, qui soutient Denison Avenue de Christina Wong et Daniel Innes, le joueur de volley-ball Dallas Soonias, qui souhaite faire gagner le livre Bad Cree de Jessica Johns, et l’autrice émérite Heather O'Neill, qui tient en ses mains The Fu‐ ture, la version anglaise (tra‐ duite par Susan Ouriou) du roman L’avenir de Catherine Leroux.

Il y a une ambiance très excitante qui entoure ce dé‐ bat, dit Heather O’ Neill, en entrevue. Quand ton livre fait partie de la sélection, ça change tout. En 2007, son premier roman, Lullabies for Little Criminals (La ballade de Baby), avait été choisi pour le combat Canada Reads par

John Kristjan Samson (chan‐ teur du groupe The Weaker‐ thans).

Il avait soutenu mon livre dans le débat et j’avais ga‐ gné, lance l’autrice, réjouie. Je me souviens d'être entrée à la mairie de Toronto quand je venais de gagner ce prix et il y avait une immense tablette sur laquelle plusieurs copies de mon livre se trouvaient et les gens pouvaient les prendre. C’était surréalist­e pour moi et je pense que ça a changé quelque chose par rapport au succès de tous mes livres par la suite.

La lecture de tout le monde

La compétitio­n littéraire est intéressan­te à écouter et à regarder parce qu’on sent rapidement la passion qui s’empare de chaque lecteur.

Et cette frénésie est en‐ core plus intéressan­te parce que le panel n’est pas formé d’experts des livres, dit Hea‐ ther. On veut montrer aux Canadiens et aux Cana‐ diennes que tout le monde peut ouvrir un livre et en par‐ ler. En tant qu’écrivaine, je suis une exception dans le panel de cette année. La na‐ ture du concours, c’est de faire en sorte que tout le monde puisse se reconnaîtr­e quelque part parmi les gens qui débattent.

Chaque panéliste possède sa propre histoire intime avec le livre soutenu et cela fait en sorte que sa person‐ nalité finit inévitable­ment par ressortir.

Cette année, quand elle a su qu’elle se joindrait à la table ronde, il n’y avait au‐ cune autre avenue pour elle : en tant que Montréalai­se, elle voulait choisir un livre québécois français pour Ca‐ nada Reads. J’ai lu plusieurs ouvrages pour finir par choi‐ sir L’avenir de Catherine Le‐ roux, dit-elle. Je sais que la lit‐ térature québécoise a des qualités qu’on ne trouve pas ailleurs.

Il faut faire un saut dans le passé de près de 10 ans, en 2015, pour trouver un livre en français présenté dans sa version traduite à Ca‐ nada Reads. Ru, de Kim Thúy, traduit par Sheila Fischman, avait alors été défendu par le critique de cinéma Cameron

Bailey. Et il avait gagné la joute!

Au-delà de son intérêt personnel pour les livres québécois, Heather O’Neill souhaitait redonner un peu au Québec qui lui a tant donné.

J’ai passé toute ma vie à Montréal et j’ai été énormé‐ ment influencée par la littéra‐ ture francophon­e. Même si j’écris en anglais, quand on me demande d’où viennent certaines sensibilit­és aux mots qu’on ne trouve pas souvent en anglais, je ré‐ ponds toujours que c’est parce que j’ai lu beaucoup de livres québécois en français. C’est un monde magique, pour moi, la littératur­e qué‐ bécoise.

Les critères d’un bon livre

Parmi ses préoccupat­ions, il y avait d’abord le souci de sélectionn­er une oeuvre dont elle pourrait parler durant les quatre jours du débat. Ça prend beaucoup de thèmes et d’idées pour soutenir le débat longtemps, explique-telle. Ce que j’aime le plus du livre de Catherine, c’est l’idée de la communauté qui se forme dans les endroits mar‐ ginaux. Elle prend position contre cette idée que, quand il y a un désastre, tous les hu‐ mains deviennent sauvages.

Au cours de sa lecture de The Future, la panéliste a aussi apprécié la façon dont Catherine Leroux parle de la beauté dans l’enfance, même dans des contextes aty‐ piques.

Évidemment, ceux qui ont lu le livre de Catherine com‐ prendront que je ne pouvais pas éviter le sujet de la langue. Le dialogue est relevé et l’autrice réussit à exprimer l’importance de la manière dont on parle le français. C’est d’autant plus intéres‐ sant de souligner que la tra‐ duction anglaise préserve la magie entourant le thème du langage.

L’avenir se déroule dans une version alternativ­e de la ville de Détroit. Quand elle a rencontré Catherine Leroux pour préparer son débat, Heather O’Neill est partie à la découverte de cette ville. Elle m’a invitée là-bas et elle m’a montré tous les endroits qui avaient été importants dans sa recherche pour le roman. Je suivais le chemin de son imaginatio­n et c’était un ca‐ deau de voir ça, raconte-telle.

Parmi les cinq livres pré‐ sentés cette année, elle croit que The Future est celui qui utilise tous les crayons de la boîte pour faire vivre les fi‐ gures de style, les person‐ nages et leurs discours. Elle a une imaginatio­n explosive qui ressemble à peu de choses que j’ai lues, conclut Heather.

L’ultime épisode de Ca‐ nada Reads 2024 sera diffusé sur CBC Radio One, CBC TV, CBC Gem, CBC Listen et sur CBC Books ce jeudi 7 mars à 13 h.

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