Radio-Canada Info

Khinjaria acuta, le reptile marin le plus dangereux de tous les temps?

- Alain Labelle

Les mosasaures ne sont pas reconnus comme de jo‐ lies créatures, mais cer‐ tains de ces reptiles étaient plus laids que d'autres. Avec ses dents larges en forme de poignard, sa face courte et massive, sa mâ‐ choire puissante et ses yeux petits et perçants, « Khinjaria acuta pourrait bien remporter le concours de la laideur », estime le paléontolo­gue Nick Lon‐ grich, de l’Université de Bath, au Royaume-Uni.

L'allongemen­t de la partie postérieur­e de son crâne et la musculatur­e de la mâ‐ choire laissent à penser que l’animal avait une force de morsure terrible.

Nick Longrich, paléonto‐ logue, Université de Bath

Le reptile marin, qui me‐ surait de 7 à 8 mètres, était l’un des nombreux superpré‐ dateurs qui peuplaient les océans terrestres il y a 67 à 69 millions d'années.

Repères

Les mosasaures, ou Mosa‐ sauridae, vivaient au Crétacé supérieur, il y a entre 92 et 66 millions d'années. Ces reptiles sont de lointains pa‐ rents des dragons de Ko‐ modo et des anacondas ac‐ tuels. Ils ont disparu de la surface terrestre à la suite de l'impact de l’astéroïde

Chicxulub sur la côte est de l'actuel Mexique. À ce mo‐ ment, pas moins de 76 % de la vie sur la planète avait dis‐ paru, dont l’ensemble des di‐ nosaures non aviaires, des plésiosaur­es et des tortues de mer géantes, ainsi que des familles entières de pois‐ sons.

Une mine de fossiles

Le paléontolo­gue britan‐ nique et ses collègues maro‐ cains, américains et euro‐ péens ont mis au jour les restes fossilisés de l’espèce dans la mine de Sidi Chen‐ nane, au sud-est de la ville de Casablanca, au Maroc.

Dans les dernières décen‐ nies, cette mine à ciel ouvert de phosphate a fourni de nombreux fossiles d'espèces animales qui peuplaient les mers au Crétacé supérieur.

Khinjaria acuta faisait par‐ tie d'une faune extraordin­ai‐ rement diversifié­e de préda‐ teurs qui habitaient l'océan Atlantique au large des côtes marocaines, juste avant l'ex‐ tinction des dinosaures, ex‐ plique Nick Longrich dans un communiqué.

Cette découverte montre à quel point l’écosystème océanique de l’époque était radicaleme­nt différent de ce‐ lui d’aujourd’hui, puisqu’il abritait de nombreux préda‐ teurs géants. Ces animaux se nourrissai­ent de grandes proies, contrairem­ent aux écosystème­s actuels où do‐ minent quelques prédateurs, tels que les requins blancs, les orques et les léopards de mer.

Nous avons découvert plusieurs espèces dont les dents étaient fort différente­s, ce qui laisse à penser qu'elles avaient des techniques de chasse diversifié­es.

Nick Longrich, Université de Bath

Certains mosasaures avaient des dents pour per‐ cer leurs proies, et d'autres pour les couper, les déchirer ou les écraser, ajoute le pa‐ léontologu­e. Khinjaria avait une petite face pleine d'énormes dents en forme de poignard.

Des écosystème­s diffé‐ rents

L’extinction de la faune marine du Crétacé supérieur a laissé un grand vide. Cela a laissé le champ libre aux ba‐ leines, aux phoques et à des poissons comme l'espadon et le thon. Cet écosystème ap‐ paru après l'impact était tou‐ tefois fort différent du précé‐ dent, remarque Nick Lon‐ grich.

De nos jours, les chaînes alimentair­es marines ne comptent que quelques grands prédateurs, comme les orques, les requins blancs et les phoques léopards.

Il y a bien d’autres préda‐ teurs, comme les baleines à fanons et les dauphins, mais ils se nourrissen­t de plus pe‐ tites proies.

Le détail de cette décou‐ verte est l’objet d’un article publié dans la revue Creta‐ ceous Research (en anglais).

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada