Hauteur illimitée des tours à Ottawa ? La Ville tempère les espoirs des promoteurs
Le plan d'un promoteur vi‐ sant à stimuler la construc‐ tion de logements en as‐ souplissant radicalement les règles de zonage ne sus‐ cite guère d'enthousiasme à la mairie d'Ottawa, du moins en ce qui concerne ses propositions les plus ra‐ dicales.
L'Association des constructeurs d'habitations du Grand Ottawa (Greater Ottawa Home Builders' Asso‐ ciation) a publié cette se‐ maine un livre blanc préconi‐ sant une hauteur de construction illimitée dans un rayon de 800 mètres au‐ tour des stations de trans‐ port en commun et l'autori‐ sation générale de construire jusqu'à quatre étages partout dans la ville.
La publication de ce docu‐ ment intervient alors que la Ville travaille sur un nouveau règlement de zonage, dont la première version devrait être publiée au printemps. Mais les principaux responsables de l'urbanisme affirment que les nouvelles règles n'iront certainement pas aussi loin.
Le directeur par intérim du développement écono‐ mique et de la planification à long terme, David Wise, a dé‐ claré qu'aucun des plans existants de la Ville n'envisa‐ geait d'abandonner totale‐ ment les limites de hauteur.
Si nous devions nous en‐ gager dans cette voie, il s'agi‐ rait d'une entreprise poli‐ tique beaucoup plus impor‐ tante, qui n'est tout simple‐ ment pas envisageable à l'heure actuelle, indique-t-il.
Il ajoute que la Ville n'envi‐ sage également pas de faire passer la limite dans tous les quartiers de son territoire à quatre étages.
Le président de la com‐ mission de l'urbanisme et du logement, Jeff Leiper, est du même avis. Il s'attend à ce que les limites de hauteur restent en place - même si elles augmentent - de sorte que les promoteurs devront se présenter devant sa com‐ mission au cas par cas pour obtenir l'autorisation de construire des gratte-ciel de grande hauteur.
Si un promoteur souhaite construire 80, 90 ou 100 étages près de l'une de nos stations de transport en commun, qu'il vienne nous voir pour une modification de zonage. Mais je ne suis pas convaincu que nous en ayons besoin dès maintenant et, franchement, je ne suis pas convaincu que le marché soit là, soutient-il.
Le livre blanc de l'associa‐ tion préconise également d'autoriser le stationnement dans les cours avant et d'abandonner les règles qui obligent les promoteurs à fournir des places de station‐ nement aux résidents.
M. Leiper a déjà indiqué que le nouveau règlement de zonage assouplira probable‐ ment les règles de stationne‐ ment minimum, mais qu'il est peu probable qu'il les éli‐ mine complètement.
Qu'en est-il des quadru‐ plex ?
Le livre blanc soutient une politique qui a de meilleures chances d'être adoptée par le conseil municipal : autoriser jusqu'à quatre unités rési‐ dentielles sur chaque terrain doté de services municipaux.
La province avait forcé la Ville à en autoriser trois, mais le gouvernement fédéral a semblé insister sur quatre unités comme condition pour que la Ville d'Ottawa obtienne une part du fonds provincial pour l’accélération de la construction de 4 mil‐ liards de dollars.
Lorsque la Ville a signé un accord pour obtenir plus de 176 millions de dollars du fonds, la politique semblait acquise.
Aujourd'hui, selon l'avis d'un avocat de la Ville, le conseil municipal semble dis‐ poser d'une certaine marge de manoeuvre.
Le conseiller juridique principal, Timothy Marc, sou‐ ligne que la Ville était obligée de proposer un projet de rè‐ glement autorisant quatre lo‐ gements partout, mais qu'elle ne s'était pas engagée à l'adopter.
Néanmoins, M. Leiper in‐ siste sur le fait que le rejet des quatre logements serait une décision risquée.
Cette décision appartient au conseil municipal. Il sera intéressant de voir comment se déroulera la discussion : quatre logements par lot se‐ rait controversé. Je pense que si nous ne l'adoptons pas, nous augmentons nos risques [de perdre du finan‐ cement], fait-il remarquer.
Ce risque pourrait coûter cher. La Ville pourrait perdre 44 millions de dollars, la qua‐ trième et dernière tranche de l'enveloppe destinée à l'accé‐ lération de la construction de logements.
Techniquement, cet ar‐ gent dépend de la réalisation des objectifs de la Ville en matière de délivrance de mil‐ liers de permis de construire. Mais M. Leiper s'attend à ce que la décision de retenir l'argent soit de nature poli‐ tique, même si la Ville n'at‐ teint pas son objectif et que le gouvernement fédéral a clairement exprimé sa préfé‐ rence pour les bâtiments à quatre logements.
Qui doit distribuer l'ar‐ gent ?
Les conseillers ont égale‐ ment débattu de ce qu'il conviendrait de faire avec tout cet argent une fois qu'il sera versé.
La commission présidée par M. Leiper a voté mercredi en faveur d'un plan visant à consacrer 90 % de l'argent à des projets de logements abordables prêts à être mis en oeuvre, mais qui manquent de financement. Le plan doit encore être sou‐ mis au conseil municipal pour approbation finale.
Mais le vote de mercredi ne s'est pas fait sans contro‐ verse, notamment sur la question de savoir qui pren‐ drait les décisions.
Le personnel demande l'autorisation de distribuer l'argent aux projets présélec‐ tionnés eux-mêmes, sans avoir à revenir devant le conseil chaque année pour approbation.
Le conseiller du quartier Rivière, Riley Brockington, n'est pas très à l'aise avec cette idée. Il a demandé pourquoi seulement le direc‐ teur des services du loge‐ ment devrait avoir carte blanche pour dépenser au‐ tant d'argent.
Je pense qu'il est sage, compte tenu de la somme d'argent dont nous parlons, de voir quelle est la liste pro‐ posée, de l'approuver et d'al‐ ler de l'avant à partir de là, fait-il valoir.
Bien que d'autres conseillers aient partagé son malaise, M. Brockington a été le seul à s'opposer au plan lors du vote.
La liste des fournisseurs de logements éligibles au fi‐ nancement de la Ville com‐ prend les Bergers de l'Espoir, dont le projet d'ouvrir un quatrième immeuble de lo‐ gements supervisés à Car‐ lington a suscité une vive op‐ position dans le quartier de M. Brockington.
Il y a beaucoup d'inquié‐ tudes dans la communauté à propos d'un centre qu'ils ont ouvert l'été dernier, et j'aime‐ rais régler ces problèmes avant de parler de la construction d'un quatrième bâtiment dans cette commu‐ nauté, affirme le conseiller municipal du quartier Rivière.
M. Leiper pense que les conseillers ne devraient res‐ ter à l'écart et laisser le per‐ sonnel choisir les projets.
Lorsqu'il s'agit de décider
quels fournisseurs de loge‐ ments reçoivent les fonds provenant de la province, du gouvernement fédéral ou de notre propre budget d'inves‐ tissement, les politiciens ont traditionnellement gardé les mains libres. Il ne faut pas que les politiciens fassent de la politique au détriment des personnes les plus vulné‐ rables, souhaite-t-il.
Avec les informations d'Arthur White-Crummey, de
CBC News