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La vie d’artiste de Ronald Labelle

- Marguerite Morin

Montréalai­s d’origine et Madelinot d’adoption, Ro‐ nald Labelle, photograph­e et artiste du verre, s’est éteint le 29 février dernier, le même jour que le lance‐ ment de son livre intitulé

La glace vivante, au temps des escouades. Retour sur

le parcours foisonnant l'ar‐ tiste décédé à l'âge de 81 ans.

C’est d’abord sur le plan de la photograph­ie que Ro‐ nald Labelle a fait sa marque.

Sa photo nous parlait, il y avait un langage derrière, un autre langage que celui, fina‐ lement, d’un technicien qui prend une photo, raconte l’auteur et poète gaspésien Sylvain Rivière, avec qui Ro‐ nald Labelle a cosigné son ouvrage testamenta­ire.

C’était un travailleu­r de terrain. Son travail, c’était un peu comme la photo-vérité. […] Il travaillai­t à l’instinct, il savait quand c’était le temps, poursuit-il.

Ronald, c’était ça, on sen‐ tait l’âme au travers du per‐ sonnage.

Sylvain Rivière, auteur et poète gaspésien

Dans les années 70, le métier de photograph­e a fait voyager Ronald Labelle et l’a amené à collaborer à des re‐ portages du magazine Pers‐ pectives ainsi qu’à travailler avec le journalist­e Pierre Na‐ deau à Radio-Canada.

Ils sont allés dans la bande de Gaza […]. Il a pris de superbes photos de [Yas‐ ser] Arafat, qui n’ont jamais vraiment paru. J’ai vu des choses qui étaient vraiment des trésors, se remémore M. Rivière.

Son parcours photogra‐ phique s’est par ailleurs rapi‐ dement lié à la scène musi‐ cale québécoise. Ronald La‐ belle a déjà été propriétai­re d’une boîte à chanson dans les années 60 à Montréal.

Il a aussi signé le visuel de nombreuses pochettes d’al‐ bum, en plus de côtoyer des grands de la musique québé‐ coise comme Robert Charle‐ bois, Pauline Julien, Louise Forestier, Renée Claude, et

bien d’autres.

Artiste du verre

Curieux et s’intéressan­t à tout, Ronald Labelle a décou‐ vert le verre comme médium artistique durant les années 70.

En 75-76, un verrier fran‐ çais, Claude Morin, a parti‐ cipé au Salon des métiers d’arts et ça avait frappé l’ima‐ ginaire de beaucoup de gens à l’époque et l’Université de Trois-Rivières avait décidé de demander à M. Morin de ve‐ nir donner des cours où une quinzaine de personnes se sont inscrites […] dont Ro‐ nald, inscrit par un de nos amis. Ça part de là, raconte son épouse, Diane Labelle.

Après avoir fait des stages et participé à des sympo‐ siums de verre en France, où il a côtoyé les grands du stu‐ dio glass movement, Ronald Labelle voulait recréer ce mouvement artistique au Québec.

Dès 1978, il est devenu propriétai­re d'une maison aux Îles-de-la-Madeleine, qui deviendra Les Ateliers du Ma‐ noir, un lieu de formation pour les potiers et artistesve­rriers.

C’était un projet d’atelier d’artisans. Ronald se cher‐ chait quelqu’un pour tra‐ vailler à l’atelier de verre et il m’a demandé si ça m’intéres‐ sait. […] Je savais que je tra‐ vaillais bien de mes mains, mais je n’avais jamais tra‐ vaillé le verre ni la poterie, ra‐ conte l’artiste verrier madeli‐ not François Turbide, qui a fondé la verrerie La Méduse, dans l’archipel.

Les Ateliers du Manoir ont été en opération aux Îles jus‐ qu’en 1983. Par la suite, Ro‐ nald Labelle s’est consacré à la mise sur pied d’un projet d’envergure, soit l’école d’art du verre, l’Espace VERRE à Montréal, qu’il a cofondé avec le verrier François Houdé.

C’était une nouveauté, parce qu’il n’y avait jamais eu d’école ni de formation en verre d’art au Québec avant cette école-là. Tous les deux ont conjugué leur expertise et leur talent, et beaucoup d’énergie, pour créer cette institutio­n, mentionne l’ex-di‐ recteur de l’Espace VERRE, Christian Poulin.

En plus d’être un forma‐ teur, Ronald Labelle était un créateur. Il a beaucoup été influencé par le mobilier hu‐ main, détaille M. Poulin. C’était une tendance urbaine, mais aussi de designer, dit-il.

Un amoureux de l’archi‐ pel madelinot

M. Labelle avait choisi avec son épouse de venir s’établir aux Îles-de-la-Made‐ leine de façon permanente pour y finir ses jours, comme il est écrit d’ailleurs dans son dernier livre.

Il est littéralem­ent tombé en amour avec les gens de la place, raconte la conteuse madelinien­ne Elaine Richard, qui était également respon‐ sable de la programmat­ion du 15e Rendez-vous loup marin.

Il côtoyait les personnes âgées, il jouait aux cartes dans les maisons, il s’intéres‐ sait à toutes les conversa‐ tions et il s’est beaucoup im‐ pliqué dans le milieu, ajoute Mme Richard.

Ronald Labelle est quel‐ qu’un qui a apporté aux Îles. Elaine Richard, conteuse Son dernier ouvrage, La glace vivante, au temps des escouades, rend hommage aux chasseurs de phoques madelinots, et témoigne du respect qu’il avait envers les sujets qui touchaient les Îlesde-la-Madeleine.

Ce livre a d’ailleurs été réalisé dans le cadre du plus récent Rendez-vous loup ma‐ rin, dans le but de souligner les 30 ans du Centre d’inter‐ prétation du phoque aux Îles.

Avec les informatio­ns de Marie-Claude Tremblay.

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