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La CAQ relativise l’ampleur et l’impact du déficit prévu pour 20242025

- Jérôme Labbé

La Coalition avenir Québec (CAQ) se défend d'avoir présenté mardi le budget le plus déficitair­e de l'histoire du Québec.

S'il est vrai qu'en chiffres absolus, aucun autre gouver‐ nement n'a jamais fait état d'un manque à gagner aussi important, le Parti libéral du Québec (PLQ) et le Parti qué‐ bécois (PQ) ont fait bien pire dans les années 1980 et 1990, a fait valoir le premier ministre François Legault en point de presse mercredi avant-midi.

Le budget 2024-2025 dé‐ posé mardi à l'Assemblée na‐ tionale prévoit un déficit de 11 milliards de dollars, soit 1,9 % de l'économie. Or, libé‐ raux et péquistes ont déjà présenté des budgets pré‐ voyant des déficits dépassant les 3 % à une époque où le produit intérieur brut (PIB) était moins élevé qu'aujour‐ d'hui, a souligné M. Legault.

La Loi sur l'équilibre bud‐ gétaire, instaurée par le gou‐ vernement Bouchard en 1998, impose en outre aux gouverneme­nts d'aujourd'hui de rembourser la dette en puisant dans le Fonds des gé‐ nérations, une obligation qui n'existait pas auparavant, a rappelé le premier ministre.

En faisant fi de ce rem‐ boursement, le déficit du budget déposé mardi s'éta‐ blirait plutôt à 8,8 milliards de dollars, soit 1,5 % du PIB, a-t-il aussi plaidé, qualifiant ce taux de raisonnabl­e.

N'empêche, l'ampleur du manque à gagner pour 20242025 - plus élevé que celui prévu au tout début de la pandémie de COVID-19, en 2020-2021 - surprend.

À 11 milliards de dollars, le déficit prévu aujourd'hui est presque quatre fois plus important que les 2,9 mil‐ liards anticipés pour la même année financière lors du dé‐ pôt du budget précédent, en 2023.

Questionné à savoir s'il pourrait inciter les agences de notation à prononcer une décote qui aurait pour effet d'augmenter les taux d'inté‐ rêt imposés au gouverne‐ ment, le ministre des Fi‐ nances du Québec, Eric Gi‐ rard, s'est fait rassurant, mer‐ credi, disant s'attendre à ce qu'elles reconnaiss­ent que la situation actuelle est difficile.

Présenteme­nt, notre pers‐ pective est stable [partout], a-t-il aussi rappelé, expli‐ quant qu'avant d'être déco‐ tés, les gouverneme­nts re‐ çoivent normalemen­t des avertissem­ents sous forme de perspectiv­e négative.

Par courtoisie, les agences de crédit ont été avisées de l'ampleur du déficit la veille du dépôt du budget, a indi‐ qué M. Girard. La plupart d'entre elles se prononcero­nt à l'issue de rencontres for‐ melles qui auront lieu au mois de mai, a-t-il expliqué.

Selon le ministre, les agences devraient voir d'un bon oeil le maintien des ob‐ jectifs de retour à l'équilibre budgétaire et de réduction du poids de la dette fixés par son gouverneme­nt.

Le budget présenté mardi, cela dit, n'inclut aucun plan chiffré laissant croire que le Québec parviendra comme espéré à renouer avec le défi‐ cit zéro au plus tard en 20292030. Il prévoit aussi que le poids de la dette continuera d'augmenter jusqu'en 2026.

MM. Legault et Girard ont par ailleurs défendu mer‐ credi les baisses d'impôts dé‐ crétées l'an dernier qui, selon les partis d'opposition, au‐ raient pu permettre de ré‐ duire le déficit anticipé pour 2024-2025.

C'était nécessaire de le faire à cause de l'augmenta‐ tion du coût de la vie, a dé‐ claré le premier ministre en point de presse, parlant d'un choix stratégiqu­e et respon‐ sable.

M. Legault a même laissé entendre qu'il pourrait pour‐ suivre dans la même veine advenant sa réélection en 2026.

Je pense qu’on doit effecti‐ vement regarder pour conti‐ nuer à [baisser] les impôts des Québécois, parce que les impôts au Québec sont dans le plafond, a-t-il convenu mercredi, soutenant que le poids du régime fiscal de la province nuisait à son écono‐ mie.

Le premier ministre a aussi profité d'une question en Chambre pour lancer une flèche au PQ, mercredi, affir‐ mant sans ambages que le parti souveraini­ste, critique des baisses d'impôts édictées l'an dernier, n'hésiterait pas à augmenter ceux-ci pour ré‐ duire le déficit en cas de vic‐ toire aux prochaines élec‐ tions.

Une telle réponse a provo‐ qué l'indignatio­n du chef du troisième groupe d'opposi‐ tion, Paul St-Pierre Plamon‐ don. Le Parti québécois ne s'est pas engagé à hausser les impôts, il a simplement [prédit] que ça donnerait le résultat qu'on a aujourd'hui, c'est-à-dire [un déficit de] 11 milliards, s'est-il défendu.

Les libéraux, de leur côté, ont à nouveau accusé les ca‐ quistes d'être devenus les kings du déficit, en référence àla controvers­ée subvention de 5 millions de dollars an‐ noncée l'an dernier pour or‐ ganiser deux matchs prépa‐ ratoires de l'équipe améri‐ caine de hockey à Québec, l'été prochain.

En point de presse, son chef par intérim, Marc Tan‐ guay, a eu des mots très durs à l'endroit du gouverneme­nt, allant même jusqu'à compa‐ rer la situation actuelle à une soue à cochons.

Selon lui, la CAQ de Fran‐ çois Legault aurait tout inté‐ rêt à s'inspirer des années Couillard pour redresser la barre des finances publiques, et ce, même si la « rigueur budgétaire » des libéraux d'alors avait été décriée par une bonne partie de la so‐ ciété civile et par l'opposition.

Tout n'était pas parfait, bien évidemment. Un gou‐ vernement parfois peut se tromper. Mais chose cer‐ taine, il y avait une rigueur, il y avait une analyse pour s'as‐ surer que le dollar qui a été investi allait être optimisé, a argumenté M. Tanguay, mer‐ credi.

Et la preuve, encore une fois, est dans le pudding : nous avions de meilleurs ser‐ vices quand on a quitté le gouverneme­nt, a-t-il soutenu en point de presse.

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