Radio-Canada Info

Le chef de cabinet du ministre Mendicino avait été prévenu du transfert de Bernardo

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Le chef de cabinet de l’an‐ cien ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino avait été informé du trans‐ fert de Paul Bernardo par le commissair­e du Service correction­nel Canada deux semaines avant qu’il soit effectué. Toutefois, le mi‐ nistre n’a été mis au cou‐ rant qu’après que l’opéra‐ tion eut été complétée, a appris CBC News.

Un courriel émanant du Bureau du Conseil privé, ob‐ tenu par CBC News, montre que Service correction­nel Ca‐ nada (SCC) a été en contact sept fois avec le bureau du ministre Mendicino entre fé‐ vrier et mai 2023 au sujet du transfert de Bernardo d’une prison à sécurité maximale vers une prison à sécurité moyenne. Le ministre n’a pas été informé de ces échanges.

Un de ces contacts a été effectué auprès de l’équipe de communicat­ions du mi‐ nistre, qui a été avisée d’un possible changement dans les conditions de détention du tueur en série et violeur trois mois avant son trans‐ fert.

Tim Danson, un avocat qui représente les familles de deux victimes de Bernardo, dit que c’est vraiment inquié‐ tant qu’autant de communi‐ cations n’aient jamais atteint le ministre.

C’est assez incompréhe­n‐ sible, a réagi M. Danson. Tout le monde savait que ce serait inacceptab­le pour les Cana‐ diens alors ils ont procédé pour que le transfert soit un fait accompli.

Bernardo a été reconnu coupable du meurtre au pre‐ mier degré des adolescent­es Kristen French et Leslie Ma‐ haffy en 1995. Il a également été reconnu coupable d’ho‐ micide involontai­re pour son rôle dans la mort de Tammy Homolka, qui était âgée de 15 ans.

Il a été condamné à une peine de prison à vie sans possibilit­é de libération conditionn­elle avant 25 ans, et a été désigné comme dé‐ linquant dangereux.

Les victimes informées le jour même

Les familles de victimes sont outrées de ne pas avoir été informées du transfert de

Paul Bernardo vers une pri‐ son à sécurité moyenne avant le 29 mai 2023, soit le jour même de son déplace‐ ment.

En juin 2023, CBC News avait rapporté que le bureau du ministre de la Sécurité pu‐ blique savait depuis plus de trois mois que Bernardo pourrait être transféré, mais que M. Mendicino n’en avait été informé que le lende‐ main de l’opération. L’histoire a suscité de nombreuses ré‐ actions politiques et appels à la démission du ministre Mendicino.

Avant d’être éjecté du ca‐ binet, M. Mendicino a affirmé qu’il n'avait pas été avisé et qu’il aurait dû l’être aussitôt que l’informatio­n avait été transmise à son bureau.

Il a aussi émis une direc‐ tive qui oblige maintenant à informer le ministre de la Sé‐ curité publique de tels trans‐ ferts, et à prévenir les vic‐ times.

La chaîne des événe‐ ments

Par le biais d’une de‐ mande d’accès à l’informa‐ tion, CBC News a obtenu des centaines de pages de cour‐ riels internes du Bureau du Conseil privé au sujet du transfert de Paul Bernardo. Ces courriels contiennen­t une séquence d’événements détaillée établie par le SCC et le Bureau du Conseil privé (BCP).

Le 5 juin 2023, le ministre Mendicino a dit que la déci‐ sion de transférer Bernardo était choquante. Dès le len‐ demain, la greffière au Bu‐ reau du Conseil privé de l’époque, Janice Charette, a demandé à son équipe de trouver pourquoi le ministre n’avait pas été mis au cou‐ rant plus tôt de cette délicate opération.

Dans les jours suivants, un employé du BCP a de‐ mandé au Service correction‐ nel Canada de lui fournir ra‐ pidement une chronologi­e des événements.

Une séquence des événe‐ ments, comprenant toutes les communicat­ions entre le BCP et SCC, a ensuite été éta‐ blie. Selon ce document, le bureau du ministre a été le premier à avoir été informé du possible transfert de Ber‐ nardo, le 27 février 2023, lors d’une réunion.

D’autres informatio­ns ont été communiqué­es au bu‐ reau du ministre le 2 mars, soit le nom, la date, le trans‐ fert, et le changement dans le niveau de sécurité du dé‐ tenu.

La commissair­e de Service correction­nel Canada, Anne Kelly, aurait informé le chef de cabinet du ministre Men‐ dicino du transfert de Ber‐ nardo le 16 mai, pendant une réunion.

Le 25 mai, le commissair­e adjoint responsabl­e du ser‐ vice aux victimes à SCC a pré‐ venu le bureau du ministre de la date du transfert de Bernardo. La même journée, la responsabl­e des communi‐ cations à SCC a fourni au bu‐ reau du ministre une note à l’attention des médias pour les aviser que le transfert au‐ rait lieu le 29 mai.

Le jour de l’opération, le bureau du ministre a appelé SCC pour expliquer les rai‐ sons du transfert. Il a ensuite été prévenu lorsque le dépla‐ cement du détenu a été com‐ plété.

Selon la séquence des événements, M. Mendicino a été prévenu le 30 mai du transfert de Bernardo du pé‐ nitencier de Millhaven, en Ontario, à celui de La Ma‐ caza, au Québec.

Changement­s au bureau du ministre

Plusieurs membres du personnel qui ont travaillé sur le dossier au bureau de Mendicino ont changé de fonction ou ont quitté le gou‐ vernement. Le bureau actuel de la Sécurité publique dit ne pas pouvoir commenter le dossier.

L’an dernier, un porte-pa‐ role de M. Mendicino avait expliqué que le ministre n’avait pas été avisé car des employés de son bureau exa‐ minaient les options pos‐ sibles pour faire changer la décision, mais ont finalement appris qu’il n’y en avait pas.

Quand le personnel du bureau a informé le ministre du transfert, le 30 mai, il a aussi mentionné son manque d’autorité pour in‐ fluencer la décision, selon des informatio­ns fournies à CBC News par un porte-pa‐ role de M. Mendicino.

SCC a dit à CBC qu’il avait suivi le protocole de notifica‐ tion et qu’il avait depuis ren‐ forcé les procédures de par‐ tage d’informatio­n avec le bureau du ministre.

D'après un reportage d'Ashley Burke, de CBC News

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