Les femmes sont davantage à la barre de petites municipalités que de villes
Les femmes occupent 33 % des postes à la tête des mairies des petites munici‐ palités dans le Nord de l’Ontario.
Plus précisément, 44 des 134 municipalités réperto‐ riées en fonction de la liste établie par la Fédération des municipalités du Nord de l’Ontario et l’Association des municipalités du Nord-Ouest de l’Ontario sont dirigées par des femmes.
Un constat marquant si l’on considère les résultats d’une recherche financée par la Fédération canadienne des municipalités pour le projet Femmes canadiennes en po‐ litique locale et menée par le Baromètre municipal du Ca‐ nada de l’Université de Cal‐ gary.
Selon cette étude réalisée en 2023, les femmes oc‐ cupent 22 % des postes de mairesses dans les municipa‐ lités du Canada.
Et sur les neuf villes du Nord de l’Ontario, définies à ce titre selon le recensement et les critères de classifica‐ tion de Statistique Canada, seulement une se retrouve avec une femme à sa barre, soit celle de Timmins dirigée par la maire Michelle Boileau.
Quelques pistes de ré‐ flexion
L’hypothèse de base pour expliquer cette disparité entre les villes et les petites municipalités serait de dire que les scrutins sont peutêtre un peu plus compétitifs dans les villes, avance Anne Mévellec, professeure titu‐ laire à l’Université d’Ottawa à l'École d’études politiques.
Les femmes vont peutêtre moins fréquemment se lancer en politique quand il y a déjà beaucoup de candi‐ dats.
Anne Mévellec, profes‐ seure titulaire à l’Université d’Ottawa à l’École d’études politiques
À son avis, les petites mu‐ nicipalités rencontrent da‐ vantage de problèmes de re‐ crutement, car les gens sont moins enclins à se lancer à la tête de la municipalité, parce que c’est du bénévolat, même si la charge de travail et les responsabilités de‐ meurent importantes, pré‐ cise-t-elle.
Madeleine Tremblay, mai‐ resse de Fauquier-Strickland depuis 2006, en est un exemple concret, elle qui a été élue sans opposition jus‐ qu’aux dernières élections.
Amanda Kingsley Malo, fondatrice de l’organisme Po‐ liticsNOW dont la mission est de faire progresser l’égalité des genres en politique et de renforcer le pouvoir des femmes, s’est penchée sur la question en 2017.
Le leadership prend une autre forme dans les petites communautés, croit-elle.
Plusieurs [femmes élues conseillères ou mairesses] se sont démarquées au sein de leur communauté en diri‐ geant un événement d’enver‐ gure.
Amanda Kingsley Malo, fondatrice de PoliticsNOW
Elle cite en exemple une femme qui avait tenté d’em‐ pêcher la fermeture de son église. Malgré son échec, plu‐ sieurs gens de la commu‐ nauté l’ont ensuite appro‐ chée et encouragée à se pré‐ senter aux élections munici‐ pales.
Les femmes qui entre‐ prennent ces rôles de‐ viennent des leaders très vi‐ sibles, ce qui ouvre une ave‐ nue vers le conseil municipal, précise Mme Kingsley Malo.
Elle précise qu’au sein des petites villes, ce travail plus communautaire offre une vi‐ sibilité accrue, voire une no‐ toriété, aux femmes par op‐ position aux grands centres urbains.
Toutefois, précise Anne Mévellec, cette notoriété joue sur le profil des femmes, mais ça joue sur le profil des hommes aussi.
Beverly Nantel, mairesse de Dubreuilville, ne s’ex‐ plique pas pourquoi les pe‐ tites municipalités ont davan‐ tage de mairesses à leur tête, mais s’en réjouit.
Elle a décidé de se lancer en politique municipale forte de son expérience à la tête de son entreprise de camion‐ nage, parce que, dit-elle, je voulais m’impliquer à un plus haut niveau et apporter mon expérience en affaires à la municipalité.
On peut se croiser les bras, se plaindre et ne rien faire, mais je voulais voir du changement et y contribuer.
Beverly Nantel, mairesse de Dubreuilville
Quant à Mme Tremblay, elle s’est lancée dans l’arène en 2006 après avoir fait par‐ tie d’un comité pour embellir sa communauté.
Une expérience qui lui a confirmé l’importance d’être assise directement à la table pour en faire partie, puis faire avancer ma commu‐ nauté.
Vers la parité
Michelle Boileau, maire de Timmins, et Cheryl Fort, mai‐ resse de Hornepayne, ont ré‐ cemment créé le Caucus des femmes du Nord de l’Onta‐ rio. Le but : soutenir les poli‐ ticiennes, mairesses et conseillères, et développer des communautés en ayant en tête les femmes et les filles.
Ce qui réjouit Mmes Nan‐ tel et Tremblay qui croient que cette initiative donnera davantage confiance aux femmes pour se lancer en politique municipale.
Dernièrement, je vois que beaucoup plus de femmes [...] s’impliquent [...] sont plus intéressées [...] et se posent plus de questions à savoir comment est-ce que la poli‐ tique municipale fonctionne, dit Mme Tremblay.
On s’en vient tranquille‐ ment, les femmes pro‐ gressent puis je pense qu’elles vont prendre leur place.
Madeleine Tremblay, mai‐ resse de Fauquier-Strickland
Anne Mévellec rappelle la présence de Valérie Plante et d’Olivia Chow à la tête de grandes métropoles. Des mo‐ dèles, selon elle, dont la pré‐ sence crée un effet un petit peu boule de neige dans le sens où [...] on voit des gens qui nous ressemblent occu‐ per des positions de pouvoir.
D’après ce qu’elle constate au Québec, elle explique que la parité hommes-femmes est en voie de devenir réalité, surtout au sein des nouvelles générations.
Chez les élus de moins de 35 ans, on est dans la zone paritaire.
Anne Mévellec, profes‐ seure titulaire à l’Université d’Ottawa à l’École d’études politiques
Une observation qu’elle juge encourageante, même si elle concède que la moyenne d’âge reste assez élevée dans le monde municipal.
Ailleurs sur le web :
L'étude financée par les Femmes canadiennes en po‐ litique locale sur la représen‐ tation des femmes dans les postes élus des municipalités