Bienvenue dans le monde des concours de beauté… pour enfants
Samedi matin, dans la pe‐ tite ville de Cookeville, au Tennessee. Des dizaines de jeunes filles enfilent leurs robes et font de légères re‐ touches à leur maquillage, fébriles à l’idée de monter sur scène. Parmi elles : Caitlyn, 11 ans. Elle a enfilé ses talons hauts et sa longue robe turquoise. Une bonne couche de fond de teint couvre son visage.
Garde ton sourire. Un demi-sourire, ça ne fera pas l’affaire, lui lance sa grandmère, Amy Taylor, alors que la jeune fille se consacre à ses derniers préparatifs avant sa performance.
Je vais faire de mon mieux pour garder mon sourire, lui répond la jeune fille d’un ton placide. Puis, elle va se placer sur le côté de la scène, en file derrière ses concurrentes. Le concours va commencer.
Nous avons commencé à l’inscrire à des concours de beauté lorsqu’elle avait 10 mois.
Amy Taylor et sa petitefille Caitlyn partagent une complicité et un amour évi‐ dents. Cela fait des années qu'elles parcourent le Ten‐ nessee pendant des fins de semaine entières pour que Caitlyn participe à des concours de beauté. À 11 ans, elle a des dizaines de compétitions à son actif, y compris au niveau national.
Caitlyn est la première fille dans la famille Taylor en presque 50 ans, explique Amy. Nous voulions être sûrs qu’elle sache qu’elle était une fille et qu’elle pouvait faire des activités féminines. La petite a commencé à partici‐ per à des concours de façon régulière à l’âge de six ans. Elle y prend part environ une fois par mois.
Or, cette activité peut de‐ venir coûteuse, de l’aveu d’Amy. Mais c’est ma seule petite-fille, alors elle est plus gâtée. Le coût d'une fin de semaine de concours natio‐ nal peut facilement dépasser les 2000 $ et chaque robe coûte de 500 à 1000 $. Cait‐ lyn en possède une dizaine.
La jeune fille affirme qu'elle adore cette activité. Les concours de beauté ne sont pas tellement une ques‐ tion de compétition : ils visent plutôt à se faire des amies et à s’amuser.
Ces concours l'ont aidée à avoir confiance en elle et à surmonter l'épreuve de la disparition de sa mère, décé‐ dée subitement de la COVID19 il y a deux ans. Aux concours, il y a d’autres per‐ sonnes qui vivent des mo‐ ments difficiles. Je ne suis ja‐ mais seule.
De retour à Cookeville, où a lieu le concours local Miss
Christmas Spirit, auquel par‐ ticipe Caitlyn. La compétition s'annonce féroce : elle est la plus jeune de sa division, qui réunit des filles âgées de 11 à 13 ans. Elle fait face à six concurrentes, un nombre in‐ habituellement élevé pour un concours local.
L’événement est organisé par Paige Seidel, 24 ans et propriétaire de trois circuits de concours de beauté. Au‐ jourd’hui, les filles compéti‐ tionneront seulement dans la catégorie "beauté", nous ex‐ plique-t-elle avant le début des compétitions.
La journée débute avec le groupe des 0 à 23 mois. Une vingtaine de bébés filles qui arborent robes et barrettes montent sur scène, tenues par leurs mères.
Et que doivent faire les candidates lors de leur per‐ formance? Elles vont seule‐ ment marcher sur scène, ré‐ pond Mme Seidel. Plusieurs concours de beauté exigent que les concurrentes dé‐ montrent un talent spécial ou répondent à des ques‐ tions d’entrevue, mais ce n’est pas le cas cette journéelà.
Plus de deux heures avant le début de sa catégorie, la jeune Caitlyn est déjà sur les lieux. Elle est passée au salon de bronzage la veille et est maintenant en train de se faire coiffer et maquiller.
Le maquillage sera léger aujourd'hui puisqu'il s'agit d'un concours de type natu‐ rel. En plus des concours na‐ turels, il y a les concours semi-glitz, où le maquillage peut être plus extravagant. Et dans les concours de type glitz, tout est permis, y com‐ pris les faux cheveux et les fausses dents, peu importe l'âge des concurrentes. Ceuxlà, Caitlyn et sa grand-mère ne les fréquentent pas.
Le père de Caitlyn, Ryan, assiste exceptionnellement au concours. Que pense-t-il du maquillage sur le visage de sa fille de 11 ans? Ça peut être un peu beaucoup, par‐ fois, répond-il en esquissant