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Itinérance : Montréal se donne 6 mois pour réfléchir aux campements et centres de jour

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Daniel Boily, Davide Gentile Depuis un an, Montréal a démantelé près de 500 campements de personnes en situation d'itinérance. Le gouverneme­nt fédéral implore les villes de cesser cette pratique.

Selon les informatio­ns ob‐ tenues par Radio-Canada, la Ville de Montréal se ques‐ tionne sur la sécurité et l’hé‐ bergement des sans-abris, notamment dans les campe‐ ments et les espaces publics.

Un comité de 16 per‐ sonnes, incluant des repré‐ sentants du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), du réseau de la santé et des services sociaux, des organismes communauta­ires oeuvrant en itinérance ainsi que des milieux de la re‐ cherche et des affaires, a été mis sur pied pour mener une réflexion sur ces problèmes.

Pour le responsabl­e de l'urbanisme et de l'itinérance au comité exécutif de Mon‐ tréal, Robert Beaudry, il est clair qu’on devrait offrir plus de services à la population itinérante peu importe com‐ ment elle se loge et où elle se trouve sur le territoire.

M. Beaudry précise que la Ville n’a pas l’intention de cesser le démantèlem­ent des campements.

On va continuer avec nos partenaire­s notre travail de démantèlem­ent, quand il y a des problèmes de sécurité.

Robert Beaudry, respon‐ sable de l’urbanisme et de l’itinérance au comité exécu‐ tif de Montréal

Depuis un an, la Ville a procédé à des centaines de démantèlem­ents. Un travail délicat, au moment où le nombre de personnes en si‐ tuation d’itinérance explose un peu partout au Québec. Selon le dénombreme­nt pu‐ blié l’automne dernier, 13 % des sans-abris avaient passé la nuit dans des lieux exté‐ rieurs.

Montréal doit également jongler avec une crise du lo‐ gement sans précédent. La Ville tente de racheter des maisons de chambre consi‐ dérées comme le dernier rempart contre l’itinérance.

Le refuge de l’Hôtel-Dieu, dont la fermeture est prévue en juillet prochain, doit en principe faire place à des lieux d'hébergemen­t plus pe‐ tits. Le CIUSSS du CentreSud-de-l'Île-de-Montréal a lancé un appel de projets en ce sens.

Comme le souligne le commissair­e aux personnes en situation d’itinérance à la Ville de Montréal, Serge La‐ reault, on met beaucoup l'ac‐ cent sur les campements, mais il y a aussi des per‐ sonnes qui dorment dans les entrées de commerce, dans les ruelles, et toutes ces per‐ sonnes-là ont en commun qu'elles n'accèdent pas aux services d'hébergemen­t et que l'on a de plus en plus de difficulté à les rejoindre et à les raccrocher à des services d'aide.

L’administra­tion hésite à pérenniser des services sani‐ taires dans les campements existants.

On distribue des bou‐ teilles d'eau l'été. Est-ce qu'on devrait multiplier ça dans les campements ou les tentes? On va voir ce que les experts vont nous dire, précise M. La‐ reault.

Un rapport doit être dé‐ posé en octobre 2024 à la di‐ rection générale de la Ville de Montréal.

Le déclencheu­r

Selon nos informatio­ns, un récent rapport de la dé‐ fenseure fédérale du loge‐ ment, Marie-Josée Houle, a contribué à la décision de la Ville de Montréal de mettre sur pied un comité d'experts.

En entrevue, Mme Houle a rappelé que le démantèle‐ ment de campements cause beaucoup plus de tort et de traumatism­e [...] alors non, ce n'est absolument pas une solution.

Pour bien respecter les droits de la personne, il faut s’assurer que les gens [dans les campements] ont accès aux services sanitaires, peuvent utiliser une salle de bain et se laver les mains avec dignité, sont nourris, ont accès à du chauffage et sont protégés.

Marie-Josée Houle, défen‐ seure fédérale du logement

Pour la défenseure fédé‐ rale, la solution aux campe‐ ments, c’est un logement permanent.

Lors de la publicatio­n du rapport, en février dernier, le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérante­s de Mon‐ tréal (RAPSIM) a appuyé les recommanda­tions de la dé‐ fenseure fédérale du loge‐ ment.

Le RAPSIM demande un arrêt immédiat des démantè‐ lements de campements à Montréal, un investisse­ment massif dans le logement so‐ cial et communauta­ire ainsi que le développem­ent de lieux d'accueil et d'héberge‐ ment ouverts 24/7, acces‐ sibles à une multiplici­té de profils de personnes, et ce, à longueur d'année, avait pu‐ blié l’organisme.

Différente­s approches

D’autres villes ont des ap‐ proches différente­s. L’admi‐ nistration municipale de Lon‐ gueuil, par exemple, fait preuve de tolérance en s’ap‐ puyant notamment sur la Charte canadienne des droits et libertés qui stipule que, si une ville ne peut loger toutes les personnes itinérante­s, elle ne peut démanteler les campements.

À Gatineau, la Ville a tenté l’an dernier de déplacer un groupe installé aux abords d’un aréna pour raison de sé‐ curité. Une injonction a ce‐ pendant donné raison aux demandeurs. La Ville doit te‐ nir un sommet sur l’itiné‐ rance prochainem­ent.

À Kingston, en Ontario, policiers et fonctionna­ires se sont présentés dans un parc urbain mercredi matin pour signifier aux personnes sur place qu’elles ne pouvaient plus demeurer dans leur campement durant la jour‐ née.

Selon CBC, la Ville affirme avoir étendu ses services d'hébergemen­t de jour pour une trentaine d'espaces entre 9 h et 21 h, 7 jours sur 7. Ceux qui espèrent conti‐ nuer à s'abriter dans les parcs peuvent toujours ins‐ taller leurs tentes, mais n'y séjourner que la nuit (une heure avant le coucher du soleil et une heure après son lever).

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