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Liste d’attente en chirurgie : Québec encore loin de l’objectif

- Nicolas Bourcier

La liste d’attente pour les chirurgies au Québec ne cesse de s’allonger, malgré l'adoption d’un plan de rat‐ trapage par le ministère de la Santé et des Services so‐ ciaux (MSSS) il y a pres‐ qu’un an déjà.

Le nombre de personnes en attente d'une chirurgie depuis plus d'un an s'élevait à 12 221 en février, loin de la cible de 7600 prévue pour le 31 mars 2024.

Le gouverneme­nt de Fran‐ çois Legault et les médecins spécialist­es s’étaient fixé cet objectif intérimair­e en mai 2023, en attendant de retrou‐ ver le seuil pré-pandémique de 2500 avant la fin de 2024.

À la mi-février, le pré‐ sident de la Fédération des médecins spécialist­es du Québec (FMSQ), le Dr Vincent Oliva, a affirmé en entrevue à Première heure sur les ondes d’ICI Première que cette cible ne serait pas atteinte, que les objectifs étaient irréaliste­s et qu’ils devaient être révisés.

Les personnes qui at‐ tendent depuis plus d’un an sont prioritair­es dans le plan en cours, mais le nombre to‐ tal de patients en attente sur la liste globale était de 161 760 en date du 24 février 2024.

Ça fait beaucoup de pa‐ tients qui attendent et ça n’a pas baissé depuis un an, a in‐ diqué le président de la FM‐ SQ.

Il faut voir que les blocs opératoire­s au Québec ne fonctionne­nt pas assez; ils fonctionne­nt environ à 85 %.

Le Dr Vincent Oliva, pré‐ sident de la Fédération des médecins spécialist­es du Québec

Ce qu’on déplore, c’est que le plan de rattrapage sur lequel on s’était mis d’accord en mai 2023 n’est pas mis en applicatio­n, a dénoncé le Dr Oliva.

Pour atteindre la cible ul‐ time de 2500 patients en at‐ tente depuis plus d’un an à la fin de l’année en cours, il fau‐ dra corriger le tir et envoyer les bonnes directives sur le terrain, soutient-il.

Manque de bras

L'entente conclue avec les médecins spécialist­es pré‐ voyait l’optimisati­on de l'utili‐ sation des salles d'opération (au-delà des heures habi‐ tuelles) et de la réouvertur­e de celles qui sont fermées.

L’objectif est de permettre aux médecins de compléter leur programme opératoire journalier en s’assurant, no‐ tamment, de la disponibil­ité des effectifs requis tout comme d’une programma‐ tion capacitair­e des lits, rap‐ pelle le porte-parole de la

FMSQ, Pâris Psychogyio­s, dans un courriel transmis à Radio-Canada.

Les médecins ont ré‐ pondu présents, mais se heurtent malheureus­ement toujours à l’incapacité du MSSS à mettre en oeuvre les conditions requises pour s’assurer du maintien ou de l’ouverture des blocs opéra‐ toires en nombre suffisant pour suivre le plan de rattra‐ page, ajoute le porte-parole.

C’est d’ailleurs le même son de cloche chez le Dr Hai Nguyen, chirurgien orthopé‐ diste à l'Hôpital Charles-Le Moyne et à l’Hôpital Jean-Ta‐ lon. On n’a pas le personnel pour opérer les salles et [suivre] les programmes qui ont été mis sur pied pour di‐ minuer les listes d’attentes , affirme-t-il.

Une équipe pour une chi‐ rurgie compte un anesthé‐ siste, trois infirmière­s et des préposés, précise-t-il, ajou‐ tant que ce ne sont pas les lieux physiques qui manquent, mais les bras pour opérer ladite salle.

La Fédération demeure ainsi très préoccupée par le nombre d’interventi­ons chi‐ rurgicales encore annulées chaque jour dans les établis‐ sements de santé.

Pâris Psychogyio­s, conseiller aux affaires pu‐ bliques à la Fédération des médecins spécialist­es du Québec

Une chirurgie sur 10 est annulée chaque jour au Qué‐ bec. Ce sont donc environ 150 des 1200 chirurgies (la moyenne quotidienn­e) qui doivent être annulées quand le personnel hospitalie­r se rend compte que la durée de l’opération dépasserai­t la fin de la journée de travail, vers 16 h.

On parle d’une liste d’at‐ tente et de nombre de cas, mais ce sont des patients. Le patient, lui, quand il est rendu 14 h et qui se fait dire "On ne fera pas votre chirur‐ gie parce qu’on a peur de dé‐ border", ce n’est pas accep‐ table, a dénoncé le président de la FMSQ.

Le ministère doit envoyer des directives claires dans les hôpitaux pour que les admi‐ nistration­s hospitaliè­res s’or‐ ganisent pour que ces pa‐ tients ne soient pas annulés, déclare le président de la Fé‐ dérations des médecins spé‐ cialistes du Québec, préci‐ sant que ses membres constatent que ces directives ne sont pas suivies sur le ter‐ rain.

Les patients que ça fait plus d’un an qui attendent, lorsqu’on les appelle, ils se présentent, assure le Dr Hai Nguyen.

Des annulation­s précoces, des patients qui ne sont plus disponible­s le jour de l’opéra‐ tion, des employés malades et un manque de personnel seraient en cause, selon un porte-parole du ministère de la Santé.

Un problème sous-repré‐ senté

De plus, les listes peuvent être manipulées, observe le Dr Hai Nguyen. Les listes que le gouverneme­nt offre c'est vraiment une sous-représen‐ tation du problème réel. Il y a de façon actuelle qu'on joue avec les listes pour qu'elles paraissent mieux qu'elles sont , déplore-t-il.

Il faut tenir compte du fait que le jeu de cacher les pa‐ tient qui attendent depuis plus d'un an peut s'intensifie­r plus on approche des élec‐ tions et du temps où ça compte, avertit le Dr Nguyen.

Il cite en exemple des pa‐ tients qui attendent depuis plus d'un an, mais que, pour une raison ou une autre, ils n'étaient pas disponible­s pour une période de temps. Ils sont comptabili­sés de nouveau seulement lorsqu'ils sont disponible­s.

Par ailleurs, la FMSQ es‐ time que le partage des don‐ nées par le ministère de la Santé est un pas dans la bonne direction. Le Dr Oliva aimerait que le nombre de chirurgies annulées par jour soit indiqué dans le tableau de bord du MSSS.

Il s’agit d’une donnée ob‐ jective et mesurable dont l’améliorati­on peut facile‐ ment être constatée. Le dé‐ ploiement du plan de rattra‐ page passe nécessaire­ment par un portrait précis des in‐ tervention­s chirurgica­les au Québec, dont les annulation­s à chaque jour font partie, es‐ time le porte-parole des mé‐ decins spécialist­es.

50 M$ utilisés…. sur une enveloppe de 400 M$

Le ministère de la Santé affirme ne pas avoir le mon‐ tant exact dépensé pour chaque établissem­ent de santé, mais qu'environ 50 M$ des 400 M$ de l'enveloppe ont été attribués jusqu'à pré‐ sent.

Ces sommes devaient ser‐ vir, entre autres, pour finan‐ cer le temps supplément­aire des employés du réseau de la Santé afin d’étirer les heures d'ouverture.

Ce montant a été prélevé à même la masse salariale

des médecins et on constate que cette enveloppe n’a pas vraiment été touchée encore, constate le Dr Nguyen.

Les 400 millions $ étaient en fait un montant réinvesti grâce aux travaux réalisés par l'Institut de la pertinence des actes médicaux (IPAM), en collaborat­ion avec MSSS et la FMSQ, a précisé le gou‐ vernement du Québec dans un communiqué.

L’IPAM a dégagé cette somme en retirant certains actes médicaux que la tech‐ nologie a rendus obsolètes.

La FMSQ rappelle qu’il ap‐ partient au MSSS de mettre en oeuvre, depuis maintenant presqu’un an, les conditions requises pour s’assurer de la participat­ion des autres pro‐ fessionnel­s de soins au plan.

Santé Québec

Le Dr Nguyen se dit pré‐ occupé par la nouvelle agence en santé. Santé Qué‐ bec, c’est une bête qu’on ne connaît pas encore. Ce qu’on sait, par exemple, c’est que c’est une entité centralisé­e qui est encore plus loin du terrain que ce qu’on a connu dans le passé, confie-t-il.

Alors, ça nous fait peur parce que toute entité qui est loin du terrain, qui est dans ses bureaux, qui fait des stra‐ tégies : est-ce que c’est vrai‐ ment quelque chose qui va être applicable dans les hôpi‐ taux, auprès des patients, dans la vie de tous les jours? On a des doutes, lance-t-il.

L'attention accordée par Québec Santé à l'organisa‐ tion des soins préoccupe aussi la FMSQ.

Je ne veux pas faire de dé‐ magogie, mais notre inquié‐ tude c'est qu'on ne mette pas assez d'énergie sur l'organi‐ sation des soins et sur les di‐ rectives. Et qu'on dise aux ad‐ ministrati­on hospitaliè­res : assurez-vous que les patients qui sont prévus dans une journée électives ne soient pas annulés et essayons de renverser cette culture où on annule les derniers cas de peur qu'on dépasse le 16 h, parce qu'il y a beaucoup de patients derrière ça, plaide le président de la FMSQ.

Avec les informatio­ns de Gabrielle Proulx, Audrey Ne‐ veu, Daniel Boily et Davide Gentile

millions de dollars pour mieux les protéger contre les hausses injustes de loyer.

C’est quelque chose qu'il faut faire parce que souvent, les locataires ont moins de pouvoir dans cette relation avec les propriétai­res, dit Me‐ gan Mitton.

C’est plutôt le montant qui la rend sceptique : 15 mil‐ lions pour le pays? Je ne crois que ça ne va pas être assez, affirme-t-elle.

La députée appelle main‐ tenant le gouverneme­nt néobrunswi­ckois à réagir aussi. La crise du logement ne doit pas être la seule responsabi‐ lité du fédéral, croit-elle.

Elle préconise un plafon‐ nement efficace des loyers pour empêcher les augmen‐ tations abusives.

Dans une déclaratio­n écrite, vendredi, Jill Green, la ministre responsabl­e de la Société d’habitation du Nou‐ veau-Brunswick, a déclaré que la province était toujours heureuse de travailler avec Ottawa pour faire face à la crise nationale du logement.

Je crains toutefois que certaines de ces initiative­s tomber dans les juridictio­ns provincial­es. J'aurai besoin de voir plus de détails sur les plans proposés avant de pouvoir faire des commen‐ taires plus complets, ajoute Jill Green.

D’après le reportage de Babatundé Lawani

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