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Pas de nouvelles mines en vue malgré les records du prix de l’or

- Gabriel Poirier Valeur refuge

Le prix de l’or continue de fracasser de nouveaux re‐ cords, mais les sommets qu’atteint le métal jaune ne devraient pas transfor‐ mer de sitôt le paysage mi‐ nier de l’Abitibi-Témisca‐ mingue.

Le cours de l’or a atteint vendredi la barre des 3023 $ CA l’once tandis que l’un des précédents records remon‐ tait au début du mois de mars. À l’époque, la valeur de l’or plafonnait autour de 2900 $ CA.

C’est une bonne nouvelle, lance au téléphone le géo‐ logue et professeur associé à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamin­gue (UQAT), Robert Marquis.

Cela montre que l’avenir de l’exploitati­on minière auri‐ fère ne pose pas de pro‐ blème dans la région. Mais, en même temps, ce n’est pas nécessaire­ment ce qui va faire une différence, pour‐ suit-il.

Un prix de l’or aussi élevé aide les entreprise­s aurifères à accumuler des liquidités. Ces mêmes liquidités peuvent ensuite les aider à investir sans s’endetter ou en empruntant moins d’argent. À long terme, cependant, M. Marquis juge que la conti‐ nuité des opérations mi‐ nières repose sur d’autres atouts que détient l’AbitibiTém­iscamingue.

C’est une excellente nou‐ velle, mais ce n’est pas ce qui va faire doubler la produc‐ tion d’or au Québec demain matin.

Robert Marquis, géologue et professeur associé à l’UQAT

Le géologue donne l’exemple du potentiel géolo‐ gique que renferme le sol de la région. Il met aussi l’accent sur l’expertise des entre‐ prises et la qualificat­ion de la main-d'oeuvre, comme les fo‐ reurs, les dynamiteur­s ou en‐ core les opérateurs de ma‐ chineries spécialisé­es.

Stagnation à la bourse

Si le prix de l’or augmente, M. Marquis s’étonne de constater que la valeur de so‐ ciétés aurifères, comme Agnico Eagle, Rio Tinto et de sociétés d'exploratio­n ne bouge presque pas à la bourse.

Ça fait un petit peu mal, concède-t-il. On compte plu‐ sieurs compagnies d’explora‐ tion en Abitibi-Témisca‐ mingue qui détiennent de bonnes propriétés pour dé‐ couvrir de l’or. Mais, pour elles, l’augmentati­on de la va‐ leur de l’or ne se traduit pas par une augmentati­on de la valeur de leurs actions. Ça reste pour eux difficile de se financer à la roche.

C’est un peu aberrant. On ne comprend pas trop pour‐ quoi [...]. On comprend pour‐ quoi le prix de l’or augmente, mais on comprend difficile‐ ment comment cela ne se traduit pas par une augmen‐ tation de la valeur des entre‐ prises qui cherchent de l’or, complète Robert Marquis.

Le co-président fondateur d’InnovExplo, Alain Carrier, qui observe lui aussi ce déca‐ lage, croit que l'exploratio­n minérale pourrait bénéficier d’un second souffle.

À court et moyen terme, si les investisse­urs reviennent dans l’or, cela devrait redyna‐ miser et donner un nouveau souffle à l’exploratio­n miné‐ rale, notamment en AbitibiTém­iscamingue et à la BaieJames, stipule-t-il par écrit.

La hausse du prix de l’or pourrait également renforcer le potentiel de viabilité éco‐ nomique de certains projets d’exploratio­n.

Si le prix de l’or augmente, c’est en partie parce que le métal jaune est perçu comme une valeur refuge. C’est ce qui permet à Michel Jébrak, professeur émérite au Départemen­t des sciences de la Terre et de l'atmo‐ sphère à l'Université du Qué‐ bec à Montréal (UQAM), de rappeler que l'or gagne habi‐ tuellement en valeur dans les contextes de crises et de ten‐ sions internatio­nales.

M. Jébrak estime que le prix de l'or continuera d'aug‐ menter dans ce contexte d'incertitud­e. Il pointe aussi la faiblesse du dollar améri‐ cain, qui n’est plus indexé à l’or depuis la fin des accords de Bretton Woods et du sys‐ tème de l’étalon-or dans les années 1970.

Quand l’or monte, c’est le dollar qui baisse, explique-til. Ce que dit ce prix de l’or, c’est surtout la faiblesse de l’économie américaine, qui vit à crédit depuis presque 50 ans.

Et il y a un autre élément. On ne produit pas assez d’or, mentionne-t-il. La demande est forte, notamment de la part de l’Asie, alors que les grandes compagnies ne sont pas toujours capables d’y ré‐ pondre [...]. Le prix de l’or est là pour monter. La plupart des économiste­s disent que 2024 sera la grande période de l’or.

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