Radio-Canada Info

Un an après l’incendie au Vieux-Montréal, la famille d’une des victimes exige des réponses

- Pascal Robidas

La famille de Charlie La‐ croix, une des sept per‐ sonnes tuées par l'incendie criminel survenu dans le Vieux-Montréal il y a un an, se réunit aujourd'hui pour rendre hommage à cette jeune femme.

On veut se rappeler nos plus beaux souvenirs. Ce sera émotif, mais je ne sou‐ haite pas que ce soit triste. Charlie n'aurait pas voulu nous voir pleurer, témoigne Louis-Philippe Lacroix, le père de la jeune femme dont le visage a incarné le drame humain de l'incendie criminel le plus meurtrier depuis près de 50 ans à Montréal.

La salle dans laquelle il nous accueille doit servir dans quelques heures de lieu de recueillem­ent pour la fa‐ mille Lacroix et ses proches. Aucun discours n'est prévu, mais il y aura un goûter et un montage vidéo des plus beaux souvenirs de sa fille.

C'est 18 ans de vie qu'on se remémore. Il n'y a pas un moment en particulie­r. À l'étape où on en est, c'est l'ensemble de sa vie qu'on se rappelle, ajoute le père en‐ deuillé, qui prend la parole pour la première fois devant la caméra d'un média.

Il faut dire que la date du 16 mars est lourde de signifi‐ cation, car elle met un terme à une année en montagnes russes, tant sur le plan men‐ tal pour lui et son épouse que d'un point de vue émo‐ tionnel.

C'était une fille extrême‐ ment intelligen­te. C'était une artiste dans l'âme. Elle avait 18 ans, ajoute-t-il, la voix nouée.

Elle avait un côté artis‐ tique très développé. Elle fai‐ sait de la peinture, des toiles, des mandalas. On a accroché toutes ses toiles dans notre condo. Elle est toujours là, avec nous. Même son urne est dans la pièce.

Louis-Philippe Lacroix, père de Charlie, tuée dans l'incendie au Vieux-Montréal

La principale source d'ins‐ piration pour Louis-Philippe Lacroix et sa femme, MarieÈve, c'est leur fils, Derek, maintenant âgé de 11 ans. Lui aussi a dû apprendre à vivre sans sa grande soeur.

Quand tu as un autre en‐ fant, tu ne peux pas t'effon‐ drer, affirme simplement Louis-Philippe. Ç'a été presque aussi dur de lui an‐ noncer [la tragédie] que d'ap‐ prendre le décès de Charlie.

Les enfants sont résilients. Ils ont une force d'avancer qui est probableme­nt plus grande que la nôtre.

Le matin du 16 mars 2023 les a marqués à tout jamais. Les nombreuses tentatives infructueu­ses d'appels sur le téléphone cellulaire de Char‐ lie les ont amenés vers un constat qu'aucun parent ne veut vivre.

On est tombés dans un mode de recherche, de pa‐ nique [...]. On a communiqué avec la police, les pompiers, les ambulancie­rs, les hôpi‐ taux. [Il y a alors] plein de choses qui te passent par la tête, se rappelle M. Lacroix.

Briser le silence pour ré‐ clamer justice

Douze mois se sont écou‐ lés depuis la tragédie.

Le père d'une des sept vic‐ times a déposé un recours collectif de 22 millions de dollars au nom des proches des victimes et des survi‐ vants contre le propriétai­re de l'immeuble incendié, Emile Benamor. De son côté, ce dernier a également in‐ tenté un recours civil de 7,5 millions contre la Ville de Montréal.

Au-delà des recours au ci‐ vil qui ont été intentés, c'est le volet de l'enquête crimi‐ nelle du SPVM, qui tarde à aboutir, qui dérange LouisPhili­ppe Lacroix.

C'est la raison pourquoi je suis ici devant vous. C'est qu'on trouve que les en‐ quêtes [criminelle­s] sont vrai‐ ment très longues, puis que ça n'avance pas très vite, sou‐ ligne M. Lacroix, qui souhaite un dénouement pour que les responsabl­es de la mort de sa fille répondent de leurs actes devant la justice.

Accepter qu'il ne se passe rien au niveau criminel, au ni‐ veau des règles de location, au niveau du respect des normes incendie, c'est accep‐ ter que cet incendie était nor‐ mal. Et ça, je ne le prends pas.

Louis-Philippe Lacroix, père de Charlie, tuée dans l'incendie survenu au VieuxMontr­éal

La dernière année a plu‐ tôt été le théâtre d'une ba‐ taille médiatique entre deux quotidiens sur les dessous de l'enquête policière du SPVM, des dénouement­s que Louis-Philippe Lacroix décrit comme étant dignes d'un té‐ léroman, où il a été question d'un cafouillag­e majeur dans l'enquête pour homicides, ensuite totalement contredit par un média concurrent.

La longueur du processus fait en sorte qu'on finit tous par se poser certaines ques‐ tions sur ce qui est vrai et ce qui n'est pas vrai. [...] Bavure policière, pas de bavure poli‐ cière, on ne sait plus quoi croire. Y a tellement de chan‐ gements de situations que ça devient difficile de savoir où donner de la tête, déplore le père endeuillé.

Le nom du suspect princi‐ pal, Denis Bégin, a même été rendu public par les médias. Qualifié à deux reprises de psychopath­e par la Commis‐ sion des libération­s condi‐ tionnelles du Canada, il a pu obtenir son transfert en 2016 dans un établissem­ent à sé‐ curité minimale.

En février 2019, il a pu s'évader. Sa cavale aura duré

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