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Y a-t-il trop de magasins de cannabis illégaux à Toronto?

- Sarah Tomlinson

La Ville de Toronto sou‐ haite que la loi provincial­e régissant le commerce de cannabis soit modifiée avant de donner davantage de pouvoirs aux agents res‐ ponsables des règlements municipaux. Une cinquan‐ taine de magasins illégaux continuent de prospérer dans la Ville Reine.

Amatrice de cannabis, Ste‐ phani Engler en vend dans un magasin légal au centrevill­e de Toronto. Elle croit que la réglementa­tion de l’indus‐ trie du cannabis n’est pas as‐ sez rigoureuse.

C’est une industrie très détendue, surtout en raison du marché gris et des maga‐ sins illégaux éparpillés dans la ville. Ce sont les pires en‐ droits pour chercher du can‐ nabis parce que leurs pro‐ duits ne sont pas assez tes‐ tés, affirme-t-elle.

Mme Engler fréquentai­t auparavant les magasins illé‐ gaux parce qu’ils offraient des prix moins élevés.

Elle dit avoir subi une des pires réactions physiques et mentales de sa vie après avoir consommé un joint in‐ fusé acheté dans un tel éta‐ blissement.

Ce n'était pas comme la sensation normale que l'on obtient avec un joint ordi‐ naire, se souvient-elle.

En inspectant le joint plus attentivem­ent, elle affirme avoir senti une odeur plus synthétiqu­e.

C’est à ce moment-là qu'elle s'est dit que le produit qui lui avait été vendu était de la marijuana synthétiqu­e, pouvant entraîner de graves conséquenc­es médicales, dont un rythme cardiaque ra‐ pide, des vomissemen­ts et même des hallucinat­ions.

Je ne les fréquente plus depuis cet incident. J’achète seulement des produits des commerces légaux parce que je sais que leurs produits sont réglementé­s par le gou‐ vernement.

Stephani Engler, ven‐ deuse de cannabis à Toronto

Toronto est-elle vrai‐ ment saturée de magasins?

Selon la Ville de Toronto, il y a actuelleme­nt 215 com‐ merces légaux et 53 maga‐ sins illégaux de cannabis. Cela signifie qu’à peu près un magasin sur cinq est illégal à Toronto.

C'est trop, même sans compter les magasins légaux, croit le professeur à l’Univer‐ sité Métropolit­aine de To‐ ronto en entreprene­uriat et conseiller pour l’industrie du cannabis, Bradley Poulos.

Pour que le secteur soit viable, il faut en quelque sorte le redimensio­nner. Il faut qu'il y ait bon nombre d'acteurs et c'est encore un peu lourd à Toronto et dans les grands centres au Ca‐ nada.

Bradley Poulos, profes‐ seur à l’Université Métropoli‐ taine de Toronto en entrepre‐ neuriat et conseiller pour l’in‐ dustrie du cannabis

Daniel Bear, directeur du Centre d’Innovation au Col‐ lège Humber, pense toute‐ fois que la saturation du marché a des effets positifs.

Lorsque les consomma‐ teurs fréquenten­t ces es‐ paces légaux, nous pouvons leur proposer des cam‐ pagnes d'éducation publique et des informatio­ns sur la ré‐ duction des risques, préciset-il.

Pour ce qui est des com‐ merces illégaux, une réduc‐ tion est nécessaire, selon Bradley Poulos.

Ils exercent une pression sur le marché légal, car chaque dollar dépensé sur le marché illicite est un dollar qui n'est pas dépensé sur le marché légal.

Bradley Poulos, profes‐ seur à l’Université Métropoli‐ taine de Toronto en entrepre‐ neuriat et conseiller pour l’in‐ dustrie du cannabis

Qui est responsabl­e de l’inspection des magasins de cannabis en Ontario?

L’octroi de permis pour les magasins de détail de canna‐ bis est géré par la Commis‐ sion des alcools et des jeux de l’Ontario (CA JO).

La CAJO affirme accorder des permis qu'à ceux qui sa‐ tisfont toutes les exigences et dit mener des inspection­s ré‐ gulières.

Par contre, la commission dit n’avoir aucune autorité ré‐ glementair­e sur les magasins de cannabis qu’elle n’a pas autorisés. Cette responsabi‐ lité relève de la compétence de la police municipale, selon un porte-parole de la CA JO.

La Ville de Toronto affirme que la loi sur le contrôle du cannabis présente de nom‐ breux défis en ce qui concerne l’inspection pour les agents chargés de l'appli‐ cation des règlements muni‐ cipaux.

Ses agents ne disposent pas de pouvoirs d'arrestatio­n et ne sont pas autorisés ou formés à faire usage de la force pour appliquer la loi.

L’inspection est ainsi plus difficile et même dangereuse pour les agents chargés des règlements municipaux, af‐

firme un porte-parole de la Ville.

C’est pourquoi la Ville ai‐ merait que le gouverneme­nt provincial révise cette loi pour modifier les responsabi‐ lités des municipali­tés et éventuelle­ment faciliter sa mise en pratique.

Stephani Engler semble en tout cas avoir compris le message et tente même de le disséminer à ces clients pour les empêcher de vivre l'expé‐ rience qu’elle a vécu en fai‐ sant des achats à un magasin illégal.

J’essaie de dire aux gens qu’ils prennent un énorme risque en faisant des achats dans des magasins illégaux. Ça peut être des produits fantastiqu­es, mais ça peut aussi être des produits qui peuvent empoisonne­r, ditelle.

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