Le leader démocrate du Sénat américain plaide pour des élections en Israël
Le leader de la majorité dé‐ mocrate au Sénat, Chuck Schumer, a attaqué le pre‐ mier ministre israélien, Be‐ nyamin Nétanyahou, dans des termes très durs, le présentant comme un des plus grands « obstacles à la paix » au Moyen-Orient.
Dans un discours pro‐ noncé au Sénat jeudi, il a montré du doigt à la fois le Hamas et les Palestiniens qui soutiennent ce mouvement islamiste, le président de l'Autorité palestinienne, Mah‐ moud Abbas, les Israéliens de la droite radicale ainsi que le premier ministre Nétanya‐ hou, qu'il a désignés comme les quatre principaux obs‐ tacles à la paix dans la ré‐ gion.
M. Schumer, l'élu de reli‐ gion juive le plus haut placé dans la hiérarchie politique américaine - et un allié fidèle d'Israël -, a déclaré que le premier ministre Nétanya‐ hou s'était égaré, laissant sa survie politique passer avant l'intérêt supérieur d'Israël.
Après cinq mois de guerre dans la bande de Gaza à la suite de l'attaque du Hamas en territoire israélien, le 7 oc‐ tobre dernier, le gouverne‐ ment de M. Nétanyahou ne répond plus aux besoins d'Is‐ raël, a-t-il dit.
En tant que démocratie, Israël a le droit de choisir ses propres dirigeants [...]. Mais l'important, c'est que les Is‐ raéliens aient le choix. Il faut un nouveau débat sur l'ave‐ nir d'Israël [...]. À mon avis, la meilleure façon d'y parvenir est d'organiser des élections, a-t-il déclaré.
[Benyamin Nétanyahou] a été trop enclin à tolérer le nombre de victimes civiles à Gaza, ce qui amène le sou‐ tien à Israël dans le monde entier à des niveaux histori‐ quement bas. Israël ne peut pas survivre s'il devient un paria.
Chuck Schumer, leader de la majorité démocrate au Sé‐ nat
M. Schumer a aussi ap‐ pelé à la démission du pré‐ sident de l'Autorité palesti‐ nienne, Mahmoud Abbas, qu'il a qualifié de mauvais di‐ rigeant.
Le leader de la minorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, a répliqué au dis‐ cours de son vis-à-vis démo‐ crate en critiquant une sortie sans précédent.
Il est grotesque et hypo‐ crite que des personnes qui font de l'hyperventilation au sujet de l'ingérence étran‐ gère dans notre propre dé‐ mocratie lancent un appel à la destitution du dirigeant démocratiquement élu d'Is‐ raël, a-t-il lancé.
Le Parti démocrate n'a pas de problème anti-Bibi, at-il ajouté en référence au surnom du premier ministre Nétanyahou. Il a un pro‐ blème anti-israélien.
Le discours de M. Schu‐ mer a offert un contraste frappant avec l'attitude du Parti républicain. Mercredi, les sénateurs républicains ont invité Benyamin Néta‐ nyahou à prendre la parole lors d'une rencontre de leur formation, mais il n'a pas pu y prendre part en raison d'un conflit d'horaire.
C'était la deuxième fois que M. Schumer prenait la parole dans l'enceinte du Sé‐ nat au sujet de la guerre qui a éclaté il y a cinq mois. En novembre dernier, il avait dé‐ noncé la montée de l'antisé‐ mitisme après l'offensive mi‐ litaire israélienne.
Selon un sondage Asso‐ ciated Press-NORC publié le mois dernier, 50 % des Amé‐ ricains estiment que la ri‐ poste israélienne est allée trop loin.
L'administration Biden prend ses distances
Le porte-parole de la Mai‐ son-Blanche pour la sécurité nationale, John Kirby, a indi‐ qué que M. Schumer avait in‐ formé la Maison-Blanche à l'avance de ce discours mais que celle-ci n'avait ni donné son approbation ni désap‐ prouvé le discours, pas plus qu'elle ne l'avait modifié de quelque façon que ce soit.
Interrogé sur l'organisa‐ tion d'élections après la guerre, il a répondu que c'est une décision qui appartient aux Israéliens.
Le département d'État a lui aussi insisté sur l'indépen‐ dance des diverses branches du gouvernement.
Il s'agit de déclarations faites par le sénateur Schu‐ mer, pas par l'administration Biden, a déclaré le porte-pa‐ role du département d'État, Matthew Miller, en assurant que le leader démocrate n'avait pas relayé des propos tenus en privé par des membres de l'administration Biden.
Écoutez, il y a un certain nombre de choses que nous voudrions voir Israël faire dif‐ féremment, a-t-il cependant concédé. Je l'ai dit à plusieurs reprises sur cette tribune et nous l'avons dit très claire‐ ment lors de conversations directes avec le premier mi‐ nistre [Nétanyahou].
Le président Joe Biden a à plus d'une reprise exprimé publiquement sa frustration face à Benyamin Nétanya‐ hou, dénonçant entre autres le mois dernier une riposte excessive.
Il a récemment dit estimer que M. Nétanyahou fait plus de mal que de bien à Israël, avertissant que ce pays risque de perdre le soutien de la communauté interna‐ tionale. Il n'est cependant pas allé jusqu'à réclamer le départ du premier ministre israélien.
Schumer rabroué
Sans surprise, le chef de file démocrate du Sénat a été rappelé à l'ordre par des poli‐ ticiens israéliens.
Nous attendons de la plus grande démocratie du monde qu'elle respecte la dé‐ mocratie israélienne, a réagi le ministre des Finances, Be‐ zalel Smotrich, un politicien d'extrême droite qui, l'an der‐ nier, a nié l'existence des Pa‐ lestiniens comme individus et comme peuple.
Le parti de M. Nétanya‐ hou, le Likoud, a pour sa part dit s'attendre à ce que le sé‐ nateur Schumer respecte le gouvernement élu d'Israël et ne l'affaiblisse pas.
Contrairement aux pro‐ pos de M. Schumer, le public israélien soutient une victoire totale sur le Hamas, rejette tout diktat international vi‐ sant à établir un État palesti‐ nien terroriste et s'oppose au retour de l'Autorité palesti‐ nienne à Gaza, a affirmé cette formation dans un communiqué.
La popularité du premier ministre Nétanyahou a chuté au cours des derniers mois. Un sondage mené en Israël en début d'année stipulait que seuls 15 % des électeurs souhaitaient que Benyamin Nétanyahou reste en poste après la guerre, même si une majorité est en faveur de la guerre.
En Israël, certains l'ac‐ cusent de vouloir poursuivre la guerre dans la bande de Gaza le plus longtemps pos‐ sible afin de se maintenir au pouvoir.
Frustration croissante dans les rangs démocrates
Plusieurs élus démo‐ crates, en majeure partie de l'aile gauche de la formation, ont critiqué l'intensité de la riposte militaire israélienne dans la bande de Gaza après l'attaque du Hamas du 7 oc‐ tobre, mais aucun démocrate de haut niveau n'avait jus‐ qu'ici livré une critique aussi cinglante que celle du séna‐ teur Schumer.
Cette semaine, huit séna‐ teurs démocrates, dont ne
fait pas partie M. Schumer, ont indiqué qu'ils s'oppose‐ raient à une aide américaine à Israël si ce pays n'autorisait pas l'entrée de l'aide humani‐ taire dans la bande de Gaza.
À mesure que le nombre de victimes civiles palesti‐ niennes a augmenté dans le conflit entre Israël et le Ha‐ mas, le président Biden a vu son soutien s'éroder parmi Américains musulmans ou d'origine arabe ainsi qu'au sein de l'aile progressiste de sa formation. Cette situation envoie des signaux d'alarme pour la présidentielle de no‐ vembre.
Ce mouvement de contes‐ tation concernant le rôle du président Biden dans la crise à Gaza s'est exprimé, par exemple, lors de la primaire démocrate au Michigan, pen‐ dant laquelle plus de 100 000 électeurs ont voté non en‐ gagé, l'équivalent d'un vote blanc.
Le groupe Listen to Michi‐ gan avait encouragé ce vote de protestation contre M. Bi‐ den pour livrer un message puissant et sans équivoque, selon lequel le financement et le soutien de la guerre à
Gaza sont en contradiction avec les valeurs du Parti dé‐ mocrate. Il réclame entre autres un cessez-le-feu im‐ médiat.
La directrice de cette cam‐ pagne, Layla Elabed, a d'ailleurs accueilli froidement le haussement de ton du lea‐ der de la majorité démocrate au Sénat.
Le sénateur Schumer commence à changer d'atti‐ tude, mais beaucoup trop lentement et avec peu de substance quant aux actions que M. Biden peut entre‐ prendre maintenant pour mettre fin au nombre scan‐ daleux de morts civiles à Gaza, a-t-elle réagi, citée par le New York Times.
La guerre a été déclen‐ chée le 7 octobre par une at‐ taque sans précédent menée dans le sud d’Israël par des commandos du Hamas infil‐ trés à partir de Gaza. L'at‐ taque a fait environ 1200 morts, pour la plupart des ci‐ vils.
Les militants ont égale‐ ment pris environ 250 otages, dont des dizaines ont été libérés lors d'une trêve d'une semaine en novembre. Israël estime qu'il reste envi‐ ron 130 captifs à Gaza, dont 32 sont présumés morts.
L'offensive israélienne dé‐ clenchée en représailles a jusqu’à présent fait plus de 30 000 morts dans la bande de Gaza, en majorité des ci‐ vils, selon le ministère de la Santé du Hamas.
Selon l'agence des Na‐ tions unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), plus d'enfants ont été tués dans la bande de Gaza en quatre mois de guerre qu'en quatre ans de conflits dans le monde entier.
L’avocate reconnaît que la procédure peut être frus‐ trante.
On ne peut jamais parler à personne. Il faut naviguer sur des pages web contenant des informations qui ne sont pas exactes. C'est vraiment, vraiment difficile.
Avec les informations de Sam Konnert de CBC News