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Feux de forêt : des municipali­tés apprennent à vivre avec les lignes d’arrêt mécanisées

- Annie-Claude Brisson

Stratégie employée pour combattre les feux de forêt qui menaçaient plusieurs infrastruc­tures québé‐ coises à l’été 2023, les lignes d’arrêt mécanisées se sont avérées efficaces. Depuis, les municipali­tés qui ont bénéficié de ces moyens de protection en portent les marques. L’heure est maintenant aux projets de valorisati­on.

Des villes comme Senne‐ terre et Chibougama­u ont vu la machinerie lourde s’activer autour d’eux lorsque les feux de forêt étaient menaçants. Les équipement­s ont arraché des arbres et creusé le sol sur près de 8 kilomètres de long et 40 mètres de large, laissant une large bande dé‐ nuée de végétation pour frei‐ ner les incendies.

J'entendais les pelles mé‐ caniques faire ça, mais je ne suis jamais venue voir. On comprenait pourquoi on le faisait, mais je ne voulais pas le voir. C’est quand même bien fait dans les circons‐ tances, se remémore la mai‐ resse de Chibougama­u, Ma‐ non Cyr.

On a eu un choc un petit peu émotif quand on a vu cette cicatrice-là.

Manon Cyr, mairesse de Chicougama­u

Dans cette ville du Norddu-Québec, la tranchée s’étire sur 7,5 kilomètres et mesure 40 mètres de large. Le corridor s'étend du sudest de la ville et va jusqu'au nord de Chantiers Chibouga‐ mau. Il fallait agir vite pour notamment protéger l’hôpi‐ tal.

On a pris une nuit pour y réfléchir. Le lendemain, avec les conditions de feu, com‐ ment ça s'en venait, avec les membres du conseil, j'ai dit : gang, on n'a pas le choix, il faut aller de l'avant , se remé‐ more Mme Cyr.

À l’aube d’une nouvelle saison de feux de forêt, la ville de Chibougama­u porte encore les marques de la dernière. La zone sans végé‐ tation doit être entretenue et pérennisée.

On est en train de voir comment on peut transfor‐ mer ça en une opportunit­é, puis d'essayer de voir ce qu'on peut développer, amé‐ nager légèrement parce que l'objectif demeure la protec‐ tion, rapporte Mme Cyr.

Il y a presque autant d’idées qu’il y a de résidents dans la ville de 7500 âmes.

J'ai des citoyens qui

veulent un sentier de moto‐ neige, j'en ai d'autres qui veulent un sentier pédestre, de la raquette, résume Ma‐ non Cyr.

L’organisme Faune en or a obtenu le mandat de déter‐ miner ce qui pourrait être aménagé dans la longue li‐ sière. Une consultati­on ci‐ toyenne se tiendra au cours des prochains mois. Les élus décideront ensuite de la vo‐ cation finale du corridor de 7,5 kilomètres.

Un comité pour occuper la tranchée

Près de 350 kilomètres plus loin, la ville de Senne‐ terre doit, elle aussi, gérer une immense tranchée au‐ tour de son périmètre ur‐ bain.

Deux consultati­ons se sont déjà tenues au cours des derniers mois. Un comité de suivi en est né afin de dé‐ terminer les possibilit­és d’oc‐ cupation des tranchées coupe-feu.

La mairesse Nathalie-Ann Pelchat souligne avec fierté que le dossier a rapidement été pris en main par le conseil municipal. La crise de l’été dernier aura rapproché les Senneterri­ens des élus.

On a été très proactif. On est super content que les gens aient répondu à notre appel. C’est ça qu’on voulait, avoir un vrai portrait des pré‐ occupation­s, des inquiétude­s des gens, mentionne-t-elle.

Les citoyens ont évoqué plusieurs projets sans se limi‐ ter. Les gens ont quand même été assez terre à terre, ils n’ont pas trop rêvé, men‐ tionne la mairesse avec le sourire dans la voix.

La protection de la ville est, selon elle, pour l'instant suffisante. Senneterre ne compte pas agrandir les lignes d’arrêt mécanisées qui l'entourent en partie. Elle de‐ vra, toutefois, procéder à l’entretien de celles-ci, dont l’améliorati­on de l’aspect vi‐ suel. Des solutions devront également être identifiée­s pour les résidences dont la cour arrière donnait sur la fo‐ rêt. L’objectif est de redonner une certaine intimité aux ci‐ toyens.

Force est d'admettre que les idées pour tirer profit des lignes d'arrêt mécanisées sont nombreuses. Tant à Senneterre qu’à Chibouga‐ mau, c'est le financemen­t qui déterminer­a, en partie, ce qui pourra être réalisé et l’échéancier des travaux.

Ce qui va peut-être nous freiner, c'est qu'il va falloir le faire sur plusieurs années, c'est les coûts que ça va en‐ gendrer parce que comme communauté à 7500 de po‐ pulation, à 17 ou 18 millions de dollars de budget, on ne peut pas se permettre d'amé‐ nager ça à même nos bud‐ gets. Donc, il faudra regarder ce qui existe, ce qu’il est pos‐ sible de faire, expose la mai‐ resse de Chibougama­u, Ma‐ non Cyr.

Senneterre s’est tournée vers Loisir et Sport Abitibi-Té‐ miscamingu­e en raison des nombreuses suggestion­s des citoyens rattachées aux sports et aux loisirs. L’organi‐ sation pourra aiguiller le conseil municipal sur les pos‐ sibilités de sources de finan‐ cement. La Ville est égale‐ ment en attente de réponses d’aides financière­s.

Un cas d’exception

La mise en place de ligne d'arrêt mécanisée à proxi‐ mité des villes demeure une mesure d'exception tout comme le fut la dernière sai‐ son des feux de forêt. Il s’agissait d’une première pour Pascal Lapointe qui compte plus de 25 ans de service à la Société de protec‐ tion des forêts contre le feu.

Souvent, on va la prendre comme une stratégie offen‐ sive, on va la faire le plus près possible du feu pour en‐ rayer sa progressio­n. Autour d'une ville, en prévoyant un feu qui va s'approcher, si je prends l'exemple de Chibou‐ gamau qui est celle que je connais le plus, c'était vrai‐ ment pour des raisons qu'on était en manque de person‐ nel. C'était une stratégie dé‐ fensive qui avait été mise en place, explique celui qui est le chef de base des secteurs de Chibougama­u-Chapais et du Lac-Saint-Jean.

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