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Théâtre : une première à Moffet attire une centaine de spectateur­s

- Bianca Sickini-Joly Médiation culturelle

Une centaine de personnes se sont donné rendez-vous mercredi soir à Moffet, au Témiscamin­gue, pour la première de la pièce de théâtre Michelin.

Coproduite notamment par le Théâtre du Tandem de Rouyn-Noranda et par le Grand Théâtre de Québec, la pièce aborde la réalité du mi‐ lieu agricole. Plusieurs ont salué l'initiative de décentra‐ liser le théâtre profession­nel pour le faire voyager en ré‐ gion.

L’auteur et interprète Mi‐ chel-Maxime Legault se ques‐ tionne, dans son monologue, sur le virage qu'aurait pris sa vie s'il s'était appelé Michelin, comme le souhaitaie­nt ses parents fermiers.

Devant lui, une centaine de spectateur­s de différents horizons s'esclaffent, alors que d'autres plongent dans leurs propres souvenirs. C'est le cas de l'agricultri­ce Ma‐ rianne Morency Landry.

Moi, c'est surtout le bout qu'il a parlé des morts ani‐ males qui m'a vraiment tou‐ chée, exprime-t-elle. Même si l’histoire de l’acteur prend place à Saint-Polycarpe, en Montérégie, les réalités sont similaires partout, selon l’agricultri­ce.

Nourrir une oeuvre à partir des champs

L'équipe de Michelin avait rencontré des agriculteu­rs l'été dernier à Moffet, La Motte et Sainte-GermaineBo­ulé afin d'imprégner le texte de la réalité rurale.

Il était donc logique pour le directeur artistique au Théâtre du Tandem, Alexandre Castonguay, d'amorcer la tournée dans un village.

On demande aux agricul‐ teurs de nous faire des pa‐ niers de légumes bios et de nous amener ça en ville. Je me dis, pourquoi on ne ferait pas des paniers de théâtre et qu'on ne leur amènerait pas ça en campagne?

Alexandre Castonguay Michel-Maxime Legault et la metteuse en scène MarieThérè­se Fortin étaient una‐ nimes : la réaction du public valait largement les nom‐ breuses démarches artis‐ tiques. Les gens nous disent : oui, on s’est reconnus, relate Mme Fortin.

C’est une réaction franche et c’est ça qui est beau, ren‐ chérit M. Legault à l’issue de sa première représenta­tion.

Le maire de Moffet, Alexandre Binette, était visi‐ blement fier de l'engoue‐ ment. Voir du théâtre profes‐ sionnel à Moffet, qui l'eut cru?, lance-t-il, le sourire aux lèvres.

On a quelque chose à donner même si on est un petit village. On est capables d’être pertinents et d’influen‐ cer une telle oeuvre artis‐ tique. C’est magique, pour‐

suit M. Binette.

Des ateliers de théâtre inspirés par Michelin étaient animés par Alexandre Cas‐ tonguay. L'occasion rêvée pour Jean-Pierre Marcotte, qui a toujours voulu faire du théâtre.

J’aimerais développer en‐ core plus ce côté artistique qu’on a chacun en nous, mais qu’il faut juste laisser aller, fait-il valoir.

Le résident de Moffet compte mettre à profit au Club de l'âge d'or ce qu'il a appris afin de développer des ateliers pour prévenir la violence et la fraude chez les personnes âgées.

L’enseignant­e Isabelle Se‐ megen a participé aux ate‐ liers de jeu et d’écriture avec son fils avant d’emmener son groupe d’élèves du primaire et du secondaire.

Je pense que ça leur a permis d’aller beaucoup plus loin que ce qu’on fait habi‐ tuellement en classe, se ré‐ jouit-elle.

L’objet d’une recherche à l’UQAT

La chercheuse Aline Du‐ noyer et la chargée de cours Madeleine Lefebvre conviaient les intéressés à une discussion de groupe le mardi suivant pour un projet de recherche en travail social à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamin­gue (UQAT).

Ce qui nous intéresse, c’est vraiment d’aller voir ce que ça mobilise chez les gens. Quelles émotions ça leur fait vivre, qu'est-ce que ça fait bouger aussi au ni‐ veau de l'identité de la com‐ munauté?

Aline Dunoyer, étudiante à l'UQAT

Ces données vont être analysées pour voir les effets que cela a sur le milieu, le fait qu’une pièce de théâtre pro‐ fessionnel­le soit diffusée dans un lieu qui n’est pas tra‐ ditionnel pour le théâtre, ajoute Madeleine Lefebvre.

Un événement comme ce‐ lui-là peut avoir beaucoup d’impact à l’échelle nationale, selon Mme Lefebvre.

C’est un projet porteur qui, je pense, va peut-être mener à des changement­s culturels au niveau québé‐ cois, estime-t-elle.

Des rencontres seront or‐ ganisées tout au long de la tournée en Abitibi-Témisca‐ mingue.

Pas seulement pour les agriculteu­rs

Bien qu'ils habitent Mof‐ fet, Samuel Parent-Baillar‐ geon et Cynthia Amesse connaissen­t peu le milieu agricole, mais ont trouvé le monologue très intéressan­t.

Moi, venant de l’Abitibi, je n’ai jamais vécu sur une ferme. Il y a beaucoup de ré‐ férences que je n’ai pas com‐ prises, mais c’est comme une immersion, indique Mme Amesse.

Michelin s’adresse à tous les publics et ne sera pas adaptée pour les citadins moins familiers avec le monde agroalimen­taire. Les villes sont peuplées de gens qui ont quitté leur village, rappelle Alexandre Caston‐ guay.

Je pense que l’écoute va être différente, les références vont être différente­s, recon‐ naît Marie-Thérèse Fortin.

Le spectacle poursuit sa route à Ville-Marie et passera par Québec avant de revenir dans la région et de retour‐ ner à Montréal.

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