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Des épaulards qui chassent le cachalot soulèvent des questions

- Camille Vernet

Un groupe d’épaulards se nourrissan­t de cachalots, de tortues de mer et de dauphins pourrait consti‐ tuer une nouvelle popula‐ tion sur la côte ouest. Des chercheurs ont analysé le comporteme­nt de 49 épau‐ lards lors de 9 rencontres entre 1997 et 2021.

Le régime alimentair­e de ce groupe ressemble à celui des épaulards migrateurs, mais avec quelques ajouts.

Nous n'avions jamais ob‐ servé d'épaulards migrateurs chasser des cachalots. C'est unique, lance Josh McInnes, chercheur au centre de re‐ cherche sur les mammifères marins de l'Université de la Colombie-Britanniqu­e (UBC) et l'auteur principal d'une étude publiée sur le sujet.

Ces épaulards du large de la Californie et de l'Oregon ont une morphologi­e, un ha‐ bitat et un régime alimen‐ taire distincts, affirme l'étude (en anglais) parue dans la re‐ vue scientifiq­ue Aquatic Mammals en février 2024.

On a découvert des indivi‐ dus qui ne sont pas membres de familles connues. Ils n'ont pas de nom, ils ne sont pas dans nos catalogues non plus, indique Andrew Trites, co-auteur de l’étude et directeur de l'Unité de recherche sur les mammi‐ fères marins à l’UBC.

Il existe une grande diver‐ sité dans l’apparence, le com‐ portement et le régime ali‐ mentaire des épaulards dans le monde. Pour désigner ces variations, les scientifiq­ues utilisent le terme écotypes .

Trois écotypes d'épaulards habitent les eaux de la côte ouest : les résidents, les mi‐ grateurs et les épaulards de haute mer.

Morsures de requins

Cette nouvelle population d'épaulards vit dans les pro‐ fondeurs océaniques. Ils ont été aperçus dans une zone très éloignée de la côte. Nous parlons de 60 à 400 kilo‐ mètres au large, précise Josh McInnes.

Les cicatrices de morsure de requin squalelet féroce observées sur les épaulards ont été un indice clé pour dé‐ terminer leur habitat.

Le squalelet féroce est un petit parasite. Il vit en haute mer et mord le flanc des grands animaux comme les baleines, les thons et d'autres espèces de pois‐ sons. Ces blessures sont la preuve directe que ces épau‐ lards vivent principale­ment en haute mer , affirme-t-il.

Pourtant ils ne res‐ semblent pas non plus aux autres population­s d'épau‐ lards de haute mer.

Épaulards océaniques

Ces épaulards seraient-ils alors un nouvel écotype?

C'est ce qu'on ignore, sou‐ tient Andrew Trites. On sait qu'ils ressemblen­t pas mal aux écotypes migrateurs, ceux qui se nourrissen­t des mammifères marins.

Ils pourraient donc faire partie d’une sous population d’épaulards migrateurs, mais qui résiderait beaucoup plus loin de la côte. Andrew Trites les surnomme les épaulards océaniques.

Ce groupe d'épaulards présente également des dif‐ férences physiques, notam‐ ment au niveau de leurs na‐ geoires dorsales qui seraient rondes et pointues selon les individus.

La forme de la nageoire dorsale et les taches sur leur dos sont un peu différente­s. C'est ce que l'on voit souvent chez les épaulards des tro‐ piques, dit Josh McInnes.

Difficile à étudier

Les scientifiq­ues se sont basés, entre autres, sur les observatio­ns de la National Oceanic and Atmospheri­c Ad‐ ministrati­on (NOAA), l’agence américaine responsabl­e de l’étude des océans et de l’at‐ mosphère, mais aussi sur des croisières d'observatio­n des baleines.

Depuis 24 ans, on les a vus seulement 9 fois. Cela si‐ gnifie qu'il est très rare de les apercevoir.

Andrew Trites, directeur de l'Unité de recherche sur les mammifères marins, UBC

Les chercheurs espèrent obtenir davantage d'observa‐ tions, notamment des don‐ nées acoustique­s et informa‐ tions génétiques sur cette possible nouvelle population.

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