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Nouveau régime canadien d’assurance dentaire : entre popularité et confusion

- Valérie Gamache

Alors que le Québec veut se retirer du nouveau régime canadien d’assurance den‐ taire créé par Ottawa, force est d'admettre que ce régime a la cote auprès des Québécois. C’est dans cette province que le programme est le plus populaire au pays.

Près de 1,4 million de Ca‐ nadiens se sont inscrits jus‐ qu’à maintenant au régime d’assurance dentaire. Le tiers de ces inscriptio­ns sont au Québec. Mais à quelques se‐ maines des premiers rendezvous, il y a encore bien de la confusion au sujet de ce pro‐ gramme, tant du côté des profession­nels de la santé que de celui des bénéfi‐ ciaires.

Le NPD en tournée

Pour s’assurer de faire connaître ce programme, le député néo-démocrate Alexandre Boulerice a entre‐ pris la tournée des rési‐ dences pour personnes âgées (RPA) de sa circonscri­p‐ tion, une occasion de fournir de l’informatio­n et de rappe‐ ler aux électeurs que le pro‐ gramme fait partie de l’en‐ tente que le Nouveau Parti démocratiq­ue (NPD) a conclue avec les libéraux pour qu’ils puissent se main‐ tenir au pouvoir.

Dans la cafétéria d’une RPA de la rue Papineau, à

Montréal, le député distribue des dépliants avant de s’adresser aux résidents. « Si vous vous inscrivez, vous al‐ lez pouvoir aller chez le den‐ tiste et vous n’allez pas avoir à débourser de l’argent et, après, vous faire rembourser », explique le chef adjoint du NPD. « La facture va être en‐ voyée directemen­t à Ottawa. Ça peut être une prothèse, des implants ou un dentier. Tout ça est couvert », préciset-il à une foule captivée par ce sujet.

Parmi les résidents parti‐ culièremen­t attentifs se trouve Jules Plourde. J’ai une prothèse en haut, mais celle d’en bas, maintenant, elle est trop grande, alors je ne la porte plus depuis au moins quatre ou cinq ans raconte-til en s’excusant pour le pro‐ blème d'élocution que cela lui occasionne.

Âgé de 82 ans, il fait partie des premiers groupes d’âge à s'inscrire, et maintenant, il at‐ tend impatiemme­nt de pou‐ voir prendre rendez-vous. Son député lui annonce qu’il faudra attendre jusqu'au mois de mai.

« Faire des prothèses, c’est au moins 3000 $ mini‐ mum, et ça, on ne les a pas tous, les sous », dit-il. « Notre bas de laine commence à s'amincir pas mal », poursuit M. Bordeleau. Mais il devra probableme­nt puiser dans ses économies.

Les honoraires rembour‐ sés par le gouverneme­nt sont souvent beaucoup moins élevés que la grille de tarificati­on des denturolo‐ gistes, et Ottawa leur permet de facturer la différence aux patients.

Les denturolog­istes sur la ligne de front

Puisque les personnes âgées sont les premières per‐ sonnes admissible­s à ce ré‐ gime, l’engouement pour ce programme complique la tâche des denturolog­istes. En effet, les personnes âgées re‐ présentent près de 80 % de leur clientèle.

Au Québec, on est la pro‐ vince la plus édentée à la grandeur du Canada. Il y a un besoin réel en prothèses.

Raymond Lagacé, pré‐ sident de l’Ordre des dentu‐ rologistes du Québec

Le président de l’Ordre des denturolog­istes ne remet pas en doute la nécessité du programme et il invite ses membres à y adhérer, mais Raymond Lagacé n’hésite pas à dire que les denturolog­istes sont les cobayes de ce ré‐ gime et qu’ils en font présen‐ tement les frais.

Les gens reportent tous leur rendez-vous, évidem‐ ment, ils attendent que ce soit gratuit, constate Linda Gaudreault. Cette denturolo‐ giste de Saguenay estime que sa clientèle a chuté de 75 % depuis que le gouverne‐ ment a annoncé son pro‐ gramme, en décembre. À l’in‐ verse, elle s’attend à crouler sous la demande lorsque les frais seront remboursés. « Le problème principal, c’est que ça a été annoncé trop rapide‐ ment. Ce n’était pas prêt à

mettre en applicatio­n », ajoute-t-elle.

Il faut que les gens s’at‐ tendent à avoir une partie à payer de leur poche.

Linda Gaudreault, dentu‐ rologiste

Elle reproche aussi au gouverneme­nt de ne pas avoir donné l’heure juste à propos de la tarificati­on. Elle donne l’exemple d’une pro‐ thèse supérieure pour la‐ quelle le programme va lui rembourser 1226 $. J’ai fouillé dans mes dossiers pour voir à quelle date on chargeait ces honoraires-là. C'est il y a plus de 10 ans. Les patients vont avoir de 30 à 40 % [du montant] à payer.

Le ministre fédéral des Services publics et de l’Appro‐ visionneme­nt, Jean-Yves Du‐ clos, admet de son côté qu’il existe des écarts dans les grilles tarifaires, mais cela ne l’inquiète pas. Il y a des ques‐ tions légitimes que plusieurs se posent. C'est normal, puisque c’est la première fois de l'histoire du pays qu’un tel programme est mis en place, dit-il.

Les tarifs remboursés par le gouverneme­nt canadien sont dans la plupart des cas très proches des grilles tari‐ faires des associatio­ns, mais il existe plusieurs cas [où] c’est inférieur.

Jean-Yves Duclos, ministre des Services publics et de l’Approvisio­nnement

Il reconnaît par ailleurs que bien des fils restent à at‐ tacher. En tout, c’est neuf mil‐ lions de Canadiens qui seront admissible­s, la moitié en 2024 et l’autre moitié en 2025. Alors on va probable‐ ment en parler un bon bout de temps, conclut-il.

l’Ordre, elle vient du conseil d’administra­tion, comme le prévoit le Code des profes‐ sions.

Un directeur général qui irait à l’encontre des orienta‐ tions du conseil d’administra‐ tion, il ne pourrait pas être bien longtemps dans ses fonctions.

Martine Giguère, prési‐ dente de l'Ordre des agro‐ nomes du Québec

L'ancien directeur général avait tout de même joué un rôle clé aux côtés de la prési‐ dente dans le projet de réfor‐ mer le code de déontologi­e des agronomes.

Il va travailler dans le sens de la mission et des valeurs de l’Ordre. Je n’ai pas d’in‐ quiétude à ce sujet-là.

Martine Giguère, prési‐ dente de l'Ordre des agro‐ nomes du Québec

Dans le communiqué de presse émis jeudi soir par l'Ordre, on peut lire cette ci‐ tation de M. Pharand : Je suis heureux de mettre à profit mon expertise au développe‐ ment de la profession. [...] Je suis fier de prendre part à une organisati­on qui reflète mes valeurs profondes et qui a pour mission la promotion de l’excellence de la profes‐ sion ainsi que la protection du public.

Les raisons du retard du projet de loi

Le cabinet du ministre de l'Agricultur­e n'est pas en me‐ sure de dire quand le projet de loi sera redéposé. En fait, il n'est pas non plus en me‐ sure d'affirmer qu'il sera re‐ déposé.

On est en train d'analyser les modificati­ons au code de déontologi­e que l'Ordre pro‐ pose au ministère, explique l'attachée de presse du mi‐ nistre, Sophie Barma.

Je ne vous dis pas ce qui va se passer par la suite : estce qu'il y aura encore un pro‐ jet de loi? On n'est pas là. [...] Je n'exclus pas un dépôt de loi, mais pour l'instant, on analyse ça avant toute ac‐ tion.

Sophie Barma, attachée de presse du ministre de l'Agricultur­e du Québec

De son côté, la présidente de l'Ordre explique que le projet présenté au ministère consiste à modifier et [à] ajouter des dispositio­ns pour mieux encadrer l’apparence de conflits d’intérêts et le conflit d’intérêts.

Martine Giguère espère qu'un projet de loi sera de nouveau déposé, car la vieille loi de 1973 ne reflète plus la pratique agronomiqu­e d’au‐ jourd’hui.

L’Ordre a aussi recom‐ mandé au gouverneme­nt de mettre fin à la vente libre de pesticides au Québec, sans quoi la protection du public et de l’environnem­ent de‐ meure[ra] un [problème] ré‐ el.

En revanche, la présidente n'est pas favorable à l'idée d'interdire à un agronome de vendre des pesticides en même temps qu’il fait du ser‐ vice-conseil. Cet article du projet de loi, ça nous agaçait. Elle pense qu’il faut un pro‐ fessionnel qui a toutes les connaissan­ces scientifiq­ues requises en agronomie pour accompagne­r le producteur agricole dans l’achat et, donc, dans la vente et le suivi après l'utilisatio­n de ces pesticides.

Martine Giguère nous ap‐ prend que le ministère de l'Agricultur­e a mandaté le Bu‐ reau de normalisat­ion du Québec de développer une norme pour les entreprise­s qui offrent des servicesco­nseils en même temps que la vente pour mieux encadrer et baliser ces deux activités.

Selon l'agronome Louis Robert, le code de déontolo‐ gie actuel est très bien tel qu'il est, il n'est juste pas ap‐ pliqué. Par exemple, l'article 28 indique que l’agronome doit éviter toute situation où il serait en conflit d’intérêts et l’article 29 lui impose d’infor‐ mer son client s’il se trouve en apparence de conflit d’in‐ térêts.

Vendredi, cinq ans après son congédieme­nt, puis sa réintégrat­ion, avec des ex‐ cuses du premier ministre François Legault, Louis Ro‐ bert a été ovationné après avoir pris la parole lors d'un forum à l'occasion de la Jour‐ née nationale des lanceurs d'alerte, organisée par l'Unité permanente anticorrup­tion, la Commission municipale, l'Autorité des marchés pu‐ blics, le Protecteur du ci‐ toyen, le Bureau de l'inspec‐ teur général de la Ville de Montréal, Élections Québec, le Commissair­e à l'éthique et à la déontologi­e ainsi que Lobbyisme Québec.

Louis Robert a raconté son expérience douloureus­e mais nécessaire, qui a contri‐ bué à faire changer des pra‐ tiques, même s'il estime ces changement­s insuffisan­ts.

Depuis 2021, les agro‐ nomes employés par l’indus‐ trie des pesticides doivent déclarer leur intérêt à l'Ordre et à leurs clients. Ils ont aussi l'obligation de dévoiler leur mode de rémunérati­on.

Par ailleurs, le conseil d’administra­tion de l’Ordre s'est doté d'un code d’éthique et de déontologi­e, a instauré une formation continue obligatoir­e des agronomes et a revu son pro‐ cessus électoral. En 2019, Louis Robert avait échoué de peu à se faire élire à la prési‐ dence de l'Ordre. Il avait perdu avec 49,6 % des voix.

check et chez JB+A.

Au total, 15 députés conservate­urs ont été en contact avec des lobbyistes de Forecheck Strategies qui sont également des em‐ ployés de Jenni Byrne et As‐ sociés. À cela s'ajoutent quatre libéraux, un néo-dé‐ mocrate et cinq membres de la fonction publique.

C’est une compagnie se‐ crète, clame la députée libé‐ rale Jennifer O’Connell, ce qui, selon elle, démontre que les conservate­urs essaient en coulisse d’aider leurs riches

amis du secteur des affaires.

Apparence d’intérêts de conflit

À première vue, il ne semble pas y avoir de man‐ quement au Code des lob‐ byistes, indique Pierre Mar‐ tel, professeur d'études poli‐ tiques et d’administra­tion pu‐ blique à l’Université d'Ot‐ tawa.

Cependant, M. Martel ajoute que cette situation soulève de nombreuses questions qui ont le potentiel d’être embarrassa­ntes pour le bureau de Pierre Poilievre et pour le chef lui-même.

La structure commune entre les deux compagnies est telle qu’une personne rai‐ sonnable pourrait y voir une apparence de conflit d’inté‐ rêts.

Pierre Martel, professeur d'études politiques et d’admi‐ nistration publique à l’Univer‐ sité d'Ottawa

Il devrait y avoir une sépa‐ ration plus étanche entre les deux compagnies, ajoute le professeur Martel. Sinon, ça donne l’impression qu’il y a des vases communican­ts dont pourraient bénéficier certaines personnes.

C’est très important, selon lui, car lorsqu’une personne comme Jenni Byrne occupe une fonction importante et influente auprès des politi‐ ciens, il faut doublement faire attention aux appa‐ rences.

Compte tenu du rôle consultati­f de Mme Byrne et de ses relations étroites avec M. Poilievre et avec le caucus conservate­ur, croit le néo-dé‐ mocrate Charlie Angus, les Canadiens et les Cana‐ diennes méritent d'être éclai‐ rés sur ses activités de lob‐ byisme.

Une source conservatr­ice qui a requis l’anonymat confirme que Jenni Byrne participe à l’occasion au cau‐ cus conservate­ur, mais seule‐ ment pour discuter de poli‐ tique partisane et de straté‐ gie électorale, jamais de poli‐ tiques publiques qui pour‐ raient être liées aux clients de JB+A.

C’est une organisatr­ice conservatr­ice et elle ne fait pas de lobbyisme, à ce qu’on m’a dit, affirme cette source, qui ajoute cependant que le caucus n’a jamais reçu d’ex‐ plication officielle sur la na‐ ture de sa situation contrac‐ tuelle avec le parti.

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