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La Première Nation Wolastoqiy­ik Wahsipekuk renonce à son quota de crevette nordique

- Marguerite Morin

La Première Nation Wolas‐ toqiyik Wahsipekuk ne pê‐ chera pas son quota de cre‐ vette nordique cette année puisqu’elle renonce aux quantités qui lui sont al‐ louées.

La nation explique sa dé‐ cision par le déclin de l’es‐ pèce dans les dernières an‐ nées. Elle fait aussi valoir que la rentabilit­é économique, avec des quotas beaucoup moins élevés, n’est plus au rendez-vous.

Il s’agit de la deuxième na‐ tion autochtone qui renonce à pêcher son quota de cre‐ vettes. En décembre, la na‐ tion mi’gmaw de Listuguj avait fait une telle annonce, en invoquant la baisse draco‐ nienne de la biomasse.

La position est claire làdessus, nous, on ne sortira pas pour protéger l’espèce, affirme le grand chef, Jacques Tremblay. Encore une fois, c’est pour des questions so‐ ciales, environnem­entales, mais également, parce que nous pensons à tout ce que ça prend de diesel, de carbu‐ rant pour le bateau, pour le peu d’espèces [pêchées], poursuit M. Tremblay.

Il est plus sage de ne pas sortir pour pêcher la crevette […]. On a toujours une vision de pêche durable, alors il fal‐ lait donner une chance à l’es‐ pèce de revenir, si c’est en‐ core possible.

Jacques Tremblay, grand chef de la Première Nation Wolastoqiy­ik Wahsipekuk

Le quota de la commu‐ nauté avait été fixé à 136 000 livres de crevettes nordiques cette année.

En janvier, la ministre de Pêches et Océans Canada, Diane Lebouthill­ier, a an‐ noncé un quota de 3060 tonnes pour l’ensemble de l’estuaire et du golfe du SaintLaure­nt pour 2024. En 2023, 5500 tonnes de crevettes ont été pêchées.

Une décision saluée

La décision de la commu‐ nauté saluée par le cher‐ cheur à l’Institut de re‐ cherche en économie contempora­ine (IREC) Gabriel Bourgault-Faucher.

Il rappelle toutefois qu’un des facteurs principaux du déclin de la crevette nor‐ dique est la prédation par le sébaste, qui exerce une très forte pression sur la crevette.

On estime que le sébaste mange environ 200 000 tonnes de crevettes par an‐ née, donc les quelque 3000 tonnes [de crevettes allouées cette année], ce n’est pas ce qui va faire pencher la ba‐ lance à mon avis, indique M. Bourgault-Faucher.

Si les communauté­s au‐ tochtones estiment qu’il vaut mieux, pour protéger la bio‐ masse, ne pas pêcher, ça ne peut effectivem­ent pas poser de préjudice additionne­l à la ressource, renchérit le cher‐ cheur.

Qu’en est-il des crevet‐ tiers allochtone­s?

L’incertitud­e est toujours omniprésen­te chez certains crevettier­s allochtone­s à sa‐ voir s’ils prendront la mer ou non.

On ne sait pas s’il y a beaucoup de pêcheurs qui vont y aller […], parce que là, actuelleme­nt, c’est impos‐ sible de rentabilis­er une en‐ treprise, affirme le crevettier et président de l’Associatio­n des capitaines-propriétai­res de la Gaspésie, Vincent Du‐ puis.

Certains crevettier­s vont tout de même tenter le coup, selon M. Dupuis. C’est l’éner‐ gie du désespoir, dit-il.

Autrement, Vincent Du‐ puis dit comprendre la déci‐ sion de la Première Nation Wolastoqiy­ik Wahsipekuk.

Dans un monde idéal, ça serait de ne pas aller pêcher personne, affirme-t-il.

La différence entre les pê‐ cheurs autochtone­s et nous, c’est que les bandes autoch‐ tones ont d’autres permis pour survivre. Ils vont avoir une grosse perte écono‐ mique [en ne pêchant pas la crevette], mais ils peuvent pêcher autre chose pour sur‐ vivre, tandis que nous, on a juste la crevette, alors je comprends aussi certains [pêcheurs allochtone­s] de vouloir essayer, conclut M. Dupuis.

La pêche à la crevette s’ouvre habituelle­ment au mois de mai.

Avec les informatio­ns de Pierre Chapdelain­e de Mont‐ valon

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