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Recrutemen­t à la GRC : « On est sur une pente ascendante », dit son commissair­e

- Rosanna Tiranti

Quand il a pris les rênes de la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC), en mars 2023, Mike Duheme savait que le défi de ce nouveau mandat serait de taille. Gouvernanc­e, recrute‐ ment, allégation­s de harcè‐ lement parmi ses rangs : depuis quelques années, la GRC est aux prises avec des problèmes internes. C’est à M. Duheme que revenait la mission de s’y attaquer.

Avec 36 ans d’expérience au sein de la GRC, il en fallait davantage pour décourager ce natif de Chambly. Après près d'un an à la tête de la GRC, le commissair­e dresse, en entrevue aux Coulisses du pouvoir, un bilan des pro‐ blèmes qui lui donnent du fil à retordre et des aspects pour lesquels la situation s’est améliorée.

En tête de liste : le recru‐ tement.

On voit que les gens sont moins intéressés par le tra‐ vail de la police. [...] C'est un changement au niveau de la société, ou je ne sais pas si c'est l'attention médiatique que la police s’est souvent at‐ tirée. C'est un travail difficile, souvent scruté à la loupe.

Mike Duheme, commis‐ saire de la Gendarmeri­e royale du Canada

Selon des chiffres tirés d’une étude sur le recrute‐ ment menée par la Fédéra‐ tion de la police nationale, entre 2021 et 2022, la GRC a reçu 9822 candidatur­es, contre 11 800 candidatur­es lors de l'exercice précédent, soit une baisse de presque 17 %.

S’il avoue que la question du recrutemen­t lui a fait perdre le sommeil, le com‐ missaire semble l’avoir re‐ trouvé, car la situation s’est nettement améliorée, selon lui. Il reste toutefois à main‐ tenir la cadence.

On est sur une pente as‐ cendante, on est dans une bonne position, assure-t-il.

Une des raisons : un simple changement dans la politique de recrutemen­t de la GRC concernant la mobi‐ lité. Désormais, les nouvelles recrues ne sont plus obligées d’accepter un poste n’im‐ porte où au Canada.

Cette mesure a contribué à changer les choses, selon M. Duheme, et a permis d'at‐ tirer des recrues aux profils variés, parfois plus âgées, avec des familles, un foyer et des engagement­s financiers.

Ce changement a aussi permis d'améliorer l’équilibre [entre la] vie familiale et [la] vie profession­nelle, élément clé pour assurer la rétention des recrues.

L’épineuse question de l’ingérence étrangère

De but en blanc, s’il y a un autre problème qui préoc‐ cupe Mike Duheme depuis quelques années, c’est bien l’ingérence d’entités étran‐ gères.

Cette question fait d'ailleurs l'objet d’une en‐ quête publique. La juge Ma‐ rie-Josée Hogue, qui a été choisie pour présider cette enquête, a le mandat de véri‐ fier l'intégrité des deux der‐ nières élections fédérales (2019 et 2021). Elle doit pro‐ duire un rapport intermé‐ diaire d’ici la fin du mois de mai.

La menace change. Ce qu'on voit aujourd'hui, ce n'est pas ce qu'on voyait. [...] La dynamique, l'évolution du [paysage] en sécurité natio‐ nale a changé [radicaleme­nt].

Mike Duheme, commis‐ saire de la Gendarmeri­e royale du Canada

Selon le commissair­e, son organisati­on a dû s’ajuster pour faire face à plusieurs types de menaces envers la sécurité nationale et d’ingé‐ rences qui proviennen­t de différente­s directions : de l’in‐ térieur du pays, de l’étranger et en ligne. La multiplici­té des sources de ces menaces complique les enquêtes et brouille les pistes, mais n’ar‐ rête pas pour autant le travail de la GRC.

Selon le commissair­e, l’en‐ quête en cours sur le meurtre en juin dernier de Hardeep Singh Nijjar, pré‐ sident d’un temple sikh de Surrey, en banlieue de Van‐ couver, progresse favorable‐ ment.

Cet événement avait causé une onde de choc jus‐ qu’à la Chambre des com‐ munes. Justin Trudeau avait soupçonné le gouverneme­nt indien d'avoir commandité ce meurtre.

Chaque scène de crime a sa particular­ité et il y en a qui sont plus complexes que d'autres, souligne Mike Du‐ heme.

Alors qu’une poursuite en diffamatio­n a été lancée contre la GRC, l'enquête sur les « postes de police » chi‐ nois progresse elle aussi, se‐ lon les dires du commissair­e Duheme.

Menaces en ligne envers des élus

Un autre phénomène croissant qui inquiète le com‐ missaire Duheme est la vio‐ lence en ligne et le harcèle‐ ment contre les parlemen‐ taires.

Je n’ai jamais vu autant de menaces ou d'insultes envers les élus sur Internet, constate-t-il. M. Duheme y voit un changement de so‐ ciété où le public, confortabl­e derrière un ordinateur, écrit ou profère des menaces sur les réseaux sociaux.

Des menaces en ligne quotidienn­es peuvent pous‐ ser certains élus à quitter la vie politique, particuliè­re‐ ment dans la sphère munici‐ pale, où la proximité avec le public est la plus grande.

À ceux qui croient que tout leur est permis derrière leur clavier, le commissair­e Duheme lance un avertisse‐ ment : On n’en parle pas sou‐ vent, [mais] on a beaucoup de succès à retracer ces gens-là et à porter des accu‐ sations.

Cet épisode des Coulisses

sera diffusé di‐ manche à 11 h sur ICI RDI et sur ICI Télé.

du pouvoir

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