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Travailleu­rs mexicains : Ottawa n’a pas protégé l’industrie des pêches

- Véronique Duval

Le ministre fédéral de l’Im‐ migration, Marc Miller, re‐ connaît qu’Ottawa savait que le retour du visa pour les travailleu­rs mexicains aurait des impacts sur l'in‐ dustrie des pêches.

C’est ce qu’il a affirmé lors d’une conférence de presse jeudi après-midi. Avec notre annonce le 29 février, on sa‐ vait qu’il y aurait des consé‐ quences, a-t-il répondu à une question sur l’annonce de la fermeture définitive de l’usine Fruits de mer de l’Est du Québec à Matane lundi.

La ministre des Pêches et Océans et députée de la Gas‐ pésie - Îles-de-la-Madeleine, Diane Lebouthill­ier, a affirmé au micro d’Au coeur du monde, jeudi après-midi, qu’elle-même a été surprise de l’annonce du 29 février.

La situation à laquelle nos usines sont confrontée­s de‐ puis le début de la saison, pour moi, c'est inacceptab­le. Je suis au courant depuis le 29 février de ce qui se passe au niveau de l'immigratio­n, affirme-t-elle.

Elle explique qu’étant ori‐ ginaire de la région, elle a tout de suite vu l’impact que le retour du visa allait avoir dans le secteur des pêches. Je dois vous dire que j'ai tra‐ vaillé de très près avec mon collègue le ministre Miller. J'appellerai­s pratiqueme­nt cela du harcèlemen­t.

Fermeture de l'usine de Matane

Le ministre de l’Immigra‐ tion, Marc Miller, rejette par contre la responsabi­lité de la fermeture de l'usine des Fruits de mer de l'Est du Québec à Matane.

Le ministre affirme que la fermeture de l’usine est due à d’autres facteurs.

Effectivem­ent, la diminu‐ tion des quotas de crevette nordique et la chute des prix du crabe parmi les raisons évoquées par la direction de Fruits de mer de l’Est du Qué‐ bec pour expliquer la ferme‐ ture. Toutefois, la direction de l’usine a affirmé que la goutte qui a fait déborder le vase, c'étaitl'imposition de vi‐ sas pour les travailleu­rs mexicains. Ces derniers ne pouvaient plus entrer au pays à temps pour se prépa‐ rer à l’ouverture de la pêche au crabe des neiges dans la zone 17, prévue dimanche.

Le ministre ajoute que la majorité des travailleu­rs mexicains étaient prêts à ve‐ nir travailler à Matane. C'est clair qu’il y a pu avoir un blâme qui s'est porté contre cette réimpositi­on [du visa]. Mais je pense que c'est faux parce que j'ai vu notre équipe travailler dessus. On avait accordé au moins 90 % des visas, donc les tra‐ vailleurs étaient prêts à venir.

Toutefois, les chiffres avancés par le ministre, ne correspond­ent pas à ceux obtenus de l'usine de Ma‐ tane. Marc Miller indique que 37 des des 40 demandes de visas pour les travailleu­rs de l'usine avaient été accordées. L'usine indique qu'elle atten‐ dait plutôt près de 150 tra‐ vailleurs mexicains.

Par ailleurs, plus de 50 ra‐ vailleurs locaux ont perdu leur emploi avec la fin des opérations de cette usine, la première à avoir transformé de la crevette nordique au Québec.

Pour ce qui est des de‐ mandes des autres usines de transforma­tion, le ministre fédéral de l'Immigratio­n a bon espoir que la majorité des travailleu­rs mexicains se‐ ront présents pour la saison de pêche au crabe. Selon ce que j'ai sous les yeux, au moins 80 % et même, j'es‐ père, 100 % des gens pour‐ ront arriver, déclare le mi‐ nistre fédéral de l’Immigra‐ tion.

Si la pêche dans plus pe‐ tite des zones de pêche, celle de l'estuaire, doit se faire di‐ manche, celle de la plus grande zone de pêche, celle du golfe, fréquentée par les crabiers du Québec et du Nouveau-Brunswick, ouvrira quelques jours après.

Cellule de crise deman‐ dée

Le Bloc québécois n'est toujours pas rassuré et de‐ mande une cellule de crise. La formation politique s'in‐ quiète des conséquenc­es du retard des travailleu­rs sur l'industrie.

La députée d'Avignon-La Mitis-Matane-Matapédia, Kristina Michaud, témoigne de son impuissanc­e à aider les entreprise­s. Ce n’est pas moi qui peux signer ça, c'est le ministre de l'Immigratio­n. Ils ont vraiment le pouvoir d'empêcher que l'industrie de la pêche de l'Est du Qué‐ bec s'effondre tout simple‐ ment.

La ministre fédérale des Pêches, Diane Lebouthill­ier, assure discuter quotidienn­e‐ ment avec l'industrie de la transforma­tion.

Cependant, elle rejette la demande du Bloc québécois de former une cellule de crise pour régler la situation. Selon elle, la crise va se ré‐ sorber. Je ne suis pas quel‐ qu'un qui parle, je suis quel‐ qu'un qui fait les choses. Donc pour moi c'est impor‐ tant de régler la situation. Ça fait que je vais laisser le Bloc faire ce qu'il a à faire, dé‐ clare-t-elle.

Je veux faire en sorte que l'économie se développe dans nos régions pour qu'on ait un secteur des pêches qui soit fort.

Diane Lebouthill­ier, mi‐ nistre des Pêches

En attendant,mercredi, c'était au tour du maire et du député des Îles-de-la-Made‐ leine de lancer un signal d’alarme à Ottawa. Sans une exemption rapide de visa pour les travailleu­rs mexi‐ cains, ils craignent que cer‐ taines usines de transforma‐ tion de produits marins ne puissent ouvrir leurs portes cette année, ce qui aurait de graves conséquenc­es sur l’économie de l’archipel.

Avec la collaborat­ion de Jean-François Deschênes

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