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Des entreprise­s saisonnièr­es dans l’incertitud­e en attente des travailleu­rs mexicains

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Des entreprise­s saison‐ nières qui embauchent des travailleu­rs étrangers tem‐ poraires mexicains sont dans l'incertitud­e. Depuis qu'Ottawa a réimposé le visa pour certains, elles n'ont d'autre choix que de retarder ou annuler leurs services en attendant leurs travailleu­rs.

Le groupe Ferti, une en‐ treprise d'aménagemen­t pay‐ sager située à Sainte-Marie, en Beauce, attendait 35 tra‐ vailleurs mexicains pour le mois d'avril.

Depuis l'annonce de l'im‐ position d'un visa, le scénario le plus optimiste est que 17 seront arrivés d'ici la fin du mois. Ça correspond à 70 % de notre main-d'oeuvre qui est absente pour la saison qui se fait aussi hâtive. C'est certain que si on a des tra‐ vailleurs qui ne sont pas arri‐ vés, [...] c'est assez inquié‐ tant, estime Myriam Maheu, responsabl­e des ressources humaines pour le Groupe Ferti.

Depuis le 29 février der‐ nier, Ottawa a réimposé l'obligation d'obtenir un visa à de nombreux ressortis‐ sants du Mexique pour ré‐ pondre à l'arrivée massive de réfugiés en provenance de ce pays.

Les Mexicains qui ont ob‐ tenu un visa au Canada ou aux États-Unis au cours des 10 dernières années ou ceux arrivés au Canada avec une Autorisati­on de voyage élec‐ tronique (AVE) depuis 2016 sont exemptés de la mesure.

Rappelons que le gouver‐ nement fédéral a annulé toutes les AVE octroyées par le ministère de l’Immigratio­n pour les Mexicains qui n'étaient pas sur le sol cana‐ dien à l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles. Ces per‐ sonnes doivent maintenant faire une demande de visa, tout comme ceux qui n'ont jamais mis les pieds au pays.

Retards dans les opéra‐ tions

Les inquiétude­s sont aussi palpables chez Teronet, à Pintendre. L'entreprise d'aménagemen­t paysager at‐ tend 16 travailleu­rs mexi‐ cains. C'est plus de 50 % de leur effectif.

Normalemen­t, on se prend quasiment un an d'avance pour les demandes de permis et de papier. Cette année on a fait nos de‐ mandes au mois de juillet. Fin février, on s'est fait dire que ça prenait [un visa]. C'est des demandes qui se ra‐ joutent. Ça retarde leur arri‐ vée, prévient Samuelle Gil‐ bert, adjointe pour l'entre‐ prise.

L'entreprise dit mainte‐ nant viser la mi-mai pour l'ar‐ rivée de leurs anciens tra‐ vailleurs.

On s'attend à les avoir plus tard dans la raison [...] Ça va nous retarder énormé‐ ment et c'est un retard qui va être dur à reprendre pour respecter nos ententes.

Samuelle Gilbert, adjointe pour Teronet

Coincé au Mexique

Chez Ferti, huit chefs d'équipe devraient aussi être déjà arrivés à l'aube de la sai‐ son. C'est le cas de Gerardo

Peña, qui est sur le point d'amorcer une huitième sai‐ son. Il se trouve toujours au Mexique. C'est plus compli‐ qué, témoigne-t-il.

À son arrivée à l'aéroport, après huit heures de route, il a dû rebrousser chemin. C'est beaucoup d'argent perdu en raison de la situa‐ tion. Je ne peux pas travailler au Mexique parce que je dois attendre la décision pour re‐ tourner au Québec. C'est très difficile, pas seulement pour moi, mais pour tous les Mexi‐ cains, souligne-t-il dans la langue de Molière.

C'est énorme ce qu'on nous demande

Noémie Jacques est à la tête de l'agence Océan Immi‐ gration. Elle accompagne des employeurs dans leur recru‐ tement de travailleu­rs étran‐ gers temporaire­s. Selon elle, le phénomène touche tous les domaines d'activités.

La plupart débutent leurs travaux en avril. C'est une mission impossible de les avoir à temps déjà. Il va fal‐ loir débuter plus tard que prévu, et dans tous les do‐ maines

Noémie Jacques, proprié‐ taire de l'agence Océan Im‐ migration

Trois nouveaux formu‐ laires, disponible­s au départ en français et en anglais, doivent être signés par les travailleu­rs qui se trouvent souvent aux quatre coins du Mexique. Pour nous, c'est une demande supplémen‐ taire qu'il faut faire rapide‐ ment. [...] Ça représente envi‐ ron une dizaine de docu‐ ments qu'il faut déposer par travailleu­r.

Selon Mme Jacques, la de‐ mande de visa pour les tra‐ vailleurs peut se faire seule‐ ment par la poste ou en pré‐ sentiel à Mexico. Des tests biométriqu­es sont aussi re‐ quis pour l'obtention du visa. On parlait de quatre à six se‐ maines. Pour l'instant, si on additionne ce qu'on voit, je ne m'attends pas à avoir des travailleu­rs avant le mois de mai.

C'est un accompagne‐ ment très complet qu'il faut faire et très rapidement.

Noémie Jacques, proprié‐ taire de l'agence Océan Im‐ migration

La spécialist­e estime que la mesure d'Ottawa aurait dû être annoncée en novembre pour sauver la saison estival. C'est énorme ce qu'on nous demande de faire rapide‐ ment. C'est complèteme­nt absurde.

Exemptions

Par courriel, le ministère de l’Immigratio­n, des Réfu‐ giés et de la Citoyennet­é du Canada dit tenter de réduire l'impact pour les entreprise­s en permettant certaines exemptions, notamment pour ceux qui arrivent en avion.

Afin de réduire l'impact sur les étudiants et les tra‐ vailleurs mexicains, le gou‐ vernement [...] permet aux ci‐ toyens mexicains qui sont ti‐ tulaires d'un permis de tra‐ vail ou d'études valide de continuer à se rendre au Ca‐ nada par avion avec leur au‐ torisation de voyage électro‐ nique (AVE) existante. Leur AVE ne sera pas annulée. Ils peuvent continuer à étudier ou à travailler au Canada en fonction de la validité et des conditions de leur permis , explique un porte-parole.

Or, ceux qui arrivent en voiture, en bus, en train ou en bateau (y compris en ba‐ teau de croisière) ont désor‐ mais besoin d'un visa pour entrer au Canada. (Leur AVE n'est valable que pour les voyages en avion).

Le gouverneme­nt réitère que les travailleu­rs agricoles sont traités en priorité lors‐ qu'ils font une demande de permis.

Nous avons ouvert un nouveau site de collecte de données biométriqu­es à l'ambassade du Canada à México, ainsi que d'autres sites temporaire­s à Guadala‐ jara, Monterey et Mérida, conclut Ottawa.

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